LES CHATEAUX DELPHINAUX DE LA VALLEE DE LA GRESSE

 

Dès le 11ème siècle, les Dauphins se rendirent possesseurs d’un certain nombre de châteaux incorporés alors au domaine delphinal et possédés en franc alleu, c'est-à-dire en pleine propriété, ou remis en fief à des seigneurs locaux. Au début du quatorzième siècle, ces châteaux delphinaux étaient au nombre de 120 pour le seul département actuel de l’Isère dont 12 pour la région qui nous intéresse ici : 6 dans le canton de Vif et également 6 dans le canton de Monestier de Clermont.

 

En 1337, Humbert II, Dauphin sans héritier (son fils le prince André vient de mourir) et accablé de dettes songe à aliéner une partie du Dauphiné et cherche des acquéreurs éventuels. Il s’adresse alors à Robert d’Anjou, roi de Sicile et Comte de Provence qui renonce très vite effrayé par les prétentions financières du Dauphin. Celui-ci se tourne alors vers le pape Benoît XII (la papauté est alors en Avignon) et entame dans le même temps des négociations de même nature avec le roi de France. Prudent, le pape suggère qu’on procède à une double évaluation, l’une étant faite par ses propres délégués et l’autre par ceux du Dauphin.

Le compte rendu de ces enquêtes est toujours disponible. Chaque château s’y trouve décrit, chaque localité recensée avec sa population et ses revenus. La copie en double exemplaire de l’enquête delphinale d’avril et mai 1339 dite « designatio castorum dalphinalium » et « feudates comitatus Graysivodani » est conservée aux archives départementales de l’Isère à Grenoble et celle des envoyés du pape conduits par Jean Cojordan, évêque d’Avignon, de mars 1339 est conservée aux archives du Vatican à Rome (volume 410 des Collectoria).

 

Benoît XII ayant rapidement compris que les prétentions d’Humbert II étaient exorbitantes devait mettre un terme définitif aux négociations en 1340 ; Restait le roi de France qui était preneur. Pour concrétiser le rattachement du Dauphiné à la France, trois traités furent nécessaires :

 

-       celui de Villeneuve les Avignon du 23 avril 1343,

-       celui du 7 juin 1344,

-       celui de février 1349 négocié à Tournon, conclu le 30 mars à Romans et enfin signé le 16 juillet à Lyon.

 

On peut y lire : « Nous, Humbert… après avoir obtenu enfin le consentement (de Philippe, roi de France et de Jean, duc de Normandie, son fils aîné) que nous avions expressément requis plusieurs fois et avec instance, dès maintenant nous cédons et transportons à Charles, fils aîné dudit duc à toujours, purement et simplement sans attendre aucun évènement d’aucune sorte notre Dauphiné… Nous le cédons pour être possédé en pleine propriété en sorte que les prélats, nobles et roturiers sont tenus tant que nous vivrons à l’hommage et révérence envers nous en tant qu’ancien Dauphin et ils doivent obéissance audit Charles en qualité de nouveau Dauphin revêtu de la dignité delphinale et investi de son administration nommément et effectivement… ».

C’est cet acte de vente pur et simple que l’on a pudiquement nommé « transport du Dauphiné à la France ». La transaction finale se fit pour 200 000 florins outre une rente annuelle de 24 000 livres dont Humbert II ne profita guère puisqu’il mourut en 1355. Il avait alors 42 ans.

 

            1ère partie : les châteaux delphinaux du canton de Vif

 

Ils sont au nombre de six. Le premier des châteaux qui nous intéressent ici est celui de CLAIX. Mentionné pour la première fois dans un acte du 18 des calendes de mai 1223, le château de Claix a sans doute une origine plus ancienne. Ce fut la demeure de la famille seigneuriale de Claix connue dès 1108. Elle passa en 1288 aux Alleman. Entré en 1296 dans les possessions delphinales c’est, de tous les châteaux recensés en 1339 celui dont la description est la plus complète. Elle comporte en effet neuf feuillets de parchemin. En voici la traduction littérale faite par l’abbé Edmond COFFIN :

 

« Le château est situé sur une roche près de la cité de Grenoble dans un lieu très fortifié et agréable et dans le donjon de celui-ci il y a une maison carrée contenant en hauteur, sans compter les fondements et les créneaux, 11 toises ½ (22,40 mètres) en longueur16 toises (31,18 mètres), en largeur 13 toises (25,33 mètres) et l’épaisseur des murs est de 4 pieds ½ (1,46 mètre). Dans cette maison il y a un plancher dont la moitié est en bois et l’autre est en pierre. Il y a une cave en pierre. Dans cette maison à la partie inférieure il y a une salle et une chambre qui constituent le rez de chaussée en longueur et la moitié en largeur et dans cette salle il y a une cheminée et une chapelle avec de fenestrages convenables. Dans le chambre il y a une cheminée qui mesure toute la hauteur de cette maisons et deux grandes fenêtres et le mur divisant en deux cette salle et cette chambre a une longueur de 4 toises ½ (8,77 mètres) une hauteur de 4 toises (7,80 mètres) et une épaisseur de 4 pouces (1,08 mètre).

Dans une autre partie de cette maison, en bas, est une cave qui égale la longueur de cette maison et la moitié de la largeur et à coté est un vestiaire et dans ce vestiaire il y a une grande fenêtre. Le mur divisant cette salle et cette chambre a une longueur de 14 toises ½ (28,26 mètres), une hauteur de 3 toises (5,84 mètres) et l’épaisseur des murs est de 4 pouces (1,08 mètre). Dans cette maison, au dessus, il y a une salle construite sur toute la longueur et dans cette salle i y a trois cheminées et sept fenêtres. Toutes les fenêtres de cette salle sont en pierre et contre le mur il y a une belle chapelle. Aux deux angles de cette maison il y a deux tours rondes dont on donne les mesures : hauteur 4 toises (7,80 mètres), circonférence 4 toises. Le mur est d’une épaisseur de 2 pieds (0,65 mètre).

