CONFERENCE CSVG DU 5 FEVRIER 2000
AUX ADI
Sous la présidence d’André LARONDE, professeur à la
Sorbonne
Il
s’agit là, sans doute, de la plus complexe des conférences que M. Charre m’a
confiées, le sujet pouvant paraître abstrus, sinon abscons. Il mérite néanmoins
une large attention car, on le sait trop peu – le Professeur Laronde a
d’ailleurs souligné le fait le 22 Janvier dernier lors de la première
conférence – Grenoble se situe parmi les 25 cités antiques de Gaule et de
Germanie qui ont livré le plus grand nombre d’inscriptions latines sur les 14
000 inscriptions connues à ce jour pour les seules Gaules. En effet, en partant
du haut du tableau qu’a établi Christian Goudineau dans l’histoire de la France
urbaine on trouve deux villes ayant livré plus de 1000 inscriptions :
Nîmes et Narbonne. Entre 500 et 1000 inscriptions, deux villes également :
Mayence et Lyon. Entre 250 et 500 inscriptions, le nombre s’accroît un
peu ; cinq au total : Cologne, Trèves, Vienne, Arles et Bordeaux. Il
y en a ensuite neuf avec plus de 100 inscriptions :
Bonn,
Metz, Reims, Dijon, Autun, Bourges, Périgueux, Die et Vaison. Grenoble, que
l’on classe ensuite dans la tranche suivante des 50/100 inscriptions avec
notamment Genève, Orange, Aix en Provence et Marseille pourrait, à mon sens,
relever de la catégorie des villes ayant livré plus de 100 inscriptions puisque
si le Corpus, sur lequel ce classement est essentiellement fondé, relevait 86 inscriptions latines, le fascicule 38/1 de
la Carte archéologique des Gaules porte ce nombre à 97 et mon inventaire, que
j’espère exhaustif, s’établit à 105 inscriptions.
Mais,
au delà de ces querelles qui, du reste, ne sauraient passionner que les
puristes et, quoiqu’il en soit, Grenoble figure bien dans le « club »
prestigieux des 20/25 cités antiques de Gaule et de Germanie ayant livré
l’épigraphie lapidaire la plus importante.
Rassurez
vous, il ne saurait être question d’entreprendre ici l’étude systématique de
cette épigraphie. Pour éviter, au contraire, autant que faire se peut, la
monotonie qu’un tel sujet pourrait engendrer, je vous proposerai, dans un
premier temps, de rappeler, très brièvement les caractères généraux des
inscriptions romaines et la recherche historique, longue et méritoire, de l’épigraphie
lapidaire de Grenoble. Puis, je présenterai une typologie des inscriptions
grenobloises :
-
tout d’abord,
celles consacrées aux divinités et nous parlerons, à cette occasion, des
sanctuaires connus ou conjecturés
-
puis celles
vouées aux empereurs et il m’a paru intéressant d’y inclure une synthèse sur le
séjour à Grenoble de Placidianus sous les règnes de Claude II et Aurélien
-
il sera ensuite
question des inscriptions relatives à des militaires puis de celles concernant
les fonctions municipales, qu’elles soient liées aux cultes ou à
l’administration locale et de celles, peu nombreuses au demeurant, liées à
l’administration publique, ce qui permettra de s’intéresser un peu aux douanes
et à l’impôt dit du quarantième des Gaules,
-
puis seront
brièvement examinées les plus intéressantes des inscriptions funéraires
-
quelques instants
seront ensuite consacrés aux inscriptions réputées douteuses et il sera alors
temps de conclure en s’interrogeant quelque peu sur la vie et les mœurs des
Cularonenses.
Bien
évidemment, et comme cela a déjà été le cas lors de la première conférence,
j’essaierai, de temps à autre, d’agrémenter la matière par des projections de
dessins ou de diapositives. J’ajoute que, bien qu’ayant été conseillé de
première main par l’abbé Coffin, je vous serais extrêmement reconnaissant de
bien vouloir être tolérants par ma prononciation du latin, qui n’est ni
totalement conventionnelle, ni de messe et qui s’est délibérément orientée vers
un moyen terme présentant l’inconvénient de n’être pas toujours d’un académisme
parfait.
