H A N N I B A L

 

Comparaison des textes de Polybe et de Tite Live 

 

POLYBE (Livre III, écrit peu après son voyage de 150 avant notre ère dans les Alpes, soit près de 70 ans après les faits).

 

Avant l’Ile :

 

36-2 : « Il faudra dire non pas les noms mêmes des lieux, des fleuves et des villes comme le font quelques historiens qui s’imaginent que cette pratique est complètement suffisante pour donner des choses une connaissance claire ».

 

36-5 : « Ainsi faudrait-il présenter une méthode par laquelle il serait possible à ceux qui parlent des choses inconnues de conduire, dans une certaine mesure, les lecteurs vers des notions véridiques et bien connues ».

 

36-6 : « la première et la plus importante de ces notions, celle qui au surplus est commune à tous les hommes, c’est la disposition et la division de l’espace, division que nous connaissons tous, même les plus simples esprits : orient, couchant, midi, nord ».

 

Sur les distances :

 

39-6 : « de la nouvelle Carthage à l’Ebre : 2600 stades »

39-7 : « de l’Ebre à l’Emporion » : 1600 stades »

39-8 : « d’Emporion à Narbonne : environ 600 stades et de Narbonne au Rhône, environ 1000 stades »

39-9 : « du passage du Rhône, quand on marche en suivant le fleuve vers ses sources jusqu’au versant des Alpes tourné vers l’Italie : 1400 stades ».

39-10 : « le reste des pentes : environ 1200 stades… Après avoir passé ces pentes on doit parvenir en Italie dans les plaines du Pô ».

 

42-1 : « parvenu aux abords du fleuve, il se mit en mesure d’en faire la traversée à l’endroit où il n’a qu’un lit, environ à quatre jours de marche de la mer pour une armée ».

 

42-6,7,9 : « la troisième nuit étant venue il fait sortir une partie de son armée en lui donnant pour guides des indigènes et pour chef Hannon, fils de Sufète Bomilcar. Ceux-ci après avoir marché le long du fleuve en remontant son cours jusqu’à 200 stades arrivèrent en un endroit où le fleuve se trouvait divisé en deux bras qui entouraient une petite île et ils s’y arrêtèrent… Ils occupèrent une forte position ».

 

47-1 : « quand les animaux eurent été transportés, Hannibal prenant les éléphants et les cavaliers les plaça à l’arrière garde et s’avança le long du fleuve, de la mer vers l’Orient comme s’il faisait route vers le centre de l’Europe ».

 

47-2 : « il coule (le Rhône) vers le sud ouest… à travers une vallée bordée au midi sur toute sa longueur par les versants des Alpes inclinés vers le nord ».

 

 

I – De l’Ile aux Alpes :

 

 

POLYBE

 

49-5 : « Ensuite, Hannibal ayant marché quatre jours à partir du passage (du Rhône), (grâce à une marche ininterrompue de quatre jours) arriva à un endroit appelé l’Ile (« Nèsos »), région très peuplée et fertile en blé qui tire son nom de sa situation. Le fleuve (« potamos ») et le Skaras (ou Skoras) l’embrasant de part et d’autre coulent, chacun, le long d’un coté et l’aiguisent en forme de pointe à leur confluent.

49-7 : « Elle ressemble assez, pour la grandeur et pour la forme à ce que l'on nomme le delta d'Egypte, à cette différence près que, là bas, c'est la mer qui forme un des cotés et réunit le cours des fleuves, au lieu qu'ici ce sont des montagnes difficiles à approcher et à parcourir et pour ainsi dire inabordables (inaccessibles pour dire le mot) ».

 

Arrivé à cette île, Hannibal trouva deux frères qui s’y disputaient la royauté et qui étaient en présence chacun avec une armée. Sollicité par l’aîné qui réclamait son concours pour s’assurer le pouvoir, il se laissa persuader ; il voyait clairement les bénéfices immédiats qu’il tirerait de lui. Il l’accueillit donc, l’aida à chasser le cadet et obtint de lui grande assistance. Ce n’est pas seulement de blé et d’autres vivres que le vainqueur approvisionna abondamment l’armée : il remit son armement à neuf en changeant les armes usées ainsi que tous les objets usés et, fort à propos, remit en état toute l’armée ; à la plupart des hommes il distribua vêtements et chaussures qui leur furent de grande utilité pour la traversée des montagnes. Mais voici le principal : les soldats avaient quelque inquiétude au sujet de leur route à travers les Gaulois nommés Allobroges ; il fit arrière-garde avec ses propres troupes et leur procura ainsi un voyage sûr jusqu’aux approches de la montée des Alpes ».

