L’édifice religieux de Rochedure à Varces

 

Les fouilles archéologiques préalables à la construction de l’autoroute A 51 ont livré sur Varces de nombreux témoins archéologiques insoupçonnés jusqu’alors. Parmi ceux-ci figurent un édifice religieux non loin du hameau de Martinais.

 

Le site historique de Martinais (Villa de Martinaix au 14ème siècle) est à situer à l’actuel hameau de Martinais d’en Bas, le site de Martinais d’en Haut (à l’ouest se situe le lieudit « Rochedure ») s’appelant « les Gagnes » jusqu’en 1931.

 

Est-ce à Rochedure qu’H. MULLER a fouillé une tombe sous tuiles et situe d’anciennes découvertes similaires ? On pourrait le penser mais il parle de « Martinais » et non des « Gagnes » ou de « Rochedure ». Pour circonscrire le problème il faudrait pouvoir situer où était emplacée en 1905 la « propriété d’Amédée Cuynat » dans laquelle ont eu lieu les découvertes.

 

J’ai étudié ce site inédit lors de nombreuses visites : 26 mai, 16 juin, 20, 27 et 28 juillet, 10, 15, 19, 24 et 31 août, 14, 21 et 28 septembre, 6, 12, 26 octobre et 1er et 12 décembre 1996.

 

J’ai eu des entretiens avec les fouilleurs les 26 juillet 1996 (F. GABAYET           ) et le 14 septembre de la même année (E. PLASSOT et F. GABAYET).

 

Selon eux, le site gallo romain de la villa romaine de Rochedure a livré une église à laquelle est associée une nécropole, ce qui tendrait à suggérer une fonction paroissiale même si l’on peut s’interroger sur la présence de cet édifice apparemment isolé en marge des paroisses connues.

 

De ce fait, il est difficile d’intégrer les données issues des fouilles dans le cadre de l’évangélisation des campagnes à partir des 5ème et 6ème siècles.

 

Si les études archivistiques et les repères chronologiques sont trop limités pour envisager décrire l’histoire de l’édifice chrétien de Drabuyard, on dispose toutefois de quelques indices probants.

 

De plus (entretiens du 14 septembre) on a remarqu2 :

 

-       à l’entrée du chœur une grande dalle d’autel (tombe principale ?)

-       une construction au mortier jointoyé

-       dans l’église, deux sarcophages paléochrétiens dont l’un entier.

 

De ce fait, on est peut être sur un site funéraire de type privé (mémoria ) suivi d’une possible basilique funéraire et enfin d’une église paroissiale (Mais F. GABAYET pense que celle-ci est trop exiguë pour avoir été paroissiale).

 

Le 12 octobre 1996, à l’occasion d’une conférence au Gua, Benoît HELLY et Eric PLASSOT indiquaient qu’un second mur, parallèle au premier et un sol en terrazo de l’abside pouvaient correspondre à l’une des pièces de la villa gallo romaine et que la grosse pierre retrouvée à l’entrée de l’abside pouvait être une pierre d’autel. Mais sous elle, seule une sépulture d’enfant a été révélée. A l’intérieur de la nef le sarcophage complet était sous une grande dalle de tuf. De manière générale les sépultures découvertes étaient plus soignées à l’intérieur de l’édifice qu’à l’extérieur. Ce jour là, E. PLASSOT semblait d’accord avec la chronologie que je proposais.   

 

Origines de l’édifice :

 

 

On connaît de nombreux exemples d’églises implantées sur des vestiges gallo romains dans toutes les régions de la Gaule. Dans certains cas c’est une tombe privilégiée (memoria : petit bâtiment destiné au culte du souvenir) qui donne ensuite naissance à un édifice cultuel. Ainsi à Tavers (Loiret), Roujan (Hérault), Briord (Ain), tous datés du 5ème siècle. Dans d’autres cas il s’agit de chapelle privée (oratorium) des propriétaires chrétiens de grandes villae : Montcarret (Dordogne), Arnesp et Montmaurin (Haute Garonne), Saint Herblain (Loire Atlantique). Parfois c’est la salle d’apparat d’une ville, souvent à abside, qui est transformée en chapelle. Ainsi, Sidoine Apollinaire mentionne au 5ème siècle un oratoire (sacratium) dans la Villa Octavianus près de Narbonne (Cf. les campagnes en Gaule romaine, T 2, 1988, page 236).

