Préhistoire du Trièves
C’est
peu de le dire, le Trièves demeure une région mal
connue au plan de l’antiquité et, à fortiori, de la préhistoire.
Si
elle avait été produite il y a de cela seulement une dizaine d’années, la
synthèses des découvertes archéologique eut été bien indigente. Certes, on
connaissait depuis longtemps un axe protohistorique joignant Grenoble à la
Durance, jalonné par les découvertes déjà anciennes de Varces
(Rochefort), de Saint Michel les Portes et de la Croix Haute. Mais, hors de cet
axe, les trouvailles étaient rares voire ténues.
Les
découvertes récentes et spectaculaires faites à l’occasion des fouilles
préventives préalables à la construction de l’autoroute A 51 (Saint Paul les Monestier, Sinard) tout autant
que l’exploration scientifique des hauts plateaux du Vercors (Chichilianne, Gresse en Vercors, Tréminis) permettent désormais de compléter
significativement l’inventaire des sites préhistoriques des trois cantons du Trièves (Clelles, Mens et Monestier de Clermont).
Pour
une meilleure lisibilité, cette étude sera présentée dans l’ordre des cantons
énumérés ci avant et, pour chacun d’eux, commune par commune. Ceci a été jugé
préférable à une présentation chronologique qui aurait amené une certaine
redondance des sites, nombre d’entre eux ayant connu une longue occupation
préhistorique.
Autant
le préciser clairement, cette synthèse datant de 2004 ne fait qu’emprunter aux
publications scientifiques publiées sur les sites évoqués. La bibliographie
présentée en fin d’étude indique clairement les sources utilisées et je me suis
gardé de toute interprétation personnelle.
Préalablement
et pour une bonne compréhension, seront rappelées les grandes divisions
classiques de la préhistoire et de la protohistoire.
Préhistoire (ou âge de
la pierre) (d’environ
– 800 000 ans à – 1800) :
-
de
– 800 000 à – 80 000 ans : époque du paléolithique inférieur ou
ancien
-
de
– 80 000 à – 35 000 ans : époque du paléolithique moyen
(Moustérien)
-
de
– 35 000 à – 10 000 ans : époque du paléolithique supérieur
(Magdalénien, Solutréen, Périgordien)
-
de
– 10 000 à – 3500 ans : époque du mésolithique ou épipaléolithique
(Azilien, Castelnovien, Sauveterrien)
-
de
– 3500 à – 2300 ans : époque néolithique (Chasséen)
-
de
– 2300 à – 1800 ans : époque charnière entre la préhistoire et la
protohistoire. Début de l’âge des métaux ou Chalcolithique (Age du cuivre).
On
notera que le Trièves n’a pas révélé, à ce jour, de
vestiges antérieurs à l’épipaléolithique.
Protohistoire (ou âge
des métaux) :
-
de
– 1880 à – 1500 ans : époque du bronze ancien
-
de
– 1500 à – 1200 ans : époque du bronze moyen (civilisation des tumulus)
-
de
– 1200 à – 800 ans : époque du bronze final (civilisation des Champs
d’Urnes)
-
de
– 800 à – 500 ans : époque de Hallstatt ou premier âge du fer
-
de
– 500 à – 120 ans : époque de la Tène ou
deuxième âge du fer
CANTON DE CLELLES
CHICHILIANNE
-
en
1904, H. MULLER a découvert dans un champ des éclats de silex d’époque
épipaléolithique
-
Au
« Pas de l’Essaure », à
-
Au
« Pas de l’Aiguille », à
-
A
« Chaumailloux », à
-
au
« Pré de la Font Chamousset », à
-
à
« Source Chevalière » en 2001, on a repéré un gisement également
mésolithique.
CLELLES
-
en
1875 on a découvert, sur un site non précisé, un marteau poli en amphibolite
d’époque néolithique de forme trapézoïdale et de section rectangulaire.
Celui-ci est conservé au Musée Dauphinois (67.3.30)
-
deux
haches de même époque sont également signalées par Georges de MANTEYER. Elles
semblent avoir disparu.
LALLEY
-
en
1904 sur un tertre entre Lalley et Saint Martin de Clelles on a découvert des silex taillés d’époque
mésolithique
-
au
col de la Croix Haute (versant Drômois) on a trouvé dans des circonstances et à
une date non précisées une fibule à protéburance
(fibule dite « à navicella ») provenant
d’Italie Orientale de l’époque de Hallstatt (7ème ou 6ème
siècles avant notre ère). Cette découverte témoigne d’une voie nord sud aisée
et fréquentée dès une haute époque
-
en
2000, une grotte et un abri sous roche contenant des ossements d’ovi – caprinés et quelques silex ont été découverts.