Il y a une autre maison contiguë à cette demeure (les mesures ne sont pas données) et dans cette autre maison il y a deux vestiaires.

En dessous de ce château, il y a une autre maison avec un vestiaire contigu à cette maison du coté inférieur contenant en longueur 6 toises (11,70 mètres), en largeur 4 toises (7,80 mètres), en hauteur 5 toises (9,75 mètres) et dont le mur est épais de 2 pieds (0,65 mètre). Dans cette maison sont deux chambres et une cheminée. Depuis cette maison jusqu’aux deux chambres il y a un mur long de 10 toises (19,49 mètres), haut de 5 toises (9,75 mètres). Dans ce mur il y a une poterne.

A toutes ces choses évoquées ci-dessus est joint un « pellyum » contenant en longueur 6 toises (11,70 mètres), en largeur 4 toises (7,80 mètres), en hauteur 5 toises (9,75 mètres) et l’épaisseur des murs est de 4 pieds ½ (1,30 mètre). A ce « pellyum » touche une cuisine qui a en longueur 6 toises (11,70 mètres), en largeur 4 toises (7,80 mètres), en hauteur… (non précisé) et l’épaisseur des murs est de 3 pieds (0,97 mètre). A cette cuisine adhère une chambre avec une cheminée démolie et de cette chambre jusqu’à la roche il y a un mur contenant en longueur 16 toises ½ (32,15 mètres), en hauteur 4 toises ½ (8,77 mètres) et l’épaisseur des murs est de 3 pieds ½ (1,13 mètre). Dans ce mur il y a le portail du château et sur celui-ci il y a un petit toit couvert d’essendoles.

En dehors de ces édifices il y a un mur avec un glacis faisant le circuit de ce château sur une longueur de 81 toises (157,86 mètres). La hauteur de ce mur est de 3 toises ½ (6,82 mètres) et le mur a une épaisseur sur le glacis de 4 pieds (1,30 mètre). Dans celui-ci il y a une poterne.

Suit le burgus (bourg) et le village de ce château, clos et entouré de murs et de remparts d’une contenance en longueur jusqu’à l’angle de l’église de 140 toises (272,86 mètres), en hauteur de 4 toises (7,80 mètres) et d’une épaisseur de 3 pieds ½ (1,13 mètre). Dans ces remparts il y a trois portails en pierre taillée contenant… (les dimensions ne sont pas données).

Les revenus et la valeur de ce château consistent dans les choses suivantes :

 

-       en froment et en seigle : 40 setiers (2606 litres),

-       en avoine : 40 setiers (idem),

-       en épices : une livre de gingembre,

-       de poules : 17,

-       de poulets : 19,

-       deniers : 100 de bonne monnaie,  

-       pour le port de Claix : 40 florins,

-       la leyde (impôt sur toutes les denrées vendues au marché),

-       des gauchoirs et battoirs : 5 florins

-       les 3 moulins : 100 setiers de blé(651,6 litres).

 

De même consiste la valeur de ce qu’on perçoit de ce château en lods (droits d’enregistrement).

La récapitulation de tout ce qui précède est estimée à 400 florins.

Les propriétés de ce château sont :

 

-       un jardin situé sous le château contre la roche, estimé à 8 florins annuellement,

-       une grange touchant à ce jardin contenant 23 sétérées (86664 m2),

-       des prés et un étang contenant 6 sétérées 1/3 (23851 m2),

-       51 fossérées (16014 m2) de vigne et 1 sétérée (3768 m2) de terres estimées 50 florins annuellement,

-       un verger avec divers arbres, terres et forêts contigus qui entourent le château et contient 15 sétérées de terre (56520 m2), estimés 10 florins annuellement,

-       une pièce de près de 23 sétérées (86664 m2) avec une « serva » (vivier ou étang) qui entoure le bourg du château estimé 20 florins annuellement,

-       une autre pièce de près contenant 8 sétérées (30144 m2) située vers le port dont le revenu est estimé à 6 florins par an,

-       42 sétérées de terres (15,8 hectares) situées dans le territoire de Rochefort, estimées à 10 florins annuellement,

-       400 fosserées de vignes (12,5 hectares) situées en deux endroits dont l’estimation commune est de 25 florins de revenu annuel,

-       bois et forêts de la Combe contenant l’espace d’une lieue, estimées chaque année à 25 florins de revenus,

-       deux autres forêts dans le même mandement, à savoir la forêt de « Boneyres » et la forêt de « Fayn », estimées 15 florins annuellement,

-       trois autres forêts situées sur les rochers et quatre pièces de forêts situées dans la plaine sur la rive du Drac estimées 15 florins annuellement.

 

Dans ce mandement, dépendant de ce château, sont les paroisses et « villa » (villages) dans lesquelles sont les feux suivants :

 

-       paroisse de Claix, 13 hameaux faisant 180 feux (environ 900 habitants),

-       paroisse de Cossey, 4 hameaux faisant 42 feux (environ 210 habitants).

 

Les nobles habitant ce mandement (sont) :

 

-       le seigneur Boson de Porte Traine ayant une maison forte (l’actuel château d’Allières sur Varces),

-       Guigues d’Engins,

-       François Marchisi ayant une maison forte (Cossey ? la Grange aux Dames ?)

-       Pierre de Porte Traine,

-       Le chapitre de Grenoble ayant une maison forte (la Balme),

-       Amblard de Claix ayant une maison forte.

 

Le seigneur de Varces tient du seigneur de Valbonnais (de la famille Alleman) en hommage du château du Chastelard (aujourd’hui Fontagnieu sur Varces) avec les langues des bœufs (droit perçu à l’origine en nature puis en espèces par le préposé chargé de la boucherie), la boucherie de Varces, les bans de peu d’importance et les amendes de fausses mesures.

Jean des Aures de Varges est homme du seigneur de Balsanet et tient de lui sa maison forte de Varces.