 

 

TITE LIVE (Histoire Romaine, Livre XXI, chapitres 31 et suivants écrits sous le règne d’Auguste soit plus de deux siècles après les évènements)

 

CHAPITRE 31 : « Le lendemain il remonte le cours du Rhône et gagne le milieu des terres : non que ce chemin lui parût le plus direct pour atteindre les Alpes mais dans l’idée que, plus il s’éloignerait de la mer, moins il risquerait de rencontrer les Romains avec lesquels il ne voulait livrer bataille qu’une fois en Italie. En quatre jours il parvint à l’Ile. C’est l’endroit ou l’Arar (ou Ibi Sarar) et le Rhône, venus de deux points opposés des Alpes, se réunissent après avoir été séparés quelque temps par une étroite langue de terre. Cet espace, enclavé ainsi entre les deux fleuves, a été nommé l’Ile. Près de là sont les Allobroges qui, dès ce temps là, ne le cédaient en puissance, en renommée, à aucun peuple de la Gaule. Ils étaient alors divisés par la lutte de deux frères qui se disputaient la couronne. L’aîné, Brancus, qui avait régné d’abord, avait été chassé du trône par son frère cadet et les jeunes gens du pays qui, à défaut de bon droit, avaient pour eux la force. Hannibal, fort à propos pour lui, fut prié de trancher la question. Arbitre entre les deux prétendants, il rendit le trône à l’aîné selon le vœu du Sénat et des grands. En récompense de ce service les Carthaginois reçurent des vivres et des provisions de toute sorte et surtout des vêtements que le froid proverbial des Alpes rendait indispensables. Les dissensions des Allobroges apaisées, Hannibal, pour atteindre les Alpes, ne prit pas la ligne droite, il s’orienta à gauche (« ad laevam ») vers le pays des Tricastins ; puis, suivant la lisière du pays des Voconces il arriva sur le territoire des Tricores sans rencontrer d’obstacle jusqu’à la Druentia.

 

Cette rivière qui descend aussi des Alpes est, de toutes celles de la Gaule, la plus difficile de beaucoup à traverser puisque, malgré le volume de ses eaux, elle ne porte pas de barques. En effet, n’ayant pas de rives qui la contiennent, elle se répand en vingt courants toujours nouveaux et forme partout des gués et des tourbillons qui rendent le passage incertain, même pour les piétons. En outre, roulant des roches pleines de gravier elle n’offre aucun passage solide ni sur. Elle se trouvait alors grossie par les pluies, ce qui rendit le passage plus tumultueux encore car les soldats, indépendamment des autres dangers,, se troublaient eux mêmes par leur propre effroi et par leurs cris confus ».

 

 

 

 

II – la montée des Alpes :

 

a)    le premier combat

 

 

POLYBE :

 

50-1 : « Hannibal ayant parcouru en dix jours huit cents stades (148 km) le long du fleuve commença à gravir les Alpes(« anabolè ») ; là il lui arriva de courir de grands dangers.

 

Tant qu’il fut dans le plat pays, les petits chefs Allobroges se continrent ; ils redoutaient ou la cavalerie ou les barbares de l’escorte. Mais lorsque ceux ci furent retournés dans leur pays et que les troupes d’Hannibal commencèrent à s’engager dans les terrains difficiles, les chefs Allobroges concentrèrent des forces suffisantes et occupèrent les positions favorables, celles par lesquelles, de toute nécessité, Hannibal était obligé de faire son ascension. S’ils avaient caché leur dessein ils auraient complètement anéanti l’armée carthaginoise ; même en se laissant voir ils causèrent de grands dommages à Hannibal, mais ils n’en subirent pas de moindres eux mêmes ».

50-5 : « Le général carthaginois, sachant être devancé par les barbares sur les positions favorables, établit son camp et s’arrêta au pied de la montée ».

50-6 : « il envoya quelques uns de ses guides gaulois avec mission de reconnaître à fond les projets et les dispositions de ses adversaires. Ses ordres exécutés, il apprit que, pendant le jour, les ennemis occupaient et gardaient le terrain avec soin mais que, la nuit, ils se retiraient dans une ville voisine. Tablant sur ces données il combina son plan d’action ainsi qu’il suit : il porta ostensiblement son armée en avant et, près des défilés, non loin de l’ennemi, il établit son camp. La nuit venue il alluma des lignes de feux et, laissant dans le camp la plus grande partie de ses forces, il fit équiper à la légère les troupes d’élite, traversa les gorges pendant la nuit et occupa les positions abandonnées par l’ennemi ; car, suivant leur habitude, les barbares étaient retournés à la ville. Cela fait, le jour reparu, les barbares, voyant ce qui était arrivé, s’abstinrent d’abord d’attaquer. Puis, quand ils aperçurent le gros des bêtes de charges et les cavaliers péniblement attardés en longue file dans les terrains difficiles ils se décidèrent, profitant de l’occasion, à tomber sur la colonne. C’est ce qu’ils firent et des partis nombreux des barbares attaquèrent ; l’ennemi et aussi le terrain causèrent aux Carthaginois des pertes nombreuses, surtout en chevaux et en bêtes de charge. En effet, le sentier était étroit, raide et même escarpé ; toute agitation, tout désordre faisait rouler au fond des précipices nombre de bêtes de charge avec leurs fardeaux ; ce trouble était occasionné principalement par les chevaux blessés ; car ceux de la tête se rejetaient sur les bêtes de charge afin d’échapper aux coups, ceux de la queue bourraient en avant et précipitaient dans l’abîme tout ce qui était tombé ; ils causèrent un grand désordre. A cette vue Hannibal se disant que, même sorti du péril, il n’aurait plus aucune chance de salut si son convoi était détruit, prit les troupes qui avaient, de nuit, occupé les cols et se porta rapidement au secours de la colonne.