LE PERCY
-
des
silex d’époque néolithique auraient été découverts.
SAINT MARTIN DE CLELLES
-
dans
un champ à « Trézannes » on a découvert
avant 1904 des haches et des flèches en silex de tradition azilienne
-
au
lieudit « les Sées », au sommet d’un éperon rocheux dominant l’Ebron, à
-
en
1905 on a découvert un petit poignard en roche verte polie à languette
trapézoïdale et à tranchant affûté, aujourd’hui au Musée Dauphinois
(67.12.203).
SAINT MICHEL LES PORTES
-
le
20 février 1905, au lieudit « le Gerbon »,
près de la gare, on a mis au jour une sépulture de l’époque du Hallstatt final qui
contenait deux bracelets en bronze, l’un rond l’autre fermé, de section ovale,
décorés de traits incisés simulant des torsades (Musée Dauphinois 67.12.64 et
67.12.91).
-
dans
des circonstances non décrites on aurait découvert, sur les berges du ruisseau
du Plot, des tessons céramiques du bronze final de grandes dimensions.
CANTON DE MENS
MENS
-
on
a découvert, dans un ravin sur les rives de l’Ebron,
une hache en pierre polie d’époque néolithique
-
aux
« Armillières » sur le Serre de Mens on a
découvert une hache de même époque. Une
troisième hache, perdue, est également signalée.
-
Au
« Châtel » (ancienne commune de Saint Genis,
rattachée à Mens en 1973) existe un bloc erratique avec cupules, rigoles
creusées et quelques ornements sculptés qui passe pour avoir été une
« pierre à sacrifice ». Il s’agit peut être d’un mégalithe, eu égard
à la présence de cupules.
SAINT BAUDILLE ET PIPET
Un
bracelet en bronze est conservé au musée de Vienne avec la seule mention
« Saint Baudille ». S’agit-il d’une
découverte faite à Saint Baudille et la Tour ou, plus
probablement à Saint Baudille de la Tour ?
SAINT SEBASTIEN
Vers
« Masserange », on a découvert une hache
d’époque néolithique.
TREMINIS
Au
« Col de la Croix », à
CANTON DE MONESTIER DE
CLERMONT
GRESSE EN VERCORS
-
en
1920, à l’embranchement du col de l’Allimas, on a mis
au jour de nombreuses sépultures du bronze final contenant chacune un pot en
grès
-
au
lieudit « Jasse de la Playe »,
F. GAUTIER a recueilli des tessons céramiques du bronze final
-
au
sommet du « Grand Veymont », à
-
à
« Gerland », à
-
à
« Prépeyret », à
MONESTIER DE CLERMONT
-
la
Pierre du Prêtre » passe traditionnellement pour être un ancien mégalithe.
Néanmoins, elle ne présente aucune trace de cupules et les fouilles liées à
l’emprise de l’A 51 n’ont révélé aucun mobilier
-
au
lieudit « les Quouas », en contrebas du col
du Fau, on a découvert en 2001 quelques tessons préhistoriques de part et
d’autre d’un ruisseau.
ROISSARD
En
1912, lors de travaux d’adduction d’eau au lieudit « les Auches », on aurait découvert une station chalcolithique.
Récemment, une hache néolithique aurait été exhumée.
SAINT ANDEOL
Au
« Pas Morta », à
SAINT GUILLAUME
H.
MULLER a découvert, en un lieu et dans des circonstances non relatées, des
vestiges néolithiques fragmentaires et des débris de céramiques de l’époque de
Hallstatt.
SAINT PAUL LES MONESTIER
Au
« Col du Fau », au lieudit « les Condamines »,
les fouilles de l’A 51 ont livré un site de col occupé avec discontinuité du
néolithique au bronze final. Celui-ci a livré de nombreux éclats de débitage,
des traces d’un foyer remontant à environ 3000 ans et quelques morceaux de
céramique du bronze final. On a pensé, au début des fouilles en 1994, à un possible
site cultuel accrédité par la présence de grandes dalles couchées associées à
des épandages de silex et de céramique. On avait alors cru à la présence d’un
petit ensemble mégalithique de type « cromlech ». Mais les fouilles
réalisées durant l’hiver 1995-1996 ont montré que les dalles couchées avaient
vraisemblablement une origine naturelle. Par contre, la présence de mobilier
néolithique et de soles de foyer témoignent d’un axe de circulation
préhistorique et d’un site de campements temporaires.