 

Dans l’Isère nombreux sont les édifices religieux de haute époque implantés sur des sites gallo romains :

 

-       Aoste, Eybens, Hières sur Amby (Saint Martin), l’Isle d’Abeau (Saint Germain), Merlas (Saint Sixte), Penol, Revel Tourdan (Tourdan), Saint Romain de Jalionas pour ce qui est des sites certains,

-       Bourgoin, Moirans (Saint Pierre), Saint Jean de Soudain, la Terrasse, Tullins, Veurey, Vif, Voiron pour les sites probables ainsi que, dans d’autres départements voisins

-       Albon, Donzère et Montbrison sur Lez dans la Drôme,

-       Saint Sigismond, Saint Martin d’Aime et Cognin en Savoie,

-       Annecy, Faverges, Saint Julien en Genevois et Seyssel en Haute Savoie. 

 

La présence à Rochedure d’une zone funéraire importante amène à s’interroger sur l’état premier de l’édifice : memoria distincte de la villa ou chapelle intégrée de type oratorium ?

 

La découverte d’un fragment d’inscription paléochrétienne dans l’abside de l’édifice,

 

 

 même si elle n’est pas à sa place originelle, plaide également pour un édifice de haute origine de type basilique funéraire comme à Saint Ours sur Veurey et Saint Julien en Genevois.

 

Cette inscription est aujourd’hui exposée à Grenoble au Musée de l’Ancien Evêché :

 

« OCTVMUS / ETERECOR / RYTIRIE/ ETIN » : « dans ce tombeau, par la miséricorde du Christ, repose en paix, de bonne mémoire » (6ème siècle probable).

Le plan de l’édiice est simple : nef rectangulaire prolongée à l’est d’une abside semi circulaire légèrement décalée au sud. Un parallèle évident est à établir avec la basilique funéraire mérovingienne de Saint Julien en Genvois. Les dimensions sont similaires : nef de 8 x 5,5 m à Martinais contre 8,5 x 4,8 m à Saint Julien, abside de 2,90 m de profondeur à Martinais contre 2,80 m à Saint Julien, décalée au sud dans les deux cas ainsi que la similitude du lieudit : Saint Martin à Saint Julien, Martinais à Varces et basilique entourée dans les deux cas d’une zone funéraire.

 

A Saint Julien un sarcophage a été découvert dans l’abside contre deux à Martinais. Dès lors, et notamment eu égard à la présence de sarcophages, tout plaide pour la présence d’un édifice antérieur à l’époque médiévale, peut être rectangulaire, l’abside ayant pu être accolée ultérieurement. A Martinais le sarcophage sud s’appuie en effet sur un mur gallo romain alors que le mur sud de la nef a été construit extérieurement au mur antique.

 

En ce qui concerne les résultats purement archéologiques du site, les seuls éléments objectifs disponibles permettent de distinguer deux phases de réalisation  de l’édifice religieux :

 

-       un premier bâtiment de 8 x 6 m implanté dans un secteur antérieurement occupé construit à partir ou après le 11ème siècle comme en atteste la céramique recelée par les niveaux entamés. Les transformations ultérieures interdisent cependant de restituer le traitement du mur oriental : chevet plat ou première abside saillante ?

-       à une époque indéterminée, la partie centrale du mur est de l’église est abattue comme en témoigne un coup de sabre parfaitement visible pour faire place à une abside légèrement décentrée vers le sud.

 

Dès lors, il semble que les niveaux de sols du premier comme du second état du bâtiment aient été intégralement récupérés lors de l’abandon de l’édifice primitif. Des fragments de schiste noir découverts dans l’abside pourraient évoquer des plaquages pariétaux.