 

Son intervention causa des pertes importantes aux ennemis, car il avait pris par les hauteurs, et non des moins sensibles à ses propres troupes. Des deux cotés, dans la colonne, le trouble était augmenté par les clameurs et l’enchevêtrement dont nous avons parlé.

 

Hannibal après avoir tué beaucoup d’Allobroges, contraignit les autres à faire demi tour et s’enfuir dans leurs demeures ; alors la masse des bêtes et de la cavalerie qui s’était trouvée coupée acheva seulement et à grand peine de se dégager ».

 

 

TITE LIVE :

 

« la Druentia passée, Hannibal parvint aux Alpes, marchant presque toujours en plaine et nullement inquiété par les Gaulois qui habitaient ce pays. En présence des Alpes, bien que les esprits fussent déjà prévenus par la renommée qui exagère toujours les proportions de l’inconnu, quand on vit de près la hauteur de ces montagnes, les neiges qui se confondaient avec le ciel, de misérables huttes suspendues aux rochers, le bétail et les chevaux engourdis par le froid, des hommes sauvages et velus, tous les êtres, animés et inanimés, hérissés de givre et de glace, enfin tout un tableau plus hideux à voir qu’à dépeindre, l’armée sentit renaître son effroi.

 

A peine essaye t-elle de gravir les premières pentes qu’apparaissent des montagnards postés sur les hauteurs. S’ils s’étaient cachés dans des vallées couvertes pour fondre à l’improviste sur les Carthaginois, c’eut été une immense déroute et un immense carnage. Hannibal fait halte aussitôt et envoie des Gaulois reconnaître les lieux. Apprenant que le passage est impossible sur ce point il installe son camp au milieu des rochers et des précipices dans la vallée la plus étendue qu’il peut trouver. Grâce encore à ces Gaulois dont la langue et les mœurs diffèrent peu de celles des montagnards et qui ont pu se mêler à leurs entretiens, il apprend que le défilé est gardé le jour seulement et que, la nuit, chacun retourne dans sa cabane ; de grand matin il s’avance au pied des hauteurs comme s’il voulait profiter de la journée pour se frayer par force et ouvertement un passage. L e jour est ainsi employé à simuler un projet qui trompe sur le véritable et l’on se retranche dans le lieu où l’on s’est arrêté. Dès qu’il aperçoit que les montagnards ont quitté les hauteurs et que les postes ne sont plus gardés, Hannibal fait allumer un grand nombre de feux pour faire croire à la présence en ce lieu de bien plus d’hommes qu’il va en rester. Laissant en effet les bagages, la cavalerie et la plus grande partie de l’infanterie, il part avec un corps de troupes légères formé de ses plus vaillants soldats, franchit à la hâte les défilés et vient s’établir sur les hauteurs que l’ennemi avait occupées.

 

Au point du jour on lève le camp et le reste de l’armée se met en marche. Déjà les montagnards, au signal donné, couraient de leurs forts aux postes accoutumés quand, tout à coup, au dessus de leurs têtes, ils voient des Carthaginois maîtres des rochers qu’ils occupaient eux mêmes la veille ; en même temps les autres progressent par le chemin frayé.

 