I
– Caractères généraux des inscriptions et recherche historique :
A
– Caractère généraux :
Pour
bien comprendre ce qu’est l’épigraphie latine, il faut rappeler quelques
principes. L’inscription se présente comme une succession de lettres majuscules
sans signe pour distinguer les mots les uns des autres : les séparations
traduisent uniquement des soucis esthétiques de présentation sans signification
réelle. Les plus anciennes inscriptions – jusqu’au milieu du 2ème siècle
– sont caractérisées par une inscription monumentale gravée avec soin,
cependant qu’à partir de l’an 150 apparaissent des lettres écrites au pinceau,
moins bien tracées, que le graveur a plus de mal à transcrire dans la pierre.
Le
style que les graveurs utilisent est quasiment officiel, simple, avec un
vocabulaire restreint et une structure de l’inscription très conventionnelle.
Elément
déterminant des inscriptions, notamment funéraires, la gens ou ensemble des
personnes portant le même gentilice ou nom et se considérant comme les
descendants d’un ancêtre commun : ainsi, à Grenoble, Aelius, Atticus,
Cassius…
Le
citoyen romain porte les « tria nomina », les trois noms, c’est à
dire le prénom, le nom de famille et le surnom énoncés dans cet ordre immuable :
près de 45 % des inscriptions de Grenoble présentent les « tria
nomina » et ce pourcentage, rapporté à la totalité des noms connus par
l’épigraphie, soit 153, est encore de 31 %. Ceci démontre un très important
degré de citoyenneté romaine, renforcé par le fait que sur la quinzaine de
prénoms usuellement utilisés dans la civilisation romaine, 11 sont présents à
Grenoble.
Comme
le notait le Professeur Laronde dans l’ « histoire de
Grenoble », l’onomastique reflète, pour cette ville, la force de la population
latine, tandis que les noms celtes ne représentent que 18 % du total des noms
connus pour les trois premiers siècles de notre ère.
Le
non citoyen, l’esclave par exemple, porte un seul nom qu’il ait suivre parfois,
lorsqu’il devient affranchi, de la dénomination de son maître au génitif, ainsi
Publius Primitivus ou Lucretia, affranchie de Quintus.
Les
femmes, en général, n’avaient pas de prénom et conservaient comme nom de
famille celui de leur père au féminin. On lit parfois, à la suite de leur nom,
celui de leur mari, au génitif. Ainsi, Attius, le père, + Marcianus, l’époux,
donnent Attia Marciana : 54 inscriptions de ce type sont recensées pour
Grenoble.
A
en croire les inscriptions, tous les maris auraient été « pleins de
mérites » et toutes les épouses « incomparables ». D’elles
surtout, on loue leur douceur, leur vertu, leur bonté, leur parfait caractère.
Presque systématiquement, les maris proclament leurs louanges. Si incontrôlable
que soit leur sincérité, notamment sur leurs vertus conjugales, elles
témoignent du moins que ces qualités étaient publiquement appréciées. Elles ne
doivent cependant pas nous abuser. Déjà Guy Allard, il y a de cela plus de
trois siècles, à propos des louanges faites par son mari à Hilaria Quintilla,
notait, non sans humour :
« ce mary avait des sentiments
bien avantageux pour sa femme de croire que celle ci estoit vierge lorsqu’il
l’épousa. Je doute que la foy des maris de ce siècle soit aussi grande… ».
L’éloge
que la femme adresse couramment à son défunt mari est d’un ton moins
emphatique, plus réservé ; la veuve atteste parfois que la vie commune fut
sans nuage, se borne souvent à regretter discrètement un époux « plein de mérites », « très
cher », « doux », « très digne ».
Inversement,
les enfants pleurent des parents « si affectionnés », « très
chers »…
Je
ne m’arrêterai pas aux abréviations usuellement employées dans l’épigraphie
romaine et très nombreuses renvoyant pour cela aux précisions données dans mon
ouvrage. On notera seulement que la formule « vivus sibi posuit » (a
élevé de son vivant), que l’on rencontre à maintes reprises, montre combien ces
gens s’attachaient profondément à l’idée que leurs pierres tombales, souvent
acquises par une vie de labeur, souvent élevées par précaution aussi de leur
vivant, leurs vaudraient une sorte de survie. A cet égard ils ne se sont point
trompés ; éparses aujourd’hui dans nos musées ou conservées dans nos
ouvrages elles n’ont pas encore cessé de nous parler d’eux. La formule
« Dis Manibus » que l’on trouve employée 38 fois dans le lapidaire
grenoblois mérite explication. En effet, dès l’époque d’Auguste, les
inscriptions funéraires prennent une forme plus structurée. L’inscription est
conçue comme une dédicace aux Dieux Manes, ces divinités collectives qui symbolisent
les esprits des morts : elles sont célébrées dans le calendrier religieux
officiel lors de la fête des « parentalia » du 13 au 21 Février.