 

Dédicace :

 

L’édifice qui nous intéresse ici pourrait-il avoir été consacré originellement à Saint Martin ? On peut être en effet tenté de rapprocher Martinais de Martin mais rien dans la microtoponymie locale s’y apparente : Derbua, Rochedure, la Fontanelle, Champ Perrigaud sur le cadastre de Varces de 1812. Certes, ces appellatifs ne traduisent pas une origine ancienne mais des toponymes antérieurs ont pu ne pas perdurer.

 

Il convient à cet égard de noter qu’il y a, au nord de Vif, un lieudit « Saint Martin » mais celui-ci est situé à l’est de la Gresse et il est distant de 3250 m à vol d’oiseau de Martinais et donc trop éloigné pour qu’il y ait entre les deux un lien quelconque. De surcroît, l’abbé COFFIN n’attribue pas au lieudit de Vif une très haute origine. On n’y connaît au demeurant aucune structure antique ni le voisinage d’une ancienne voie, la voie romaine paraissant devoir être située à l’Achard où elle a été exhumée en partie lors des fouilles susvisées.

 

Dès lors l’édifice cultuel de Martinais, dont les analogies avec Saint Julien en Genevois ont été rappelées, pourrait-il avoir été à l’origine dédié à Saint Martin dont, par corruption, serait né « Martinais » avant d’être peut être dédiée à Saint Marcellin ? Pour ce qui est de l’Isère, on ne connaît guère (selon le dictionnaire topographique de PILOT de THOREY) que deux églises placées sous ce vocable :

 

-       l’ecclesia Sancti Marcellini de Varces citée au 11ème siècle dans le cartulaire de Saint Hugues,

-       l’ecclesia Sancti Marcellini (aujourd’hui Saint Marcellin en Bas Dauphiné).  

 

Saint Marcellin de Varces n’est connu que par le seul cartulaire de Saint Hugues : elle existait à son époque (1080 – 1130) comme église paroissiale taxée alors de XII deniers tout comme Saint Pierre de Varces, Saint Paul de Varces, Saint Pierre de Claix, Saint Jean de Vif et Risset. Cela signifie que la paroisse était élors relativement dotée. A titre de comparaison l’église éloignée de Chabottes, la chapelle de Varces (Saint Géraud) et les églises disparues de Vif, la Sainte Trinité, Saint Sulpice et Sainte Marie de Costa ne sont créditées que de VI deniers. Dès lors que l’église Saint Marcellin de Varces était le centre d’une paroisse importante et aisée on a du mal à imaginer qu’elle ait pu correspondre à l’édifice de Rochedure. Ses dimensions ne s’y prêtent guère : 10,90 m de longueur totale pour 5,5 m de largeur. Ce ne sont pas là, de toute évidence, les dimensions d’une église paroissiale. Cossey, à priori deux fois moins importante en termes de population, a des dimensions de 15 x 5 m par exemple. De surcroît la présence anormale d’un nombre très élevé de sépultures d’enfants à Rochedure montre qu’on n’est pas dans la répartition habituelle que l’on trouve dans les cimetières paroissiaux et inciterait d’ailleurs à orienter les recherches en direction d’un possible site cultuel consacré aux enfants défunts…

 

Enfin, l’assimilation de l’édifice de Martinais à l’église Saint Marcellin ne correspond pas à l’ordre, vaguement géographique, que le cartulaire de Saint Hugues est censé respecter. En effet, celui cite Saint Marcellin non après Saint Pierre de Varces – ce qui aurait du être le cas si elle avait été située à Martinais – mais entre Saint Paul de Varces et Chabottes ce qui pourrait induire, en toute logique, qu’elle devait se situer nettement plus au sud de Martinais.

 

Prudent, J. MARION ne situe pas Saint Marcellin et se borne à indiquer « église depuis longtemps détruite située sur le territoire de Varces ».

 

Or, à moins de 1100 m au sud de Martinais, en limite des actuelles communes de Saint Paul et de Varces, existait un ancien lieudit « l’église » où l’on situait traditionnellement l’emplacement de la seconde église de Saint Paul.