Ce double spectacle, qui frappe leurs yeux et leurs esprits, les tient quelque temps immobiles ; mais bientôt ils remarquent l’embarras des troupes dans ce défilé, le désordre qui résulte de la confusion générale et surtout l’épouvante des chevaux ; ils se disent qu’il suffit du moindre surcroît de terreur pour que c’en soit fait de l’ennemi. Ils s’élancent donc, de rochers en rochers, accoutumés qu’ils sont aux pentes les plus difficiles et les plus escarpées. Les Carthaginois sont ainsi arrêtés, et par l’ennemi et par les difficultés du terrain. Il leu faut même soutenir une lutte plus vive contre leurs compagnons que contre les montagnes, chacun voulant échapper le premier au péril. Les chevaux surtout rendaient la marche difficile. Epouvantés des cris confus que rendait plus terrible encore l’écho des bois et des vallées, ils se cabraient et s’ils venaient à être frappés ou blessés, rien ne les retenait plus ; ils renversaient de tous cotés les hommes et les bagages. Comme le défilé était bordé de pentes abruptes, plusieurs hommes furent jetés au fond de l’abîme avec leurs armes ; quand les chevaux y tombaient avec leur charge on eût dit qu’une montagne s’écroulait. C’était un affreux spectacle et pourtant Hannibal resta quelque temps immobile avec son détachement, de peur d’ajouter encore à la confusion et au tumulte. Mais quand il vit que ses troupes étaient coupées, qu’il allait perdre les bagages, question de vie ou de mort pour son armée, il s’élança des hauteurs où il était et tomba sur l’ennemi qu’il culbuta, non sans causer un nouveau désordre parmi les siens. Toutefois, ce trouble fut apaisé en un instant dès qu’on vit le chemin dégagé par la fuite des montagnards. Tous défilèrent aussitôt tranquillement et presque en silence ».

 

 

 

 

b) le repos :

 

POLYBE :

 

Hannibal avec tout ce qu’il put réunir de troupes échappées à ce péril marcha vers la ville d’où les ennemis avaient fait irruption et la trouva presque vide à cause de l’unanimité avec laquelle les ennemis s’étaient portés au butin ; il s’en empara et y trouva bien des commodités pour le présent et pour l’avenir. Pour le présent il recueillit quantité de chevaux et de bêtes de charge avec leurs conducteurs ; pour l’avenir, il s’assura une provision de pain et de vivres pour deux ou trois jours ; en outre, il se fit craindre des voisins, de sorte que personne  n’osa l’ attaquer parmi les peuples à travers desquels il fit son ascension ».

 

52-2 : « Hannibal établit son camp dans la ville et, après s’être arrêté un seul jour, il repartit. Les jours suivants la marche de l’armée fut paisible mais le quatrième elle tomba de nouveau dans de grands dangers ».

 

 

TITE LIVE :

 

« Hannibal occupa ensuite un oppidum qui dominait cette contrée et toutes les bourgades environnantes ; avec le blé et le bétail qu’il y prit, il nourrit son armée pendant trois jours. Comme ni les montagnards, consternés tout d’abord par cette défaite, ni les lieux mêmes n’opposaient de grands obstacles, on fit un assez long chemin pendant ces trois jours ».

 

 

c) le piège :

 

 

POLYBE :

 

« les habitants de ce pays ayant concerté un piège vinrent au devant d’Hannibal avec des branches d’arbres et des couronnes ce qui, chez tous les barbares, est un symbole d’amitié comme la caducée chez les Grecs.

 

Hannibal, disposé à la circonspection par une telle confiance, s’enquit soigneusement de leurs intentions et de l’ensemble de leurs projets. Ils dirent avoir été suffisamment renseignés sur la ville qu’il avait prise et sur le désastre de ceux qui avaient essayé de lui nuire ; ils assurèrent être venus déterminés à n’entreprendre, comme à ne subir, aucune hostilité et offrirent de donner des otages. Hannibal, après avoir réfléchi longuement, se fia à leur parole ; il se disait qu’en accueillant leurs avances il augmenterait peut être leur bienveillance et leurs sympathies, tandis qu’en les repoussant il s’en ferait des ennemis déclarés. Il reçut donc leurs promesses et se décida à faire amitié avec eux. Les barbares, après avoir donné des otages, amenèrent des vivres à foison et s’abandonnèrent entre ses mains complètement et sans réserve ; ils inspirèrent une telle confiance à l’état major d’Hannibal qu’ils servirent ultérieurement de guides dans les endroits difficiles.

 

Pendant qu’ils marchent en tête deux jours durant, les autres se réunissent, suivent la colonne et la surprennent dans la traversée d’une vallée difficile et bordée de rochers ».

53-1 : « En cette affaire, Hannibal aurait péri avec toute son armée s’il n’avait pris de grandes précautions contre une attaque et s’il n’avait eu la prévoyance de placer les bagages et la cavalerie en tête et l’infanterie en queue. Celle ci, en maintenant ses positions, réussit à atténuer les pertes et arrêter l’élan des barbares. Malgré ce succès nombre d’hommes, de bêtes de charge et de chevaux périrent ».