Né
sous Auguste, cet usage se généralise à partir du règne de Claude. Dans un
premier temps, la formule reste concise : « Manibus » ou
« Diis Manibus » en toutes lettres ou en abrégé. A partir du 2ème
siècle l’invocation se fait sous la forme « Diis Manibus Sacrum »
sous entendu « locum », lieu consacré aux Dieux Manes abrégé en D. M.
S.
Ensuite la formulation funéraire
évolue peu et l’essentiel de la structure est respecté. Aux Manes se font, aux
3ème et 4ème siècles, des adjonctions « a la
mémoire » ou « à la mémoire éternelle ». Moins aisée est
l’interprétation de l’ascia figurée sur 16 des stèles grenobloises accompagnée
de la formule « sub ascia dedicavit » en toutes lettres ou en abrégé.
Le rite de l’ascia, c’est à dire l’herminette, le marteau qu’utilise le
tailleur de pierre, né semble t-il en Dalmatie avant le milieu du 1er
siècle de notre ère, se généralise de manière foudroyante en Gaule et en
Cisalpine, aire cultuelle celtique. Nonobstant les nombreuses hypothèses émises
sur la signification de la référence à cet outil on n’en connaît pas avec
certitude le sens religieux ; c’est, sans doute, la marque d’un rite de
consécration qui place le monument funéraire avec ses annexes sous la
protection divine et qui en assure l’inviolabilité.
Enfin,
on notera que dans près d’une dizaine d’inscriptions l’appartenance du
dédicataire à la « tribu Voltinia » est indiquée. On sait que la
représentation des citoyens en tribu remonte à l’origine de Rome. La
Narbonnaise avait été versée en bloc dans la « tribu Voltinia » qui,
à la suite des quatre tribus urbaines (Palatina, Collina, Esquilina, Suburana)
venait au second rang des tribus rustiques, c’est à dire aussitôt après la
Romula.
En
47 avant notre ère, lors de la fondation de la Colonia Julia Viennensium, tous
les citoyens de la civitas furent classés dans la « tribu Voltinia ».
Cette mention d’appartenance, assez usuelle en Narbonnaise au début du Haut
Empire cessa avec Caracalla qui, en étendant le droit de cité à tous les
habitants de l’Empire, rendit inutile l’indication de l’appartenance à une
tribu.
Avant
d’en venir à une rapide synthèse de la recherche historique, il me semble utile
de préciser que, sur les 105 inscriptions romaines de Grenoble que j’ai
étudiées :
-
25 proviennent de
la Porte Romaine
-
20 proviennent de
la Porte Viennoise
-
38 proviennent
d’emplacements authentifiés à Grenoble
-
20 sont de
provenance inconnue mais sont traditionnellement attribuées à Grenoble
-
2 sont
extérieures à Grenoble (Echirolles et Meylan) mais doivent, à mon sens, être
rattachées à la ville
46
de ces inscriptions sont conservées :
-
37 au Musée
Dauphinois, dont 4 visibles dans le cloître et 1 dans l’église
-
4 au Musée de
l’ancien évêché
-
2 à la cathédrale
Notre Dame
-
1 encastrée dans
un mur 20 Grande Rue
-
1 déposée au fond
d’une cour rue Saint Laurent
-
1, enfin, à
Echirolles au château Saint Jacques
66
sont complètes cependant que 38 sont fragmentaires.
65
% de ces inscriptions, enfin, sont des inscriptions funéraires.
B- En ce
qui concerne la recherche historique consacrée à l’épigraphie lapidaire,
Il est
anecdotique, mais intéressant, de rappeler que les recueils d’inscriptions latines
antiques remontent en fait à l’antiquité. En effet, déjà sous le Haut Empire se
constituèrent des recueils d’inscriptions d’époque républicaine, si l’on en
croit le témoignage de Suétone sur Vespasien qui fit reconstituer 3000 tables
d’airain détruites dans l’incendie du Capitole.