Les mesures de sel de Vif et les amendes de fausses mesures sont tenues de ce seigneur de Valbonnais pour le plaid (droit d’enregistrement) de 12 deniers à chaque mutation de seigneur ou de propriétaire.

Lanthelme de Varces tient du seigneur de Valbonnais tous les biens, possessions, cens, services et usages qui existent dans le mandement et la paroisse de Varces, de Seyssel (« Saysselorum Villa », lieudit disparu de Saint Paul de Varces), de Saint Paul pour le plaid de 5 sous à chaque changement de propriétaire ».

 

Après le rattachement du Dauphiné à la France, le château servit de résidence aux châtelains delphinaux durant une longue période : Jean de Villars, Raymond de Theys, Hector de Cayllard, François de Saint André…

 

Dunois reçut ce château de Charles VII le 4 novembre 1421.

 

En 1530, la description qu’en donne Claude Narcie, notaire royal, indique que le château est ruiné.

 

Il ne reste aujourd’hui qu’environ la moitié de la façade principale de l’ancien château tournée vers l’est et la vallée du Drac. Les matériaux de construction qui subsistent sont la molasse, les galets et quelques briques pour les murs, le tuf pour les encadrements d’ouverture, les chaînes d’angle et la tourelle. Trois niveaux sont encore discernables. Le premier est percé d’une large ouverture garnie de coussièges, banquettes en molasse où l’on pouvait s’asseoir pour contempler le paysage et profiter de la lumière. Le départ d’un meneau divisant en hauteur cette ouverture est visible. La pièce était voûtée comme en témoignent les traces d’arrachement sur le mur interne, la voûte supportant un plancher ainsi que l’attestent les trous destinés à l’engagement des poutres. Au premier niveau, 3 fenêtres semblables à celles décrites précédemment sont visibles. La fenêtre la plus septentrionale, à moitié disparue, est dominée par un oculus orné d’un réseau d’arcatures. Il marquait l’axe de la pièce comme l’indiquent les traces d’arrachement du mur interne qui dessinent une voûte en berceau brisé englobant les fenêtres du premier niveau et l’oculus dans une seule et vaste pièce, sans doute la pièce principale du donjon.

Au sommet de l’angle sud du château est nichée une tour semi circulaire dans laquelle semble logé un escalier.

Les vestiges du château delphinal de Claix ne témoignent pas apparemment de transformations depuis le 14ème siècle, les autres constructions décrites en 1339, remparts, dépendances, ont par contre presque intégralement disparu.

 

Bibliographie sur le château de Claix :

 

-       B 4215, B 4361, B 4391,  B 4443 f° 95, B 4465 f° 39, B 4504, (ADI)

-       Archives du chapitre Notre Dame, n° 878

-       N. CHORIER : histoire générale du Dauphiné, 1, page 148 et  2, 1662, page 185

-       E. BONNEFOUS : ruines de Clais, l’Allobroge, 2ème année, 1842, pages 235 à 238

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 8626, 9188, 10175, 10405, 10543, 10849, 11175, 11330, 11504, 11549, 11691, 11934, 12220, 12778, 12903, 12949, 13303, 13495, 13642, 13779, 13954, 14081, 15471, 15490, 15556, 15640, 16130, 16410, 29576…

-       L. ROYER : un texte inédit de 1302 en langage de Grenoble (Claix), Revue de philologie française et de littérature, T XXXV, 1923  

-       H. ROCHAT : une tour mystérieuse, BSDEA, 1924, page 70

-       Dossier ROYER : BMG R 10292 (vers 1930)

-       J. C. MICHEL : une ruine méconnue, la tour de Claix, bulletin des AVG n° 14, 1984, pages 59 et 60

-       J. C. MICHEL : le château delphinal de Claix, Archéologie chez vous n°4, la vallée de la Gresse, 1985, pages 38 à 40

-       J. C. MICHEL : le château delphinal de Claix, Claix mon village n° 9, janvier 1985

-       J. C. MICHEL : la famille de Claix, 12ème, 15ème siècles, bulletin des AVG n° 29, 1992, pages 6 à 36

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, page 243

-       J. C. MICHEL : histoire de Claix, 2002, pages 90 à 103

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, pages 232 à 239

 

Le second château est celui du GUA.

 

Selon G. ALLARD il y eut une famille noble et ancienne du nom du Gua de laquelle il dit avoir vu des titres de l’an 1161.

Le château, berceau de cette famille, aujourd’hui totalement enseveli sous une épaisse végétation, se dressait à l’altitude de 880 mètres sur un mamelon qui paraît être une ancienne motte castrale, à coté du ruisseau de Jonier, non loin du village de Prélenfrey.

 

La famille du Gua semble avoir été propriétaire de la terre et du château jusqu’en 1309 époque où ils seraient définitivement passés dans la maison de Bérenger par suite de l’alliance de Catherine, fille de Rodolphe IV, seigneur du Gua, avec Pierre Bérenger, seigneur de Morges. Cependant, dès 1250, Raymond Bérenger aurait reçu le château (ou peut être seulement l’usufruit) par suite d’un échange avec le Dauphin contre la terre de Peyrins dans la Drôme. Quoiqu’il en soit, il parait établi qu’il était possession delphinale puisque l’on sait par un acte du 2 août 1288 qu’Humbert Dauphin et son épouse Anne vendirent alors à Rodolphe du Gua le château et son mandement.

 

L’enquête delphinale de 1339 indique seulement : « donjon carré entouré d’un mur fortifié dont est seigneur Rodolphe de Bérenger, chevalier. En dépendent la paroisse de Prélenfrey et parties de celles de Saint Barthélemy, le Désert (aujourd’hui Château Bernard) et le Genevrey Il y a 13 nobles résidents dont Humbert de Commiers, seigneur de Groin et 4 non résidents. Les revenus de ce château  sont de 300 florins d’or et ceux des dépendances de 312 florins. Dans le ressort du mandement habitent les enfants de Guigues de la Tour avec maison forte ».