 

 

TITE LIVE :

 

« On arriva ensuite chez une peuplade fort nombreuse pour un pays de montagne. Hannibal faillit y périr, non dans une guerre ouverte, mais par ses propres armes, par la perfidie et les embûches. Une ambassade des chefs les plus âgés se rend près de lui. Rappelant que le malheur des autres leur a été une utile leçon, ils aiment mieux éprouver l’amitié que la force des Carthaginois, ainsi obéiront-ils à tous les ordres ; ils offrent des vivres, des guides, des otages garants de leurs promesses. Hannibal, sans les croire aveuglément, sans les repousser non plus, de crainte de s’en faire des ennemis déclarés, leur répond d’un ton bienveillant. Il accepte les otages qu’ils offraient, use des vivres qu’on a déposés sur la route, suit leurs guides, mais sans permettre à son armée de marcher en désordre, comme on le fait en pays ami. Au premier rang marchaient les éléphants et les chevaux ; il conduisit l’arrière-garde avec l’élite de l’infanterie, promenant de tous cotés des regards inquiets. On était entré dans un chemin étroit, dominé d’un coté par la cime d’une montagne ; tout à coup, les barbares sortent de leur embuscade ; surgissant devant, derrière, de près, de loin, ils harcèlent les Carthaginois et font rouler sur eux d’énormes blocs de rochers. C’est sur les derrières que l’attaque fut la plus violente. Mais l’infanterie fit volte-face : sans quoi, si l’arrière-garde n’avait pas été bien appuyée, il était inévitable que l’armée essuyât de grosses pertes dans les gorges. Même ainsi défendue, elle courut les plus grands dangers et faillit être anéantie ».

 

 

 

 

 

d) la roche nue :

 

POLYBE :

 

53-4/5 : « Les positions dominantes appartenaient aux ennemis et les barbares, manœuvrant à flanc de coteau, roulaient des pierres ou lançaient des cailloux à la main ; ils provoquèrent un désordre complet et le danger fut tel qu’Hannibal fut contraint, avec la moitié de son armée, de passer la nuit sur un grand rocher dénudé, séparé de sa cavalerie et des bêtes de charge. Il tint bon et la nuit tout entière suffit à peine au convoi pour se dégager du défilé ».

 

TITE LIVE :

 

« En effet, pendant qu’Hannibal hésitait à engager son infanterie dans le défilé, car elle n’avait rien derrière elle pour la soutenir, du fait qu’elle soutenait elle même la cavalerie, les montagnards accourant sur le flanc de l’armée la coupèrent et s’emparèrent du chemin. Hannibal passa une nuit entière séparé de sa cavalerie et de ses bagages ».

 

 

e) le col :

 

POLYBE :

 

53-6 :« le lendemain, les ennemis partis, Hannibal rejoignit la cavalerie et les bêtes de charge et poussa jusqu’au col même, sur le faîte des Alpes ; il ne rencontra plus aucun gros de barbares coalisés ; quelques partisans seulement, en certains points, vinrent escarmoucher, les uns en tête, d’autres en queue, et enlevèrent quelques animaux de bât en les surprenant au bon moment. »

53-8 : « Les éléphants furent à Hannibal de la plus grande utilité. En tous les points de la colonne où ils se trouvaient, ils formaient une zone que n’osaient aborder les ennemis effrayés par l’aspect monstrueux de ces animaux.

 

53-9 : « Le neuvième jour il atteignit le col, y campa et s’y arrêta deux jours, voulant, à la fois laisser reposer ceux qui étaient hors de péril et recueillir les traînards. Par une heureuse rencontre, un grand nombre de chevaux et de bêtes de charge qui s’étaient débarrassés de leurs fardeaux rejoignirent contre toute attente ; ayant suivi à la piste, ils arrivèrent au campement ».

 

TITE LIVE :

 

 « le lendemain, les attaques des barbares s’étaient déjà ralenties ; les troupes se rejoignent et l’on franchit le défilé, non sans subir des pertes, moins lourdes en hommes qu’en chevaux. Dès lors, les montagnards ne se montrèrent plus en si grand nombre et c’est en brigands plutôt qu’en ennemis qu’ils venaient fondre tantôt sur la tête, tantôt sur la queue de l’armée selon la nature des lieux ou selon qu’ils pensaient surprendre les détachements avancés ou les traînards. Sur ces chemins étroits et escarpés, les éléphants retardaient beaucoup la marche ; mais derrière eux on était à couvert de l’ennemi qui craignait d’approcher de ces animaux inconnus.

 

Chap. 35 : « Le neuvième jour on atteignit le sommet des Alpes, après avoir franchi bien des passages impraticables et être revenu souvent sur ses pas, soit qu’on eut été trompé par les guides, soit qui, se défiant d’eux et par de fausses conjectures, on se fût engagé imprudemment dans de mauvaises directions.

 

On s’arrêta deux jours sur ces hauteurs pour donner quelque repos aux soldats après tant de fatigues et de combats. Quelques bêtes de somme, qui avaient roulé du haut des rochers, rejoignirent le camp en suivant les traces de l’armée. Les esprits étaient déjà accablés par ces longues souffrances ; la neige qui tomba (on était au moment du coucher des Pléiades) mit le comble à la consternation. Quand on se remit en marche au point du jour, la neige couvrait tout.