Je
ne citerai ensuite que pour mémoire le Codex carolingien, les Mirabilia et les
recueils de la Renaissance qui recensaient déjà 12 000 inscriptions grecques et
latines. Au plan local, on rappellera que le premier auteur identifié qui se
soit intéressé aux inscriptions romaines de Grenoble est Antoine de Govéa,
jurisconsulte de Vienne, qui enseignait le droit à Grenoble au début du 16ème
siècle. Malheureusement son manuscrit n’est plus localisé de nos jours. Il
semble bien qu’il ait relevé nombre d’inscriptions aujourd’hui perdues et
Champollion Figeac estimait, sans doute à juste titre, que Guy Allard qui nous
a laissé de nombreux écrits et la mention de 54 inscriptions, n’avait fait que
copier Etienne Barlet, auteur d’un précis sur les inscriptions romaines de
Grenoble daté de la période 1547-1559 lequel n’aurait fait que reprendre
Antoine de Govéa.
On
notera également les écrits, fragmentaires, d’Etienne Clavière, vers 1621, et
ceux, plus complets, mais à manier aujourd’hui avec de grandes précautions, de
Nicolas Chorier vers 1661, de Nicolas Charbot, vers 1717 et de l’abbé Jean
Claude Martin qui se disait le continuateur de Charbot. J. J. Champollion
Figeac, dans son ouvrage sur les antiquités de Grenoble édité en 1807, étudie
36 inscriptions et en cite, mais sans les analyser, 44 autres. J. J. A. Pilot
est également une source appréciable au travers de sa très prolifique
production qui va de 1829 à 1860 pour ce qui nous intéresse ici. Et puis,
ouvrage majeur, celui d’Allmer en 4 volumes publiés en 1875-1876 assortis d’un
atlas recensant toutes les inscriptions antiques de la cité de Vienne, dont 85
pour Grenoble.
Sur
un plan général, quasiment encyclopédique, l’Académie de Berlin prend, dès
1863, la responsabilité de la publication d’un recueil de toutes les
inscriptions latines alors recensées de l’empire romain : le Corpus des
inscriptions latines en 18 volumes. Le tome XII, consacré à la Narbonnaise, est
publié en 1888. Il recense, je l’ai rappelé dans mon préambule, 86 inscriptions
romaines pour Grenoble. Depuis sa publication le Corpus est complété, notamment
en ce qui concerne la Narbonnaise, par l’année épigraphique créée dès 1888 par
René Cagnat. Il en va de même des « Inscriptions Latines de Gaule
Narbonnaise » publiées en 1929 par Espérandieu en complément au
CIL : en ce qui concerne Grenoble, 7 nouvelles inscriptions ont ainsi été
étudiées. On notera ensuite l’ouvrage du Doyen Samuel Chabert de 1927, consacré
aux inscriptions romaines du Musée Dauphinois qui en décrit 43 puis, plus
récemment, les écrits du Père Hostachy et ceux de Bernard Dangréaux sur l’état
des connaissances des origines de Grenoble, requalifiant notamment certaines
datations. Plus récemment encore, André Pelletier dans la Carte Archéologique 38/1
en mentionne 97.
Méritoire,
cette longue et constante recherche épigraphique nécessite aujourd’hui une
relecture plus synthétique, plus critique et, sans aucun doute, comme le
suggérait le 22 janvier dernier le Professeur Laronde, plus comparative. C’est
ce que j’ai, en partie, tenté de faire dans le « Grenoble Antique »
qui me vaut l’honneur et le plaisir d’être ici aujourd’hui.