Le château du Gua se composait vraisemblablement d’un donjon, de quelques salles basses en contrebas de celui-ci et d’une chapelle dédiée à Saint Nicolas, le tout entouré de murailles sur une longueur d’environ 110 mètres de périmètre.

 

Louis de Bérenger, seigneur du Gua, dit le « Brave Gua », favori sinon mignon du roi Henri III, combattit au siège de la Rochelle en 1573.

 

Lorsque Alexandre Bérenger du Gua, l’un des derniers descendants connus de la famille du Gua, dénombra en 1682 ses biens le château féodal était depuis longtemps totalement ruiné. L’abandon du château date du 16ème siècle, au profit de la gentilhommière de la Ferrière aux Saillants.

 

On peut encore aisément reconnaître sur le petit sommet boisé, l’emplacement de la tour, des remparts, de l’entrée principale et d’une poterne présumée près de laquelle subsiste un curieux socle en pierre taillée qui correspond peut être à une ancienne fontaine. Quant au replat situé en contrebas du château, c’était vraisemblablement une basse cour où se tenaient quelques masures protégées par un mur ou une palissade en bois.

 

Bibliographie pour le château du Gua :

 

-       B 4443, f° 69 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 29530, 29532, 29703, 29743 et 29773

-       G. de RIVOIRE DE LA BATIE : Armorial du Dauphiné, 1867, page 294

-       RENAUD : notes sur la commune du Gua, manuscrit BMG, 1887

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 29532, 29703, 29743, 29773

-       J. C. MICHEL : histoire du château du Gua et de ses seigneurs, le Bruyant n° 44, février 1983, pages 6 à 12

-       F. GAUTIER : Louis de Bérenger, seigneur du Gua, bulletin des AVG n° 16, décembre 1985, pages 6 à 8

-       J. C. MICHEL : château delphinal du Gua, Archéologie chez vous n°4, la vallée de la Gresse, 1985, page 40

-       Histoire des communes de l’Isère, 1988, page 386

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, pages 201 à 203

-       J. C. MICHEL : promenade au Gua, bulletin des AVG n° 52, décembre 2003, pages 63 à 65

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, pages 313 à 316

 

Le troisième château est celui de VARCES

 

Il est situé sur le rocher de la Tour, dit aussi « colline Saint Giraud », près de Porte Coche au nord de Varces. Le site est sauvage, isolé et commande un très vaste point de vue sur la vallée de la Gresse et Vif à l’ouest et sur la vallée de Saint Paul de Varces à l’est.

La terre de Varces appartenait à la maison du même dont les plus anciens membres connus sont Aynardi de Varces en 1075 et Athénulfe, seigneur de Varces, en 1096.

Le château lui-même apparaît dans l’histoire dès le 10 mai 1070, date où le Comte Guigues le Gras le donna à sa fiancée Agnès comme « dotalitium » (dot).

Le Dauphin Guigues VII acquit la propriété du château et du mandement en 1255 de Lanthelme Panerii, chevalier, pour le prix de 4000 sols viennois. Le 10 mai 1289 le Dauphin Humbert 1er ayant besoin de s’assurer les places fortes gardant la frontière savoyarde échangea la terre de Varces contre le château de Bellecombe en Grésivaudan qui appartenait alors à Aymeric de Briançon. Cette famille de Briançon devait ensuite conserver la propriété du mandement de Varces jusqu’en 1721.

Le château de Varces est décrit dans l’enquête de 1339 de manière assez sibylline : «établi sur une roche et entouré d’un mur de défense de 120 toises de longueur (233 mètres), de 3 toises ½ de hauteur (6,80 mètres) et de 3 pieds d’épaisseur (1 mètre). Tour carrée de 8 toises de hauteur (15,60 mètres), autre tour carrée près de la porte du donjon, chapelle avec deux autels de 5 toises de longueur sur 3 toises de largeur (9,70 mètres sur 5,85) auprès de laquelle se trouve une antique tour de 4 toises de hauteur (7,80 mètres) et de 20 toises de circonférence (39 mètres). Le château appartient aux enfants d’Aymon de Briançon, du fief du Dauphin. Y sont contenues cinq paroisses : Varces, Fontagnieu, Risset, Saint Giraud et Saint Paul. Il y a dix nobles résidents dont huit avec maison forte dont Alleman Chabert, Bosonet de Porte Traine, Jean des Aures, Thibaut du Vercors, Jean de la Tour, Guillaume de la Tour, Reynaud Vachon et quantité d’autres qui n’en ont pas. Il y a dix nobles non résidents. Les revenus annuels s’établissent à 500 florins d’or ».

Ce château, très important, couvrait une grande partie du rocher. Il était déjà détruit et en ruines au 17ème siècle lorsque Jean Baptiste de Briançon entreprit la construction du château actuel dans la plaine de Saint Paul.

 

Les plus beaux restes de rempart se trouvent à l’extrémité sud du château, au dessus de la fracture géologique de Porte Coche. La tour carrée située au sommet du relief, à 480 mètres d’altitude, constitue certainement la tour maîtresse du premier château fort. De ce donjon, il ne reste qu’un pan de mur élevé dominant la vallée de la Gresse et visible de très loin. Dans les ruines envahies par la végétation on discerne encore des bâtiments ruinés, une poterne et un escalier taillé dans le roc. E. TASSET a imaginé que la grande prairie située en contrebas de la tour avait pu servir de lice pour des tournois de chevaliers.

Ce château fut probablement l’une des plus anciennes et des plus belles places fortes du Dauphiné. 

 

Bibliographie pour le château de Varces :

 

-       B 4443, f° 5 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 2066, 29530, 29707, 29917

-       J. C. MICHEL : vieux châteaux, vieilles pierres, bulletin des AVG n° 10, 1982, pages 22 à 25

-       J. C. MICHEL : Saint Giraud à Varces, Archéologie chez vous n° 4, la vallée de la Gresse, 1985, pages 41 et 42 

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, pages 239 à 242

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, pages 607 à 609

-       O. BETTOU : Varces autrefois, son histoire, ses coutumes, bulletin des AVG n° 60, décembre 2007, pages 23 et 24 

 

Les trois derniers châteaux delphinaux sont ceux de VIF.