 

 

III – la vue de l’Italie :

 

POLYBE :

 

54 : « la neige couvrait déjà ces montagnes, car on était au coucher héliaque des Pléiades. Hannibal , voyant ses soldats découragés par leurs misères précédentes, par celles aussi qu’ils prévoyaient encore, se résolut à prescrire le rassemblement sans autre motif que de donner aux soldats le spectacle de l’Italie. Car telle est la situation de ce pays au pied des montagnes dont nous avons parlé, que si l’on regarde d’un coté ou de l’autre, les Alpes présentent la disposition d’une citadelle dominant l’Italie tout entière. Aussi, Hannibal leur montra les plaines du Pô, leur rappela longuement les intentions bienveillantes des Gaulois qui y habitaient, enfin leur indiqua du doigt où Rome même était située et releva ainsi grandement le moral de ses troupes ».

 

TITE LIVE :

 

35 : « l’armée s’avançait lentement, la fatigue et le découragement se lisaient sur tous les visages. Alors Hannibal, prenant les devant, arrive à une sorte de promontoire d’où la vue s’étend au loin dans tous les sens, fait faire halte et, de là, montre aux soldats l’Italie et les plaines baignées par le Pô au pied même des Alpes. En ce moment, dit-il, ils escaladent les remparts, non seulement de l’Italie mais de Rome ; le reste du chemin sera uni et facile. Un combat, deux au plus, et ils seront maître de la capitale, du boulevard de l’Italie ».

 

 

IV – la descente :

 

POLYBE :

 

54 : « le lendemain, il leva le camp et commença la descente ; là il ne rencontra pas d’ennemis sauf quelques embuscades de pillards, mais le terrain et la neige lui firent subir des dommages non moins considérables qu’à la montée. La descente était étroite et raide ; la neige empêchait de distinguer où on mettait le pied ; tout ce qui tombait hors du chemin glissait au fond des précipices. Cependant les soldats ne se laissaient pas abattre par ces souffrances, familiarisés qu’ils étaient avec les maux de ce genre ».

 

 

 

 

TITE LIVE :

 

35 : « l’armée continua sa marche ; l’ennemi ne l’inquiétait plus que par des attaques furtives quand l’occasion s’en présentait. Toutefois, la descente fut bien plus difficile encore que la montée car la pente des Alpes, moins longue du coté de l’Italie est, par cela même, plus abrupte. Le chemin presque tout entier était à pic, étroit, glissant ; nul moyen d’éviter une chute ; et pour peu que le pied glissât, on ne pouvait éviter de tomber en appuyant le pied sur le sol ; hommes et chevaux roulaient les uns sur les autres ».

 

 

V – le défilé des trois demi stades :

 

POLYBE :

 

54 : « Enfin on arriva à un endroit que ni les éléphants, ni les bêtes de charge ne pouvaient franchir à cause du manque de largeur. La pente, déjà escarpée auparavant sur une longueur de trois demi stades, s’était encore éboulée récemment. Là, de nouveau, le désespoir et la consternation s’emparèrent des troupes. Le général carthaginois songea d’abord à contourner l’obstacle, mais l’abondance de la neige l’empêcha d’y parvenir et le fit renoncer à ce projet ».

 

55 : «  Ce qui arrivait là était d’une étrange singularité : sur la neige ancienne et persistante de l’hiver précédent il venait, l’année même, d’en tomber de nouvelle ; celle ci se laissait pénétrer car elle était récente, molle et peu profonde. Mais quand elle eut été foulée et qu’on marcha sur la couche inférieure plus résistante dans laquelle le pas ne pouvait faire empreinte, les hommes glissaient en manquant des deux pieds à la fois ainsi qu’il arrive lorsqu’on marche sur une pente boueuse. Ici les conséquences étaient encore plus fâcheuses : les hommes ne pouvant asseoir leur pas sur la neige inférieure, voulaient, une fois tombés, s’aider des genoux ou des mains pour se relever ; alors ils n’en dévalaient que davantage, entraînant tous leurs appuis jusqu’au fond des précipices. Quant aux bêtes de charge, elles pénétraient après leur chute dans les couches inférieures au moment où elles se relevaient et y restaient enlisées avec leurs fardeaux, comme prises au piège à cause de leur poids et de la consistance de l’ancienne neige. »

 

55-6 : « Hannibal, renonçant donc à son projet, campa sur cette arrête (littéralement : « dressa son camp sur le faîte de la montagne »)  après en avoir fait balayer la neige, puis il employa les troupes à frayer à grand peine un passage dans le roc. Les bêtes de charge et les chevaux eurent une voie praticable au bout d’un seul jour ; aussi, Hannibal les fit passer rapidement et établit son nouveau camp dans la région où il n’était pas encore tombé de neige. »

55-8 : « Il employa ensuite les Numides à élargir le chemin par tour de roulement et, en trois jours à peine et à grand mal, fit passer les éléphants qui se trouvaient misérablement exténués par la faim. Car les sommets des Alpes et les environs du col sont complètement nus et dépourvus de végétation à cause des neiges éternelles qui persistent été comme hiver. A mi hauteur sur les deux versants, elles sont boisées, couvertes de végétation et complètement habitables.