J’ai
indiqué en préambule qu’il était hors de question – et pour cause : nous y
passerions l’entier week end – d’étudier chacune des inscriptions romaines de
Grenoble. Contentons nous, si vous le voulez bien, d’une typologie par grands
thèmes.
a)
tout d’abord
celles consacrées aux divinités :
sans
être négligeables, elles sont peu nombreuses ; une petite douzaine. Les
divinités concernées sont tout d’abord
Esculape, l’Asklépios grec, dieu de la médecine que la Narbonnaise a peu honoré
(huit inscriptions au total), consacré à Grenoble par Caecus, gardien d’un
temple d’Isis non localisé mais démontrant à l’évidence l’existence de ce culte
oriental à Grenoble ou dans les proches environs : on rappellera à cet
égard la tradition orale liée à l’autel de Pariset et les toponymes d’Ezy sur
Noyarey, d’Izeaux et d’Izeron et le contrepoids de Saint Georges de Commiers
susceptible de représenter un prêtre du culte d’Isis. On s’attendrait pour un
peu, dans une ville où tant d’armées sont passées, à trouver Mithra, ce qui ne
serait aucunement surprenant, mais il n’y est pas ; tout au plus à t-on pu
conjecturer un éventuel site cultuel, très frustre, à Sarcenas en Chartreuse.
Puis viennent les Fortunes, auxquelles un citoyen romain a consacré un autel.
Jupiter, dieu de la triade capitoline, qui est connu par une inscription
fragmentaire et par une statuette découverte place Jean Achard en 1890. Maïa
Auguste, ensuite, pour laquelle les Allobroges semblent avoir eu une faveur
toute particulière : deux dédicaces à Grenoble, une à Pact, deux autres à
Chatte. Un temple lui était peut-être consacré à Grenoble même, place Notre
Dame ou rue Brocherie. Mars, qui est connu par deux inscriptions, l’une
découverte en 1777 près de la tour Rabot où un sanctuaire paraît lui avoir été
consacré et l’autre, sans doute la base d’une statue offerte par le préfet
Caper, évergète sur lequel j’aurai l’occasion de revenir.
Les
Mères Augustes et les Mères Nemetiales, divinités tutélaires locales traduisant
le double aspect de la popularité du culte des Mères, remontant peut-être au
vieux fond néolithique du peuplement : un sanctuaire aux Mères a pu
exister sur l’actuelle place Saint André, voire à l’emplacement du groupe
cathédral primitif. Saturne, ensuite : on sait par une inscription
autrefois déposée dans la cour d’une demeure de la rue Bayard que Decimus
Decmanius Caper, sous-préfet de cavalerie, avait, de son vivant, ordonné que
soit élevée une statue à Saturene. L’inscription funéraire de ce personnage
révèle qu’il avait donné 50 000 sesterces pour cette statue et pour celle
consacrée à Mars ainsi que pour « un toit de tuiles de bronze ». Dès
lors, on peut présumer l’existence d’un temple à Saturne dont, selon le
professeur Laronde, « l’aspect exceptionnel… devait trancher sur la
modestie générale des constructions… ». Sa localisation reste toutefois
problématique. Il est à remarquer que l’on ne connaît pas, à ce jour, d’autre
inscription à Saturne en Gaule Narbonnaise et aucun sanctuaire qui aurait pu
lui être consacré. Pourtant, le temple de Saturne de Rome était le plus ancien
des sanctuaires de la capitale de l’Empire, construit dès la période royale et
inauguré dès les premières années de la République (peut-être en 498 avant J.
C.). On sait par ailleurs que ce temple fut intégralement reconstruit à partir
de 42 avant J. C. par Munatius Plancus et, qu’en dernier lieu, il fut restauré
après l’incendie de Carin (283 de notre ère). Allmer pensait que, retiré à
Cularo après sa carrière militaire, Decmanius Caper avait voulu, en choisissant
pour motifs de sa libéralité des statues des deux divinités qui symbolisaient
la guerre et la paix marquer les deux occupations entre lesquelles s’était
partagé le cours de son existence. Mais Pflaum suppose que toutes les divinités
du panthéon romain avaient pu être représentées par cet évergète assez
remarquable dont nous reparlerons encore tout à l’heure.
Le
culte à Diane est limité : trois découvertes dans le département de
l’Isère la concernent : une statuette à Jarcieu, un autel polythéiste à
Agnin et un buste aux Roches de Condrieu. Une inscription de Grenoble la
concerne : elle provient de la rue des Clercs ou de la place Sainte
Claire. Un temple qui aurait pu être situé non loin de la Porte Viennoise est
conjecturé par Prudhomme et par Müller. La même inscription concerne également
les divinités des Empereurs, bien connues dans la cité de Vienne. A cet égard
J. J. A. Pilot, rapportant Barlet, signale le réemploi en 1683, lors de
l’agrandissement de l’église du couvent des Minimes, de trois marbres votifs en
l’honneur de César, d’Auguste et de Trajan dont l’authenticité est par ailleurs
contestée. J’y reviendrai lorsque je parlerai des inscriptions réputées
fausses.
