DE GRENOBLE A MENS PAR AVIGNONET, MARCIEU ET SAVEL

 

 

Au moins jusqu’à Vif, le tracé de cette voie est celui de la voie Grenoble – Fréjus. Ensuite, de Vif à Saint Martin de la Cluze, on peut s’interroger sur son cheminement. Deux hypothèses sont envisageables :

 

-          un tracé voisin de l’actuelle Nationale 75 par le Crozet, le Sert et, à partir de la côte 612, Saint Martin de la Cluze par le chemin s’élevant parallèlement à la route nationale,

-          un tracé jusqu’alors inédit par Merlatière (ancien oratoire), Chabotte (paroisse connue dès au moins le 11ème siècle), les Rossinants, le Bois du Château et Saint Martin de la Cluze (les Cinq Chemins).

 

Des Cinq Chemins, site de carrefour évident, la voie gagnait par un chemin encore identifiable, l’Est des Marceaux sur Avignonet et, de là, la « croix de la Rose ». Il est à remarquer que ce chemin, sur une partie de son tracé, sert encore de limite communale entre Avignonet et Sinard, ce qui est un gage d’ancienneté.

 

Son tracé est ensuite imprécis jusqu’à l’actuelle chapelle Sainte Luce emplacée, selon toutes probabilités, au bord même de la voie. Celle ci, bien tracée en larges courbes avec soutènements aux endroits délicats, descend, par une pente raisonnable, au Drac.

 

Depuis la mise en eau du barrage de Monteynard-Avignonet, les lieux ont tellement été bouleversés qu’il est difficile aujourd’hui de conceptualiser ce qu’étaient les gorges du Drac à l’antiquité. Néanmoins, il est remarquable de constater la parfaite trace fossile de l’ancienne voie romaine tant du côté d’Avignonet que sur l’autre rive, sur le territoire de la Motte Saint Martin.

 

Entre les deux rives et, sans doute, très en contrebas du niveau actuel du Drac, existait un pont, édifié vraisemblablement dès l’époque romaine et réparé ou reconstruit à diverses époques : ainsi, en 1228, la Dauphine Béatrix fait-elle un legs pour sa reconstruction.

 

La fonction originelle de ce pont était de joindre le Trièves oriental à la Matheysine, ces deux régions faisant, selon toutes probabilités, partie d’un même territoire antique – celui des Tricorii – puis de desservir les importants thermes romains de la Motte.

 

Ceux ci étaient situés un peu au dessous du niveau actuel de la cascade du Perailler : on a, en effet, découvert vers 1843, à trente mètres du Drac, les traces d’un établissement thermal et, notamment, une piscine, des ruines de murailles, une quantité importante de briques et deux aqueducs de construction différente : le premier fait de deux rangées d’imbrices inversées, le second construit en béton de chaux, de gravier et de briques rouges concassées. La découverte « in situ » d’un as de Nîmes laisse penser à une haute origine : au moins le premier quart du 1er siècle de notre ère.

 

Il n’est pas alogique de penser que ces thermes avaient pu être organisés de part et d’autre du Drac car, en face des sources, côté Avignonet, un mur de 7 mètres de long sur 30 centimètres de large était visible au 19ème siècle. Jules Chevrier qui a vu et étudié ces thermes romains, indiquait que ce mur était de même époque et que, dès lors, il convenait de le mettre en relation directe avec les vestiges de la Motte.

 

La voie romaine est encore nettement identifiable sur le versant Nord de la Motte et, notamment, en un point où une saignée de la roche et des murs de soutènement restent assez probants.

 

C’est peut-être au Pérailler qu’était situé le carrefour des voies desservant les thermes de la Motte : celle d’Avignonet à Savel, étudiée ici et celle de la Mure à Grenoble par Monteynard et le pays de Commiers, sans que l’on sache précisément si ce sont les thermes qui ont favorisé l’implantation de ces voies ou l’inverse : pour Prudhomme, les thermes de la Motte étaient connus des Cularonenses et fréquentés par eux.

 

Du Pérailler, la voie traversait du Nord au Sud la commune de Marcieu passant, selon V. Miard, aux hameaux de Roac, des Champs et de Mignane.

 

Elle abordait ensuite la commune de Mayres Savel par Châteaubois puis, par un tracé voisin de l’actuelle route départementale 116, devait tendre sur les deux lieudits caractéristiques que sont « la Traverse » et « le Pont » puis franchissait le Drac un peu en amont de Savel, à l’endroit même où le torrent se trouvait resserré entre les roches.

 

Le pont qui était jeté là et dont il subsistait encore des traces au lieudit « le Pont » avant la mise en eau du barrage de Monteynard était, semble t-il, d’origine romaine. Il fut reconstruit ou restauré vers 1327 avant d’être détruit en 1720 ou 1721 lors de la peste de Marseille par les habitants des deux rives, soucieux de s’isoler.

 

La plupart des auteurs font ensuite passer cette voie à Villarnet, Villard Jullien et Cornillon en Trièves puis à Mens, atteint par le col du Thaud.

 

Au delà de Mens la voie se poursuivait d’une part en direction de Lalley et du col de la Croix Haute, d’autre part en direction de Gap par Pellafol et Corps.