 

56-1 : « Hannibal ayant rassemblé toute l’armée, descendit et, le troisième jour après les précipices dont nous avons parlé, finit par aborder les plaines. Il avait subi des pertes importantes en soldats dans les combats et au passage des fleuves pendant tout le cours du voyage, et d’autre importantes dans les précipices et les points difficiles des Alpes, non seulement en hommes mais surtout en chevaux et en bêtes de charge ».

 

 

 

TITE LIVE :

 

36 : « On arriva ensuite à un défilé rocheux beaucoup plus étroit et tellement à pic que le soldat, même sans armes et bagages, tâtonnant, se retenant avec les mains aux broussailles et aux plantes qui croissaient alentour, avait peine à descendre. Cet endroit, déjà escarpé par lui même, avait été transformé en un précipice de mille pieds au moins par un éboulement récent. Les cavaliers s’arrêtent donc, ne trouvant plus de chemin. Hannibal demande ce qui arrête la marche ; on lui répond que c’est une roche infranchissable. Il vient s’assurer du fait. Un seul parti lui semble alors possible, faire un détour aussi long qu’il le faudra, et passer par des lieux non frayés que n’a jamais foulé le pied de l’homme. Mais cette solution est bientôt reconnue impraticable. Comme l’ancienne neige durcie était recouverte par une nouvelle couche de médiocre épaisseur, le pied posait encore assez solidement sur cette neige molle et peu profonde ; mais quand elle fut fondue sous les pas de tant d’hommes et de chevaux, on marcha sur la glace inférieure et sur le verglas mouillé, formé par la neige fondante. Ce fut alors une lutte terrible, et contre la glace glissante où l’on ne pouvait assurer ses pas et contre la pente du rocher où le pied manquait à chaque instant. Vainement essayait-on de se relever à l’aide des genoux et des mains ; genoux et mains glissaient de même et l’on retombait encore. Nulle part une souche, une racine où la main put s’accrocher et le pied se retenir. On ne pouvait que rouler sur cette glace unie et dans cette neige fondue. Quelquefois, les bêtes de somme pénétraient jusqu’à la neige inférieure ; elles glissaient et, dans leurs violents efforts pour se retirer, leur sabot brisait la glace ; alors, comme prises au piège, elles restaient souvent engagées dans cette neige durcie et gelée profondément ».

 

37 : « Enfin, après bien des fatigues inutiles pour les hommes et pour les chevaux, on se résigna à camper sur le sommet (« castra in jugo » : sur le faîte) ; encore eut-on beaucoup de peine à le déblayer, tant il fallait creuser dans la neige, tant il y en avait à enlever ! On travailla ensuite à rendre praticable la roche qui, seule, pouvait donner passage. Forcés à la tailler, les soldats abattirent tout autour des arbres énormes qu’ils dépouillèrent de leurs branches dont ils firent un immense bûcher. La feu y est mis sous un feu violent très propre à exciter la flamme ; du vinaigre est versé sur la pierre brûlante afin de la dissoudre. Lorsque le feu l’a calcinée, on l’ouvre avec le fer ; la pente est adoucie par de légères courbures, en sorte que les chevaux et les éléphants même peuvent descendre. On avait passé quatre jours autour de ce rocher ; les chevaux étaient presque morts de faim, car ces hauteurs sont presque entièrement nues et le peu d’herbe qui s’y trouve caché par la neige ».

 

 

VI – l’arrivée en Italie :

 

POLYBE :

 

56 : « Enfin, après avoir fait le voyage entier depuis Carthagène en cinq mois et le passage des Alpes en quinze jours, il déboucha audacieusement dans les plaines du Pô (du Pade) chez le peuple des Insubres. Il avait conservé en infanterie, de ses troupes africaines, douze mille hommes, des Ibères environ huit mille et, en cavalerie, pas plus de six mille hommes tout compris : c’est lui même qui, par le dénombrement inscrit sur la stèle de Lacinium nous renseigne à ce sujet ».

 

TITE LIVE :

 

« Les parties basses ont des vallons, des collines exposées au soleil et des ruisseaux et presque des bois ; c’est une nature plus digne d’être habitée par l’homme. On y laissa paître les chevaux et l’on accorda du repos aux soldats épuisés par le travail qu’avait demandé le rocher. Enfin, on mit trois jours à descendre dans la plaine où tout était moins rude et la contrée et le naturel des habitants ».