 

Une confusion avec Saint Marcellin est-elle pour autant envisageable ? Cela ne semble guère possible, la tradition étant largement étayée par des documents d’archives, ceux-ci n’étant guère antérieurs, pour les plus anciens connus au 15ème siècle. Selon l’abbé VAUJANY cette église possédait les restes d’une fenêtre ogivale.

 

Cette indication est de nature à lever tous doutes ; en effet, l’église Saint Marcellin disparaît bien avant la période gothique.

 

De fait, cette précoce église paroissiale « Sancti Marcellini » n’était manifestement pas celle qui subsista jusqu’à une époque récente au lieudit « l’église » (actuellement « Chambord » pas davantage que celle qui a ressurgi fortuitement à Rochedure.

 

Comment interpréter dès lors ce dernier édifice ?

 

Tant que les résultats des fouilles ne seront pas publiés (le seront-ils un jour ?) on ne peut qu’hasarder une hypothèse de chronologie du site cultuel de Rochedure qui ne vaut, bien évidemment, que comme hypothèse.

 

Dans une vallée partiellement protégée de l’axe de circulation le plus probant (Grenoble, Claix, Varces, Vif ?) fréquenté de très haute origine et où s’établissent dès la préhistoire des sites de hauteur (Rochefort, Saint Géraud, Saint Loup) s’implantent, dès le néolithique quelques foyers d’habitat de plaine (Champ Nigat). Ceux-ci perdurent et s’intensifient à la protohistoire (Champ Nigat, Drabuyard, les Gaberts). Durant l’époque de la Tène de nombreux foyers apparaissent notamment à Rochedure jusque là vierge de toute occupation semble t-il.

 

A l’époque gallo romaine s’implantent des domaines bien identifiés : Allières, le Cellier, Rochedure, les Gaberts… A ce jour, Rochedure apparaît comme le plus important de ces domaines comme en témoigne une grande villa. Puis viennent des périodes de troubles : le rempart de Rochefort est consolidé, celui de Saint Loup également. Placidianus est à Grenoble ; il se rend à Vif et sans doute à la Fontaine Ardente. Puis les troubles s’estompent. Rochedure est toujours occupée. Une partie de la villa est alors consacrée à un culte funéraire (tombes sous tegulae). Une memoria à l’emplacement de l’église découverte n’est dès lors pas improbable. Mais la fin de l’empire romain est proche : les pillages et les invasions se succèdent. La villa de Rochedure est incendiée. Le temps passe. Quelques inhumations sont encore faites sur le site dévasté dont subsistent encore, sans doute, quelques élévations des structures antiques sans que l’on sache si l’habitat se reconstitue à proximité ou de nouveau et exclusivement sur les hauteurs (Rochefort, Saint Loup…). Rochedure perdure comme site funéraire : sépultures en pleine terre ou en coffres de bois. La memoria originelle est alors peut être intégrée dans un petit bâtiment cultuel de structure rectangulaire s’appuyant en partie sur les restes de murs gallo romains. On assiste peut être à la même évolution que celle décrite ci avant à Saint Julien en Genevois.

 

Y eut-il à Rochedure un édifice de type basilique funéraire mérovingienne ? Le précieux fragment d’inscription paléochrétienne et les deux sarcophages de la nef pourraient le laisser penser. L’édifice primitif est ensuite consolidé voire reconstruit : une abside est établie dont l’orientation à l’est respecte les usages observés sur tous les sites du haut moyen âge.

 

S’agit-il toujours d’une basilique funéraire strictement rurale comme à Saint Ours ou du cimetière d’un proche village (Martinais ?) consacré peut être à un culte particulier des enfants prématurément décédés ou encore de la chapelle privée d’un grand domaine ?

 

Dans un dernier état, vers le 11ème siècle, l’édifice est enfin reconstruit (ou réparé) dans l’état où il nous est révélé, comme l’atteste la céramique caractéristique révélée par les niveaux fouillés.