 

Le château de Vif, dit des Dauphins, était situé semble t-il dans le voisinage de l’église et du prieuré. Son origine n’est pas connue. Il est estimé valoir plus de 200 florins en 1339. Il fut commis à Guigues Falavelli par le Dauphin Humbert II le 29 juillet 1343. Il fut vraisemblablement détruit et démoli lors de la prise de Vif en 1573.

Au 17ème siècle une auberge existait à Vif portant l’enseigne « Au Dauphin », rappelant vraisemblablement le souvenir de l’ancien château delphinal.

 

Le château d’Uriol apparaît dans l’histoire le 10 mai 1070, date à laquelle le Comte Guigues le Gras l’apporta en dot à sa fiancée Agnès avec d’autres châteaux, dont celui de Varces (supra).

L’enquête delphinale de 1339 le décrit ainsi : «  au nord, donjon de 8 toises de hauteur (16 mètres) avec trois étages dont le sommet est « merleté » (garni de créneaux). Accolés à cette tour, écurie surmontée d’une chambre avec cheminée, grande salle haute de 4 toises (8 mètres), chambres et citerne. En contrebas, tour carrée de 2 étages de 6 toises (12 mètres) de hauteur avec toit couvert d’essendoles. A coté, chapelle sous le vocable de Saint Michel de 5 toises de longueur et 3 toises de largeur (10 mètres sur 6). Au sud, troisième tour dite la vieille tour. Vingtain de 135 mètres de longueur sur 42 mètres de largeur avec portail en pierres de taille. Est coseigneur Rodolphe Berenger du ressort du Dauphin. Les revenus du château s’élèvent à plus de 200 florins. En dépendent une maison commune et les paroisses de Vif, Genevrey, Chabottes et Uriol. On y dénombre 25 feux situés aux Mignots, aux Galberts, à Melosière et à Uriol.  Les nobles vassaux et feudataires résidents sont au nombre de 19 et les non résidents de 19 ».

Il n’y a malheureusement pas de localisation précise du château. Celle-ci pose du reste problème. Il n’a sans doute pas été élevé sur le rocher de Saint Loup car, hormis la plate forme sud ouest, il n’y a aucun endroit plat et H. MULLER, lors de ses fouilles, ne fait état d’aucun vestige médiéval.  Ainsi, la forteresse devait occuper l’essentiel de la plate forme située sous le rocher de Saint Loup, peut être à l’emplacement de la grosse construction existant aujourd’hui, à proximité de la seule source située en dessous du rocher. Uriol appartenait au début du 14ème siècle, en fief du Dauphin,  à Hugues Alleman, seigneur de Valbonnais et de Claix Progressivement abandonné à la fin du moyen âge, il n’existe en 1683 plus que « des vieilles masures couvertes de broussailles ». Il n’en reste aujourd’hui plus rien.

 

La Tour de Jean du Gua apparaît également comme possession delphinale en 1339. L’enquête des commissaires du Dauphin la décrit ainsi : « donjon carré entouré de hautes et épaisses murailles, grande salle avec une très belle cheminée, chambres, cellier et écurie. De larges fossés isolent ce château. Un pont de bois en permet l’accès. Enceinte d’un développement de 68 toises (135 mètres). A ce château appartiennent des vignes, deux vergers, des forêts avec garenne, une terre vers la Croix et des maisons, celle de la Bâtie, une autre à Vif et la maison forte commune avec le Dauphin. 27 feux en dépendent.  Le tout est estimé à 1500 florins ».

Il était vraisemblablement situé dans le quartier de la Valonne, actuelle avenue de la Tour.

 

Bibliographie pour les trois châteaux de Vif :

 

-       B 4443, f° 65, 80 et 81

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 2066, 29671, 29774

-       E. COFFIN : les enquêtes de 1339, bulletin des AVG n° 11, juin 1983, pages 39 à 45

-       J. C. MICHEL : le mont Saint Loup acropole vifoise, bulletin des AVG n° 14, décembre 1984, pages 6 à 12

-       J. C. MICHEL : oppidum de Saint Loup à Vif, Archéologie chez vous n° 4, la vallée de la Gresse, 1985, page 13

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, pages 628 à 630

-       Y. ARMAND et J. C. MICHEL : histoire de Vif, 2006, pages 64 à 68 

 

 

Les châteaux delphinaux du canton de Monestier de Clermont :

 

Comme pour le canton de Vif ils sont également au nombre de six.

 

1 – AVIGNONET

 

Le château d’Avignonet apparaît  dans l’histoire avec un acte du 2 décembre 1221 intervenu entre le comte de Savoie et le dauphin Guigues VI mentionnant, entre autres, le « château d’Avinio ». Puis, le 21 décembre 1261, Jarenton d’Avignonet reconnaît tenir ce château en fief du dauphin Guigues VII. Ce dernier confire en 1269 les biens que les hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem possédaient en Trièces et, notamment, ceux compris dans le mandement du château d’Avignonet.

Les mentions du château et de la châtellenie se multiplient au 14ème siècle. Ainsi :

 

-       en 1312, le châtelain delphinal est Alaman Chabert,

-       de 1313 à 1315, le châtelain est Chabert de Gières,

-       de 1315 à 1317, celui-ci est André de Vaulnaveys,

-       de 1318 à 1321, le châtelain est Villein Bérard,

-       de 1322 à 1326, celui-ci est Guigues Pelissier,

-       en 1329 , il s’agit de Josserand Conos,

-       de 1337 à 1340, on trouve Guy de Grollée.