SINARD
On
a découvert anciennement une hache à bords droits du type dit « de Neymuz » de l’époque du bronze moyen. Celle-ci est
conservée au Musée Dauphinois (67.12.184).
Il
ne saurait bien évidemment pas être question de présenter ici une synthèse des
considérables découvertes faites à l’occasion des fouilles de l’autoroute A 51
que rien du reste ne laissait présager. On le sait, l’interprétation
scientifique appartient aux seuls fouilleurs. Dans l’attente d’une espérée
publication il ne sera donc question ici que d’éléments recueillis auprès des
archéologues ou résultant de publications scientifiques intermédiaires citées
dans la bibliographie présentée en fin de cette étude. Les travaux effectués
entre les lieudits « Pingallas » et
« Pied Taillé » ont permis de reconnaître un riche potentiel
archéologique sur
Vers
10 000 avant notre ère se produit une période de réchauffement de
l’holocène. Alors que les fonds de vallée (comme Grenoble) sont submergés par
les eaux de fonte des glaciers, les plateaux, tel celui de Sinard,
présentent alors des espaces salubres. Ce lieu de passage entre les Alpes du
nord, la vallée du Rhône, la Suisse et l’Italie a été propice à l’installation
humaine, d’autant que près de 200 sources naturelles ont été recensées. Comme
l’indique à juste titre Benoît HELLY, « les anciens habitants du Trièves semblent avoir remarqué ce que les autoroutiers
découvrent aujourd’hui ». De fait, Sinard est
devenu l’un des dix sites majeurs de l’archéologie préventive en France.
Les
sites explorés sont les suivants :
-
« Pingallas » (photo ci-dessus) : néolithique moyen
avec des vases de cette période. Il s’agit là du premier site du néolithique
moyen bien caractérisé en Trièves.
-
« Blanchette
Nord » : le site a révélé des vestiges du néolithique moyen et du
bronze final. Un surprenant alignement de 11 fours à usage domestique, de l’âge
du bronze, exemple unique dans les Alpes du nord, dont la destination, peut
être cultuelle, reste à peu près inconnue (de tels fours sont connus dans la
région lyonnaise et… en Polynésie !) et cromlech avec lambeau de sol néolithique
et lames de silex sur tout le pourtour. Sur une surface de
-
Blanchette
sud : site mésolithique et du bronze final. Sur un hectare, on a découvert
des vestiges de l’âge du bronze moyen et des trous de poteaux en négatif (300
trous), de la terre brûlée et une structure d’amorce de foyer. Les trous de
poteaux semblent correspondre à l’emprise d’au moins six maisons. Aucun site de
cette nature n’était jusqu’alors connu dans les Alpes.
-
Pied
Taillé : site du bronze final avec quelques éléments de l’âge du fer.
-
« la
Blanche » : présence de calages de poteaux du bronze final.
-
« les
Eménées » : site du néolithique final au
bronze final. Des fragments céramiques et des graines (fèves et pois) ont été
trouvées dans une petite fosse attestant d’une agriculture développée et
maîtrisée.
Les
fouilles ont été arrêtées au printemps 2004. Devaient alors intervenir des
analyses en laboratoire de divers vestiges avec datation au carbone 14. Les
rapports scientifiques qui auraient du en découler ne sont pas connus à ce
jour.
TREFFORT
-
Le
bassin du parc d’Herbelon passe pour avoir été taillé
dans un ancien mégalithe.
-
Le
7 juillet 1996 vers l’embarcadère de la Mira, au lieudit « Pré du Priou », par suite d’une variation brusque des eaux du
lac de Monteynard, une sépulture de l’époque de la Tène
a été fortuitement exhumée. Elle contenait, semble t-il, un mobilier funéraire
qui a été pillé avant d’avoir pu être étudié.
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Carte
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Présentation
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Le
« Dauphiné Libéré » des 22 décembre 2002, 31 mars 2003, 3 octobre
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C. MICHEL : fouilles archéologiques de Sinard,
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Rhône Alpes, SRA, bilan scientifique, 2001 (publié en 2004), pages 83 et 96
Voir
également dans le présent site Internet « carte archéologique de
l’Isère ».
(Clichés
JCM)