 

Cette reconstruction médiévale sera sans doute de courte utilisation : peu après, en effet, cette église inédite jusqu’alors disparaîtra pour des raisons totalement ignorées et, avec elle, tout souvenir architectural ou même écrit, pas davantage que la tradition orale n’en conservera la mémoire, jusqu’à son exceptionnelle redécouverte de l’été 1996.

 

Restitution de l’édifice :

 

La faiblesse des fondations semble induire une hauteur relativement peu élevée de l’église. Le voûtement reste hautement improbable : l’épaisseur de la maçonnerie, en effet, n’est pas plus importante que celle des murs de la nef. Selon toute vraisemblance, une charpente devait supporter le toit. Aucune trace de clocher n’est décelable. Compte tenu de la parfaite continuité des quatre murs de soutènement, l’accès à la nef devait se faire par des escaliers, vraisemblablement à l’ouest, un peu comme à Saint Jean de Cossey. L’existence de baies est envisageable sans être toutefois certaine.

 

Notes sur les basiliques funéraires :

 

« Quelle est la fonction exacte de la basilique funéraire : chapelle funéraire d’un cimetière, monument privé ou édifice d’une autre nature ? On dispose en France d’assez peu d’exemples fouillés de chapelles funéraires établies dans les zones rurales durant l’époque mérovingienne hors du contexte paroissial proprement dit : Vourey, Briord, Saint Sigismond d’Aime, Montferrand (Aude), Saint Romain d’Albon (Drôme)… Le schéma le plus vraisemblable est alors : chapelle funéraire privée installée dans un grand domaine, proche de la maison du maître… » (E. MALE : la fin du paganisme en Gaule et les plus anciennes basiliques chrétiennes, 1950).

 

« A coté des églises épiscopales et, plus tard, des sièges paroissiaux, les autres lieux de la vie religieuse sont les cimetières où, souvent, sont construits des oratoires ou des églises. Dédiées par la piété populaire à un personnage vénéré, saint ou martyr, ou construites grâce aux libéralités de familles puissantes, les basiliques funéraires – ainsi appelées parce qu’elles empruntent généralement leur forme architecturale aux basiliques civiles de l’antiquité aux fonctions judiciaires ou commerciales – se multiplient à la périphérie des villes où sont cantonnés par la loi romaine les cimetières où à la campagne dans les domaines ruraux (villae) (GAF, Grenoble aux premiers temps chrétiens, 1986, page 13).

 

Note sur Saint Marcellin :

 

L’hagiographie connaît deux saints de ce nom :

 

-       un pape de l’extrême fin du 3ème siècle,

-       Marcellin l’Africain, évêque d’Embrun

 

1)    Marcellin, Marcellin, Marcellinus (pape) :

 

Romain de naissance dont le père se prénommait Project. Il fut élu pape le 22 décembre 295. Il succédait alors à Caïus. Ce fut de son temps qu’éclata la persécution de Dioclétien. Les églises des chrétiens furent abattues dans presque toutes les provinces…

L’histoire n’a conservé aucune action mémorable de Marcellin : les donastites ont prétendu que, d’après son propre aveu, ce pape aurait sacrifié aux idoles. Ils s’appuyaient en cela des actes d’un certain concile de Sinvesse qui fut reconnu comme faux et supposé. Saint Augustin le regarde comme tel dans son ouvrage contre Petilien.

Saint Marcellin serait mort le 24 octobre 304. Il est honoré comme martyr le 26 avril quoique l’ancien calendrier romain, dressé sous Libère, fasse connaître qu’il n’aurait point terminé sa vie dans les supplices (Bibliographie universelle de MICHAUD, T XXVI, 1854, page 463).