Mercure,
enfin : bien que située depuis toujours à Echirolles une inscription qui
lui est consacré est indissociable de l’histoire de Grenoble. L’inscription
était, sous Chorier, à la porte de l’ancienne église Saint Jacques d’Echirolles
qui passait pour avoir été bâtie des ruines et sur l’emplacement d’un temple
consacré à ce dieu. Mercure est aussi présent à Grenoble même par une statuette
en bronze découverte lors des récentes fouilles de la place Notre Dame. Il est
également identifié à Uriage, la Terrasse, Beaucroissant, Saint Laurent du Pont
et Varces.
Ainsi,
d’une manière générale, huit des douze dieux conseillers, qui avaient leur
statue dorée sur le forum romain au dessus du temple de Saturne, sont
représentés à Grenoble ou dans ses proches environs ce qui est un élément
supplémentaire pour témoigner de l’important degré de romanisation de la ville.
Les
cultes indigènes, plus discrets, ne sont toutefois pas absents. Un autel à la
déesse celtique Viama au Côtes de Sassenage consacré par un dédicant
autochtone, Craxo, les dieux guérisseurs avec les ex-voto de Fontaine, sans
doute à l’origine des pierres ophtalmologiques réputées appartenir aux
Merveilles du Dauphiné. Sucellus, le dieu au maillet, n’est pas oublié :
deux statuettes le représentant auraient été découvertes à Grenoble.
Et
puis, on complètera ce panthéon par la mention de Vulcain, honoré à Uriage, à
Varces, à Bernin et à la Fontaine Ardente, par celle d’Apollon, dont le culte,
peu répandu dans les Alpes, semble avoir existé à Uriage, par Sylvain,
largement honoré chez les Ceutrons mais assez dans la région grenobloise,
hormis à Saint Laurent du Pont et, enfin, par des cultes rarissimes tels celui
de Quirinus connu seulement à Rome et dans quelques rares villes d’Italie et,
seulement, pour ce qui concerne la Narbonnaise, à Saint Laurent du Pont où un
temple lui était consacré ou de Lupercus, le dieu Loup, conjecturé à Saint
Martin de la Cluse. Je n’insisterai pas davantage ici sur les cultes orientaux
dont j’ai déjà brièvement parlé ni du culte solaire « Sol et Luna »
que Placidianus – j’y reviendrai – aurait pu vouloir honorer à Vif au début du
règne d’Aurélien.
b)
venons en aux
inscriptions consacrées aux Empereurs :
Quatre
dédicaces aux Empereurs ont été découvertes à Grenoble. Une inscription à
Antonin dit le Pieux, déjà perdue du temps de Champollion, qui était peut-être
le piédestal d’une statue, les deux inscriptions dédicatoires des portes
Viennoise et Romaine, consacrées à Dioclétien et Maximien et l’importante
inscription à Claude II dit le Gothique qui va nous donner l’occasion de parler
d’un personnage très important dans l’histoire de Grenoble mais fort
méconnu : Julius Placidianus.
Cette
inscription, peut-être piédestal d’une statue à Claude II, trouvée en Mai 1879,
place Lavalette, dans le mur d’enceinte de la citadelle construite par
Lesdiguières, mérite grande attention. Elle indique :
« à
l’empereur César Marcus Aurélius Claudius, pieux, heureux, invincible Auguste,
très grand vainqueur des Germains, grand pontife, dans sa seconde puissance
tribunicienne, consul, père de la patrie, proconsul, les vexillationes, les
adque equites, de même que les praepositi et les ducenari protectores,
cantonnés dans la province de Narbonnaise sous le commandement de Julius
Placidianus, homme perfectissime, préfet des Vigiles, dévoué à la puissance et
à la souveraineté de l’empereur (ont élevé ce monument) ».
Les
« vexillationes » sont, au 3ème siècle, les légionnaires
et les auxiliaires maintenus en réserve dans les villes fortifiées au Nord de
l’Italie, Milan notamment, qui forment les détachements expéditionnaires.