 

L’enquête delphinale de 1339, souvent détaillée, passe malheureusement trop rapidement sur le château d’Avignonet et apporte peu d’information sur son architecture. Elle se borne à indiquer : « il y a au château une tour forte de 8 toises de hauteur (16 mètres), située au « haut du Mol » (comprendre : « le Mollard), 17 nobles feudataires résidents (Guillaume Ismidon avec maison forte – celle de Serre Chouillan – Pierre Ismidon, Reymond d’Avignonet, Reymond, Pierre et Jean Rivière, Humbert de la Sale avec maison forte, Pierre de la Tour, Hugues de Commiers, Guillaume Ricoz, Reymond Leuczon et Pierre Chevalier)  et 3 non résidents. Les revenus de ce château sont constitués de :

 

-       160 setiers de froment ( 1 setier = 65,16 litres),

-       65 setiers des censes des moulins,

-       15 setiers des censes de Guigues Alleman,

-       62 setiers d’avoine,

-       11 charges de vin,

-       43 poules,

-       5 livres de poivre,

-       1 obole d’or,

-       la taille générale pour 52 livres,

au total, 600 florins de revenus.

En dépendent les paroisses d’Avignonet, de la Cluse et de Paquiers ».

 

En 1340, Avignonet est rattaché à la Vicomté de Trièves, confiée à Aynard de Clermont et Pierre de Lucinge en est dédommagé par le château de Saint Michel en Faucigny.

La liste des châtelains s’interrompt à la fin du 15ème siècle ce qui laisse à penser que, dès cette époque, l’ancien château était ruiné.

 

Il était situé au lieudit actuel « le Château » dans une position dominant toute sa terre et faisait face au mandement de la Mure et à celui de la Motte dont il était séparé par une haute falaise et le Drac. Ses murs étaient constitués de gros galets qui ne peuvent être issus du socle de calcaire délité en surface tel qu’on peut le voir affleurer encore par endroits. On a donc du apporter les matériaux du lit du Drac ou des moraines proches. Il n’en subsiste plus de nos jours que quelques pierres et de très petits pans de murs parmi la végétation qui a envahi le site.

 

Bibliographie sur le château d’Avignonet :

 

-       B 2604, B 2968, B 3009,  B 3120, F° 16, B 3212, B 3329, B 4028, B 4408, F° 160 et 173 B 4443 F° 67 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 6617, 9799, 18604, 19064, 20082, 22132,  29669 et 30617

-       L. TERRAS : la vicomté de Trièves en vallée chevaleureuse, 1970, pages 346 à 349

-       Archéologie chez vous n° 4, la vallée de la Gresse, 1985, page 42

-       Dictionnaire des communes de l’Isère, 1988, page 219

-       R. REYMOND : mystères et curiosités de l’histoire, 1991, page 293

-       Patrimoine en Isère, Trièves, 1996, page 76

-       J. C. MICHEL : promenade historique en Trièves, bulletin des AVG n° 50, octobre 2002, pages 59 et 60. 

 

2 – Château Bernard :

 

D’origine inconnue, ce château semble avoir tiré son nom d’un seigneur local. En effet, la tradition en attribue la construction, vers le 12ème siècle, à un seigneur nommé Bernard, vassal du comte de Die qui aurait donné son nom à la localité. Mais, en fait de seigneurs attestés, on ne connaît guère que Guillaume de Royn et Guigues Sala, coseigneurs du lieu.

Au 13ème siècle, il fut intégré dans les possessions delphinales.

L’enquête de 1339 en donne la description suivante : «  donjon carré bordé de fossés profonds, au centre une tour carrée de 6 toise de hauteur (12 mètres). Revenus : 117 florins ».

 

De dimensions modestes, le château était défendu par des abrupts au nord, à l’est et à l’ouest et n’était accessible, de fait, que par le sud. Un donjon carré, entouré de quelques bâtiments enfermés dans une enceinte, constituait l’essentiel de la fortification.

Le château est cité pour la première fois dans un acte du 23 janvier 1302 (ou 1303) par lequel ¨Pierre Ysoardi rend hommage au dauphin Humbert (le premier du nom) pour les châteaux de Thoramme, de Gresse et pour la « maison » de Château Bernard.

En 1321, la seigneurie du château est attribuée à Isoard, seigneur d’Aix, par suite du traité intervenu entre lui et Henri, dauphin régent du Dauphiné.

Une nouvelle reconnaissance intervient le 23 septembre 1335, date à laquelle Arlaudi, seigneur d’Aix, rend hommage au dauphin Humbert pour « la maison et sala » (la « sala ou sale était, à l’époque franque la plus grande pièce d’une maison et le terme a perduré jusqu’au moyen âge) de Château Bernard.

Il ne demeure aujourd’hui de ce château (au lieudit « le Château » situé à 500 mètres du hameau de Mazetaire – aujourd’hui « Maseteyre » au sud de l’église -) que des ruines informes, au sommet de ce qui semble avoir pu être une motte castrale, un mur de 6 mètres de longueur et quelques ruines informes de la tour et des bâtiments annexes.

 

Bibliographie pour le château de Château Bernard :

 

-       B 4443, F° 72 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 16116 et 27646 et Regeste complémentaire n° 3153

-       J. C. MICHEL : note sur le château féodal de Château Bernard, bulletin des AVG n° 47, 2001, page 34

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005

 

3 – Gresse en Vecors :

 

Le château delphinal de Gresse s’élevait à l’emplacement de l’actuelle place Dr Cuynat. En 1302 (ou 1303), Pierre Isoardi fils de feu Guillaume Arthaudi, seigneurs d’Aix et de Gresse, descendant des comtes de Die, en rend hommage au dauphin Humbert 1er. En 1321, ce même Isoard reçoit d’Henri dauphin, régent du Dauphiné, la pleine et entière juridiction sur les habitants de Gresse. La reconnaissance de 1302 est réitérée en 1335 par Guillaume Arthaudi au profit du dauphin Humbert II. Le procès verbal de l’enquête delphinale de 1339 en donne la description suivante : « donjon carré clos de murailles mesurant 138 toises (276 mètres) de circonférence, tour carrée en pierres de taille de 7 toises de hauteur (14 mètres), 22 toises de tour (44 mètres), murs de 8 pieds d’épaisseur (2,50 mètres) et chapelle ». Il n’y a alors qu’une paroisse et aucun fief ni noble ni résidant. Il appartenait à cette époque à Guillaume Arthaud, du fief delphinal de la châtellenie de Clermont. Les maisons des habitants étaient enfermées dans une enceinte de murailles crénelées et s’étageaient au pied du château. Ce château figurait encore, avec ses trois tours d’angle sur le cadastre de 1828 avant d’être démoli en 1889.