 

29ème pape. Mort le 24 octobre 304. Fils de Projectus, riche citoyen romain converti à la foi chrétienne. Elu pape le 30 juin 296 pour succéder à Saint Caïus » (HOEFER, nouvelle bibliographie générale, T XXXII, XXXIV, 1967)

 

2)    Marcellin, Marcellini, Marcellinus (évêque d’Embrun) :

 

« Premier évêque d’Embrun en 311, originaire d’Afrique. Il fut martyrisé. Son corps repose à Digne où sa fête est le 20 avril » (G. ALLARD : dictionnaire du Dauphiné, II, page 91)

 

« Archevêché d’Embrun fondé vers 360 par Saint Marcellin » (P. JOANNE, dictionnaire, pages 1557-8)

 

« Le premier évêque d’Embrun, Saint Marcellin, a sept édifices sous son vocable et son disciple, le premier évêque de Grenoble, Domnin, honoré également à Digne, en a une voisine de Digne » (G. de MANTEYER : les origines chrétiennes de la IIème Narbonnaise des Alpes Maritimes et de la Viennoise (364-483), 1921).

 

Les sept édifices évoqués par cet auteur, tous dans les Hautes Alpes, sont les suivants :

 

-       la Saulce : église consacrée à Saint Jean Baptiste et Saint Marcellin,

-       Lardier : chapelle rurale Saint Marcellin,

-       Vaumeilh : chapelle rurale Saint Marcellin,

-       Veynes : église Saint Marcellin,  

-       Plasians : église Saint Marcellin et Saint Blaise,

-       Laragne : église des Arzeliers à Saint Marcellin, pape,

-       Chardavon : prieuré Saint Marcellin.

 

Auxquels on peut ajouter la chapelle Saint Marcellin de Névache.

 

« L’église d’Embrun fêtait Saint Vincent, disciple de Saint Marcellin, le 29 janvier. La quatrième leçon du deuxième nocturene disait que Vincent, africain comme Marcellin et Domnin, vint à Rome… passant les Alpes tous trois parvienent à Embrun où les saints Nazaire et Celse avaient déjà prêché la foi » (Ibid, page 351).

 

« Saint Marcellin, patron d’Embrun, se trouvait fêté le 20 avril. Le 20 novembre se fêtait l’invention des reliques de Saint Marcellin » (Ibid, page 352).

 

« La légende de Saint Marcellin spécifie que les évêques Eusèbe de Vercelli et Emilien de Valence furent ses consécrateurs comme archevêque d’Embrun. Le 27 avril, l’office de l’Octave donne ce fait intéressant qu’il fut amené, sur la demande de son peuple, à bâtir une nouvelle église à 16 miles d’Embrun à cause de la distance qui empêchait les fidèles de venir à Embrun entendre la parole divine. Ce doit être l’origine de Chorges… » (Ibid, page 352).

 

« A Gap, au milieu du 11ème siècle, on fêtait Saint Marcellin le 12 des calendes de Mai » (Ibid, page 353).

 

Par ailleurs, on trouve les mentions suivantes :

« L’existence d’un siège épiscopal est attestée en 438 et, dès lors, on connaît un certain nombre de ses titulaires jusqu’à la fin du 7ème siècle. Mais une « Vie », de date incertaine, attribue la fondation de l’évêché à l’action d’Eusèbe de Verceil qui, avec Aemilius de Valence, consacra un certain Marcellinus… » (Archéologie dans les Hautes Alpes, 1991).

 

« Cette intervention de l’évêque de Verceil, bien connu pour sa résistance à l’arianisme et mort en 370 surprend, tout comme surprend l’origine africaine attribuée à Marcellinus et à ses compagnons Vincentius et Domnitius auxquels est attribuée l’évangélisation des Alpes Maritimes. Les évènements rapportés par sa « Vie » se retrouvent dans le martyrologue d’Adon ce qui conduit à supposer qu’elle peut remonter au 7ème ou 8ème siècles ou même être quelque peu antérieure. Existait en tout cas, à l’époque de Grégoire de Tours, une tradition qui attribuait à ce Marcellinus des miracles et la construction d’un baptistère. Sa sépulture pourrait être située au nord de la ville médiévale d’Embrun, près de la « Porte de Briançon » (CAG 05, 1996, pages 105 et 106).

