UNE
MAISON FORTE DE LA VALLEE DE LA GRESSE : LE GROIN AU GUA
Au
nord de Saint Barthélemy (commune du Gua) subsiste,
sur un éperon herbeux, une ruine médiévale romantique à souhait : c’est le
seul reste de l’ancienne maison forte du Groin dont le nom, insolite, parait
dériver, comme d’ailleurs celui de la commune de « vadum ».
En
effet, cependant que le nom du mandement évoluait à compter du 11ème
siècle de « vadum » en « vado », « guado »,
celui de la localité qui nous intéresse ici, sans doute de même souche éthymologique, évoluait en « Gronz »,
« Groyn », « Goinum »,
« Goignum » (13ème siècle),
« Groinum », « Grognium »,
« Grogny » (14ème siècle),
« Grogni », Gronyo »
(15ème siècle) puis « Groing »
et « Groin » (18ème siècle).
« Vadum », c’est bien évidemment le gué qui existait de
haute origine sur la Gresse, entre le Genevrey de Vif et les Saillants. Le « V » s’est
peu à peu changé en « G » cependant que tombait le « d ».
Le « a » a subsisté dans « Ga » ou
« Gua », le suffixe « um » disparaissant dans le même temps.
Ainsi,
en rapprochant « Guado », « Guareé de « Gronz »,
« Grognum » entrevoit-on comment le « vadum » primitif a pu, à la fois, former « Gua » et « Groin ».
On
ne connaît pas l’origine exacte de cette construction médiévale ;
cependant, l’existence, attestée dès le 11ème siècle, de l’église Saint Barthélemy, à très peu de distance,
laisse entrevoir une assez haute époque, d’autant qu’il n’est pas improbable
que la tour du Groin ait été édifiée sur une motte médiévale.
Toutefois,
la première mention certaine qui la concerne est un hommage du 29 avril 1297
rendu à Guigues ALLEMAN, seigneur de Valbonnais, par Jacquemet de
COMMIERS, alors dénommé « seigneur de Gronz »
qui reconnaît tenir en fief la maison forte et le bourg y attenant. Lui seul y
avait juridiction, à l’exception néanmoins de la haute justice dévolue audit Guigues et le tiers de la moyenne et de la basse relevant
de Guilaume, seigneur de Miribel. Jacquemet
de COMMIERS reconnaît, en outre, à cette occasion, une vigne au territoire du
lieu (*) et tout ce qu’il possédait à Claix et à Varces
sous quarante sols de plaid.
Le
13 février 1300 (ou 1301), une transaction entre Guillaume de Claix et Guigues Alleman a lieu par
l’entremise d’Aymon et d’Hugues de Commiers, frères, chevaliers et parents de Jacquemet de Commiers, assistés
de leur neveu Jacques de Commiers, chanoine au
chapitre cathédral de Grenoble.
Peu
après, le 14 juin 1307, ce dernier apparaît comme doyen du même chapitre.
L’enquête
des commissaires delphinaux de 1339, établie
préalablement à la cession du Dauphiné, montre que la maison forte de « Grognium » appartient alors à Hugues de Commiers, seigneur du lieu.
(*)
peut être s’agit-il de celle qui subsiste encore sur les contreforts est de la
maison forte ?
Le
25 mai 1344, Jean Béranger, seigneur du Gua et de
Miribel, prête hommage lige au dauphin Humbert II pour le château du Gua ; deux ans plus tard, le 26 mars 1346, il achète à
Guigues de la Tour la septième partie de la justice
du Gua et du Groin.
En
1405, noble Jean de Commmiers est mis en possession
par noble Raymond du Gua, vicomte de Vif, de la
maison forte de Groin au mandement du Gua, d’une
vigne, d’un jardin et d’une terre en dépendant. On ne dispose pas
malheureusement d’autres mentions sur la maison forte de Groin dont la
possession est ensuite confondue avec celle du Gua.
Par
sa situation topographique, le Groin commandait une partie du pays et,
notamment, la basse vallée de la Gresse ; de son
donjon, le château du Gua, aujourd’hui en ruines,
était très distinctement visible.
De
la maison forte, jadis redoutable, ne subsiste aujourd’hui qu’une belle tour
carrée de huit mètres de coté et de près de quinze mètres d’élévation, en petit
appareil régulier. Selon toute apparence, le donjon originel dominait un corps
de logis et une haute cour au sud dont subsiste encore en partie le mur est.
L’ensemble devait originellement être enclos de remparts dont seules quelques
substructions demeurent encore discernables.
Bibliographie :
-
Archives
Départementales de l’Isère, manuscrits B 4205, B 4215, B 4443 F°69 et B 4449 F°
9 et 105
-
Guy
ALLARD : recherches sur le Dauphiné, manuscrit du 17ème siècle
(BMG U 439) et histoire du Dauphiné (U 440)
-
RENAUD :
notes sur la commune du Gua, manuscrit 1887 (BMG R
7718.83)
-
Regeste
Dauphinois, n° 14887, 15791 et 17101
-
J.
C. MICHEL : histoire du château du Gua et de ses
seigneurs, le Bruyant, n° 44, février 1983, pages 6 à 12
-
J.
C. MICHEL : la maison forte du Groin au Gau dans
Archéologie chez vous, n° 4, 1985, notice n° 179
-
E.
TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1996, page 203