 

En dépendait la Bâtie de Gresse, connue dès 1211 que le procès verbal de 1339 décrit ainsi : « située sur une éminence rocheuse avec dans le donjon une tour en bois très forte. Elle était située au lieudit « Serre Château ». Il y avait, en contrebas de celle-ci un petit bourg castral.

 

Bibliographie pour le château et la Bâtie de Gresse :

 

-       B 4443, f° 79

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 16116, 27646 et Regeste complémentaire n° 3153

-       L. TERRAS : la baronnie de Gresse en vallée chevaleureuse, 1971

-       G. MARTIN : Gresse en Vercors du passé à l’avenir, 1986, page 31

-       J. C. MICHEL : aux sources de la vallée de la Gresse, bulletin des AVG n° 26, 1990, page 26 

-       Patrimoine en Isère, Trièves, 1996, page 74

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, page 680 

 

4 – Miribel Lanchâtre :

 

La famille de Miribel est connue de haute origine puisqu’on relève, vers 1095, un Humbertus de Miribello. Le site castral de Miribel que l’on peut atteindre d’Essart Garin, des Côtes de Pommard ou de Cassoulet est situé sur un promontoire étroit orienté est ouest que contourne un ancien chemin et qui domine la Gresse à l’est. L’installation d’un premier castrum, sans doute dès l’an Mil, a nécessité d’importants terrassements, ménageant des replats et des abrupts chemisés de pierre. Protégé de trois cotés par d’abruptes pentes naturelles, doublées qui plus est d’un rempart en pierre dont subsistent de notables vestiges, le château se développait à la fois sur la plate forme sommitale du promontoire ainsi que sur plusieurs terrasses aménagées en contrebas. L’accès au château se faisait par l’ouest, point faible de la défense puisqu’en contrebas de la pente, ce qui avait nécessité divers aménagements et, notamment, l’établissement d’un pont levis sur un fossé profond et l’édification d’une tour forte fortifiée. L’ensemble était enserré dans un rempart de plus de 100 mètres de longueur sur 6 mètres d’élévation et de nombreux bâtiments, séparés les uns des autres, coexistaient en raison de la co seigneurie dans laquelle était tenue la terre de Miribel.

Par un acte du 2 décembre 1221, le dauphin restitue à Humbert de Miribel sa part du château delphinal, ce qui montre qu’il était précédemment devenu delphinal.

Le procès verbal de 1339 en donne la relation suivante : « dans une situation très forte, donjon carré avec une tour de 9 toises (18 mètres) de hauteur sur 4 toises (8 mètres) de largeur. Un autre château non loin avec une autre tour carrée. Nobles : Pierre, Lanthelme et Didier de Miribel, Guillaume Chaunais et Guigues d’Oriol. En dépendent les paroisses de Lanchâtre et de Saint Barthélemy. Revenus 200 florins ».

En 1450, le château appartenait à François de Miribel, alors vassal du vicomte de Clermont. En 1732 il est toujours habité par la famille de Miribel mais en 1789 il était déjà en ruines.

Il subsiste aujourd’hui de cet ensemble considérable des murs de soutènement importants en gros appareil irrégulier dans la pente sud. Puis, en avancée du promontoire, une plate forme ovalaire bien caractérisée forme basse cour en contrebas des bâtiments castraux qui occupaient la partie la plus élevée du site au sommet duquel subsistent toujours de notable vestiges du donjon quadrangulaire et, notamment, un pan de mur parementé en petit appareil conservé sur plus de 5 mètres de hauteur. Enfin, vers l’entrée du château, se distinguent encore des restes de la porte fortifiée. Le second château, incendié à la révolution, a été en grande partie reconstruit à usage de ferme avec les matériaux subsistants et, très vraisemblablement, avec tout ce qui était  récupérable de l’ancien château delphinal.

 

Bibliographie pour le château de Miribel :

 

-       B 4443 f° 74

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 10113 et 27646

-       L. TERRAS : la baronnie de Gresse en vallée chevaleureuse, 1971, pages 233 à 237

-       Archéologie chez vous, n° 4, la vallée de la Gresse, 1985, notice 177, pages 42 et 43

-       J. C. MICHEL : en remontant le cours de la Gresse, bulletin des AVG n° 16, 1985, page 9

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, page 204

-       Patrimoine en Isère, Trièves, 1997, pages 73 et 74

-       J. C. MICHEL : les châteaux de Miribel, bulletin des AVG n° 45, 2000, pages 16 et 17 

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, page 685

 

5 – Monestier de Clermont :

 

Ce château dont l’origine n’est pas connue (motte castrale ?), cité pour la première fois dans un acte du 18 juin 1269, est ainsi décrit dans l’enquête delphinale de 1339 : «  château et forteresse avec grosse tour ronde de 40 mètres de circonférence, haute de 16 mètres, tour carrée d’une hauteur de 8 toises (16 mètres) et porte de grande élévation. Muraille de 240 mètres de longueur, haute de 4 mètres. 27 nobles feudataires résidents dont 3 ont maison forte et 17 non résidents. Du château dépendent les paroisses de Saint Pierre du Monestier, de Saint Paul et la montagne du Lautaret, les châteaux et mandements de Gresse, Touchane et Saint Guillaume. Revenus, 604 florins et bois de vastes dimensions valant 10 000 florins ».