 

Selon la « Vita S. Marcellini » précitée, l’apôtre des Alpes Maritimes aurait été un africain qui aurait été confirmé par Eusèbe de Verceil vers 370 et par T. Aemilianus de Valence connu en 374. Sont aussi mentionnés un Vincentius, élu à Digne et son condisciple Domninus sur les sépultures desquels avaient lieu des miracles. De ce texte, fort suspect, a été retenue la date approximative de la consécration de Saint Marcellin entre 362 et 370.

 

La « Vita » rapporte également que Marcellini, après s’être contenté d’un oratoire « jouxtant les murs de la cité » construisit une malorem ecclesiam pour contenir le nombre important de fidèles, à quoi il adjoignit un petit bapistère. La « Vita » n’apprend rien de plus sur la sépulture de Saint Marcellin. Pour sa part, Grégoire de Tours dit que la ville avait pour patron Marcellinus. Il ajoute toutefois que, sur sa tombe, brillait perpétuellement une lampe la nuit et que les malades y trouvaient guérison. On retiendra de ces faits qu’au moyen âge existait une église dédiée à Saint Marcellin près de la porte de Briançon. Des substructions en ont été repérées lors de la démolition des remparts.

 

« Sous l’actuelle place Saint Marcellin, on connaît les vestiges d’une église de haute époque (à l’intérieur des remparts) (Ibid, page 114).

 

DU reste, Saint Marcellin a laissé peu de traces dans la toponymie si l’on excepte le cas particulier des Hautes Alpes. Ainsi, selon le dictionnaire géographique et administratif de la France  de P. JAOANNE (1902, page 4211) :

 

-       Saint Marcellin de Crey (Saône et Loire),

-       SAINT Marcellin (Isère),

-       Saint Marcellin (Loire),

-       Saint Marcellin (Vaucluse)

 

Ainsi que deux lieudits dans les Hautes Alpes : Saint Marcellin dans les Hautes Alpes, commune de Vars, et Saint Marcellin, commune de Veynes.

Enfin, un culte à Saint Marcellin (le pape ?) est également à signaler à Bonneval en Eure et Loir (CAG 28, 1995, page 86).

 

On citera également l’abbaye de Saint Florent, monastère bénédictin fondé en 857 par Charles, roi de Provence et son chevalier Foulque en l’honneur des saints martyrs Pierre et Marcellin. Après la translation des reliques de Saint Florentin et de Saint Hilaire elle fut alors placée sous le patronage de ceux-ci.

 

En ce qui concerne l’Isère, les éléments, comme indiqué ci avant, sont peu nombreux. Hormis l’église Saint Marcellin de Varces une chapelle à ce saint est connue à Champier qui passe pour avoir été élevée sur un sanctuaire dédié à une divinité de fontaines.

 

Reste le problème de la commune de ce nom en Bas Dauphiné.

 

« C’est de 1083 que date la première mention d’une paroisse à Saint Macellin dont l’église est donnée par l’archevêque de Vienne aux bénédictins de Montmajour. Elle fut consacrée solennellement par le pape Calixte II le 19 mars 1119 » (Dictionnaire des communes de l’Isère).

 

D’autres textes font référence à Saint Marcellin :

 

« En 1083, Gontard, évêque de l’église de Vienne et évêque de Valence…. donne au monastère de Montmajour cinq églises : Saint Antoine et Saint Didier, Sainte Marie de Montagne, Saint Hilaire et Saint Marcellin avec leurs dîmes » (Regeste Dauphinois, I, n° 2366).

 

« Marcellin, présumé d’origine berbère et de l’église de Carthage, évangélisa notre région. En 365 il fut placé par ses pairs sur le siège d’Embrun. Mort le 13 avril 374 et inhumé en avril de la même année… Ce n’est qu’à partir de 1083 qu’on relève un village du nom de Sancti Marcellini (J. SORREL : histoire de Saint Marcellin, 1981, page 15).

 

« On peut affirmer qu’avant la fin de la fin de l’époque burgonde il existait des églises dans les localités suivantes…. Quatorze autres s’y ajoutèrent au plus tard à l’époque mérovingienne… Saint Marcellin » (B. BLIGNY : histoire des diocèses de France : le diocèse de Grenoble, 1979, page 18).