 

38 : « De cette façon, dans l’ensemble, arriva-t-il en Italie au cours du 5ème mois après son départ de la nouvelle Carthage, suivant certains auteurs, et le 15ème jour de la traversée des Alpes. Quant au nombre des forces qu’Hannibal amena en Italie, les auteurs ne sont pas d’accord. Certains écrivent qu’au maximum elles furent de 100 000 pour l’infanterie et de 20 000 cavaliers ; et, pour d’autres, le minimum de 20 000 pour l’infanterie et 6 000 cavaliers.

A sa descente en Italie les Taurini-Semigalli étaient la tribu la plus proche (la première tribu rencontrée : Taurini Semigalli proxuma gens erat in Italiam degresso ») . Vu que tous sont d’accord sur ce fait « id cum inter omnes constet », je suis d’autant plus surpris qu’il y ait controverse quant à la voie par laquelle il traversa les Alpes et qu’il soit communément pensé que ce soit par le col Poenino qu’il soit passé et que de ce fait ce col soit ainsi dénommé. Coelius dit qu’il est passé par le col Cremon. Mais l’un et l’autre de ces cols ne l’aurait pas amené chez les Taurins mais par les montagnards Salasses chez les gaulois Libui. Non plus est-il vraisemblable que ces voies conduisant en Gaule étaient ouvertes à l’époque ; en tout cas, celles qui conduisent au col Poenin auraient été occupées par des tribus semi germaniques ; et certes (par Hercule !) ces montagnes, selon les Seduni et les Veragri qui habitent ces hauteurs, n’ont pas reçu leur nom à la suite du passage des Poeni, mais du dieu auquel ce sommet est consacré et que les montagnards appellent Poenus ».

 

 

POLYBE :

 

60 : « les forces qu’avaient Hannibal à son entrée en Italie ont déjà été indiquées. Or, après y être entré, ayant établi son camp au pied même des Alpes, il commença par y refaire son armée. Car non seulement à la montée et à la descente et à la descente à travers les aspérités des monts, tous ses soldats avaient affreusement souffert mais, pour avoir manqué du nécessaire et de n’avoir pu donner aucun soin à leur corps, ils se trouvaient en fort mauvais état. Plusieurs s’étaient complètement abandonnés eux-mêmes au milieu de cette pénurie et de cette longue suite de fatigues. Faire transporter à travers de pareils lieux assez de vivres pour tant de myriades d’hommes, c’était chose impossible, et quant à ceux qu’ils emportaient avec eux, la perte de leurs bêtes de somme leur avait enlevé la plus grande partie. Aussi Hannibal qui, en partant de l’endroit où il avait passé le Rhône, avait en infanterie 38 000 hommes et plus de 8000 chevaux avait perdu, comme je l’ai dit plus haut, près de la moitié de ses forces dans les cols des Alpes. Ceux qui s’en étaient sauvés, à en juger par leur extérieur et leur état général, étaient devenus, dans cette longue suite de fatigues que nous avons racontées, des espèces de bêtes sauvages. Aussi Hannibal donnant à ces soins une prévoyante attention, réparait chez ses hommes l’esprit et le corps ; il s’occupait pareillement des chevaux.

Après cela, et dès que son armée eut repris des forces, comme les Taurins qui habitent au pied des monts, avaient des démêlés avec les Insubres et se défiaient des Carchédoniens, d’abord il leur offrit son amitié et son alliance, puis, comme ils n’y voulaient entendre, ayant investi leur ville la plus forte, il s’en empara après trois jours de siège ».

 

TITE LIVE :

 

39 : « Très opportunément pour le début des opérations, une guerre avait éclaté entre les Taurini – la tribu la plus proche (proximae genti) et les Insubres. Mais Hannibal ne pouvait pas mettre son armée en état de se battre pour pouvoir assister l’une ou l’autre des parties, car maintenant les troupes en se restaurant sentaient de façon aiguë les misères qu’elles venaient de souffrir ; le passage des peines à l’aisance, des privations à l’abondance, de la saleté et de leurs habits détrempés et embourbés aux soins de leur personne fit réagir diversement leurs corps négligés et défigurés, presque sauvages d’apparence. Ce fut cette circonstance qui fit que le consul J. Cornelius marcha rapidement vers le Pô bien que les troupes qu’il avait reçues n’étaient que des recrues et encore sous le coup de récentes disgrâces, il voulait en venir aux mains avec l’ennemi avant que celui ci ait pu se refaire. Mais quand le consul arriva à Placentia, Hannibal avait déjà quitté son camp et avait pris d’assaut une des villes des Taurini, la capitale de cette tribu, parce que ceux-ci n’avaient pas accepté de bon gré son alliance. Et il aurait gagné à sa cause non seulement par la peur mais de leur bon gré même les Gaulois habitant la région du Pô, si l’arrivée inattendue du consul ne les avait pas arrêtés au moment même où ils cherchaient l’occasion de se révolter. Hannibal en même temps quitta les Taurini, estimant que les Gaulois, indécis quant au côté à choisir, le suivraient s’il était parmi eux ».