 

En 1340, la seigneurie de Clermont est transformée en vicomté. En effet, le dauphin Humbert II souhaitant récompenser Aynard de Clermont, seigneur du lieu, le crée vicomte de Clermont en Trièves auquel il ajoute Roissard puis Avignonet. Il le continue également capitaine de guerre et grand maître de l’hôtel du dauphin ; à ce titre, il aura le pas sur tous les autres officiers et dans les grandes festivités lui seront acquis deux plateaux et quatre assiettes d’argent avec lesquels il servira le prince. Le 13 juin 1340, il est investi, selon la tradition, d’un anneau pour ses fiefs, d’une épée pour la vicomté, d’un pennon à quatre queues aux armes du dauphin fixé à la pointe d’une lance pour la capitainerie et pour la grande maîtrise d’une verge blanche.

 

En 1495, Louis, vicomte de Clermont, prête hommage au dauphin, futur Charles VII, pour ce château.

 

Divers châtelains du mandement sont connus :

 

-       Guigues Bérenger de Morges de 1312 à 1314,

-       Guigues de Villaret en 1317,

-       François de Theys en 1322,

-       Jean Filliasse de 1324 à 1326,

-       Josserand de Corps de 1327 à 1330,

-       Thiset en 1331,

-       Pierre de Loyes en 1335,

-       Bemond d’Herbeys en 1336,

-       Andrevet Gaudichon en 1337,

-       Guy de Grolée de 1338 à 1340 ;

 

Pour ce qui concerne la vicomté, on connaît aussi plusieurs châtelains :

 

-       Guillaume de Chypre en 1340,

-       André Rolland en 1342,

-       Girard de Jouven en 1430,

-       André de Blosset en 1445… 

 

Le château fut démantelé par Lesdiguières. En subsistent aujourd’hui dans la forêt les bases de la tour et des vestiges encore importants des trois enceintes.

 

Bibliographie pour le château de Clermont :

 

-       B 3120 f° 75, B 4443 f° 55 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 6975

-       L. TERRAS : la vicomté de Trièves en vallée chevaleureuse, 1970, pages 31 à 33, 40, 41, 46, 47 et 65

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, pages 209 et 210

-       J. C. MICHEL : en remontant le cours de la Gresse, Monestier de Clermont, bulletin des AVG n° 22, 1988, page 20

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, page 685 

 

 

6 – Saint Guillaume :

 

Le château de Touchanc, Toschane ou Touchane a été édifié à une date non connue mais sans doute ancienne si l’on en juge par l’emplacement présumé d’une motte castrale préalablement au château proprement dit dont la première mention apparaît le 14 mai 1118 dans une bulle du pape Eugène III adressée au prévôt d’Oulx et lui confirmant la possession de l’église de Saint Guillaume et de la « capella castri quod dictur Toscana ».

 

Le 22 avril 1302, Pierre Isoard, seigneur de Touchane, se reconnaît vassal du dauphin Humbert 1er. En 1305, le seigneur (ou coseigneur) est Guillaume Artaud d’Aix.

L’enquête delphinale de 1339 en donne la description suivante : « campé sur un roc élevé, son donjon est entouré d’un mur de vingtain de 210 toises (420 mètres) de développement. Tour de 8 toises (16 mètres) de hauteur dont les murs ont 6 pieds (1,92 m) d’épaisseur. Autre tour carrée de 9 toises (18 mètres) de hauteur. Attenant à la première tour (contenant un escalier ?), bâtiment rectangulaire de 4 toises sur 2 (8 mètres sur 4), haut de 5 toises (10 mètres) abritant deux salles superposées et pourvues d’une cheminée. En avant de cette même tour, une petite cour fermée par un mur de 22 toises (44 mètres) de développement. En dessous de cette tour, une maison forte facile à défendre. En dépendent les paroisses de Saint Guillaume et de Saint Andéol. Nobles résidents : Rodolphe de Commiers, Rayn de la Salle, Albert du Toyn ayant maison forte. Revenus : 297 florins ».

 

Vers 1390, les coseigneurs de Touchane sont Antoine de Commiers, Guigues et Gérard Ricoz et Soffrey d’Arces.

En 1497, le seigneur de Touchane est Antoine d’Ambel.

On ne sait de quand date l’abandon du château au profit d’un nouvel édifice dans le village même de Saint Guillaume. Peut-être faut il placer cet évènement au 16ème siècle et l’imputer à un membre de la famille Ricoz ?

Les seigneurs du mandement gardèrent toutefois jusqu’à la révolution le titre de seigneurs de Touchane.

A 790 mètres d’altitude, le site du château occupe l’emplacement d’un véritable nid d’aigle au sommet d’un éperon rocheux dominant par un abrupt le lit de la Gresse.

Même s’il est difficile de se représenter aujourd’hui la place forte dans son état d’origine, tant elle a été ruinée par l’abandon, on peut encore observer des traces de la cour, du donjon, de l’aula et de la seconde tour carrée, 50 mètres au sud de la plate forme sommitale, juste avant l’escarpement ainsi que des restes de la porte fortifiée et de sa barbacane.

 

Bibliographie pour le château de Saint Guillaume :

 

-       B 4443 f° 75 (ADI)

-       U. CHEVALLIER : Regeste Dauphinois, 1913, n° 3817, 16444

-       L. TERRAS : la baronnie de Gresse en vallée chevaleureuse, 1971, pages 14 et 71

-       Archéologie chez vous, n° 4, la vallée de la Gresse, 1985, notice n° 178 page 43

-       J. C. MICHEL : en remontant le cours de la vallée de la Gresse, Saint Guillaume, bulletin des AVG n° 17, 1986, page 40

-       E. TASSET : l’Isère des châteaux forts, 1995, pages 205 à 208 

-       J. C. MICHEL : témoin oublié de la féodalité, Touchane en Trièves, bulletin des AVG n° 37, 1996, pages 33 à 37

-       Patrimoine en Isère, 1997, page 74

-       E. TASSET : châteaux forts de l’Isère, 2005, page 698