Les
« adque equites » correspondent aux troupes de cavalerie, cependant
que les « praepositi » désignent ici les officiers placés à la tête
des vexillationes et des adque equites. Ce qualificatif s’applique, presque
toujours, au 3ème siècle, aux commandements des détachements
expéditionnaires.
Enfin,
en ce qui concerne les « ducenarii protectores », la CAG traduit par
« ducenaires, gardes du corps cependant qu’Allmer parlait de
« tribuns des cohortes prétoriennes ».
Il
s’agit là, en l’espèce, et le fait est très important, de soldats de la garde
impériale. Pflaum y voit les gardes du corps de Placidianus qu’il qualifie de
« dux ».
Quant
au dernier terme de l’inscription, que la CAG propose de transcrire par
« dévoués à sa divinité et à sa majesté », nous pensons préférable
d’adopter la formulation retenue, rappelant, par ailleurs, qu’une querelle
d’auteurs qui est ancienne mais qui perdure toujours existe sur la question de
savoir s’il convient de traiter le mot « dévoué » au singulier ou au
pluriel.
L’inscription
de Grenoble paraît devoir être située dans le milieu ou avant la fin de l’année
269. En tout état de cause, elle est postérieure au 10 Décembre 268, début de
la seconde puissance tribunicienne de Claude II et antérieure à sa troisième
puissance tribunicienne connue par une inscription de la colonie de Thubursicu
Numidarum (aujourd’hui Khamissa en Algérie) qui le montre également consul pour
la seconde fois. Il n’est plus, dans cette inscription, qualifié de
« Germanico Maximo » mais de « Gothico Maximo », le très
grand gothique, ce qui montre, qu’entre les deux inscriptions avait eu lei la
grande victoire de Naissus, en Mésie Supérieure, où il aurait défait une armée
de Goths composée de « armantorum trecenta viginti milia », trois
cents vingt mille hommes en armes selon l’Histoire Auguste, chiffre étonnant
que reprend pourtant Ammien Marcellin.
Mais
pourquoi une telle inscription, que Chabert considérait comme étant la plus
importante de Grenoble et l’une des plus importantes des Gaules ?
Comme
nous l’avons vu, un significatif corps de troupes – peut-être même une armée –
sous le commandement de Julius Placidianus, préfet des Vigiles de Rome, était
stationné à Grenoble dans le milieu ou vers la fin de l’année 269. On s’est
largement interrogé sur les raisons du séjour à Grenoble de ce corps
expéditionnaire d’élite, composé de soldats pris dans la propre garde
impériale. Il faut, à cet égard, se souvenir qu’à cette période Autun se
révolte contre les usurpateurs du pouvoir et appelle Claude II à son secours.
Celui ci, qui lutte alors contre les Goths, ne peut venir en personne à l’aide
de l’emblématique capitale des Eduens mais, soucieux de reprendre le contrôle
de la Gaule, envoie alors, semble t-il, Julius Placidianus, son préfet des
Vigiles avec une petite armée.
Le
contexte de l’époque était en effet relativement compliqué.
Au
moment de l’accession à l’empire de Claude II, en Mars 268, l’unité romaine
était rompue depuis 259, époque où Postumus, commandant du front rhénan, avait
été proclamé empereur par ses troupes. De l’avis des historiens, cet acte
n’avait d’ailleurs pas, fatalement, une volonté de sécession. Il s’agissait non
de constituer un « empire gaulois » mais bien un « empire romain
des Gaules », d’assurer sa défense contre les barbares et, par là, de
sauver le monde romain. Le professeur Laronde a rappelé cet état de fait il y a
quinze jours.
Postumus
régna sagement et habilement jusqu’en 267 ou 268, époque où il fut assassiné
par ses propres troupes. De cet événement naquit en Gaule une période de guerre
civile qui incita, semble t-il, l’Espagne et la Narbonnaise à reconnaître
Claude II, plutôt que Laetianus et Victorinus, les pâles successeurs de
Postumus. C’est dans ces conditions qu’Autun, se refusant à faire allégeance à
Victorinus, appelle Claude II à son secours. Fort occupé par les Goths qu’il
veut vaincre définitivement et préoccupé par la sécession palmyrénienne, celui
ci envoie Placidianus.
Certains
auteurs vont même jusqu’à penser qu’il aurait pu confier à ce grand personnage,
totalement fidèle à sa personne, la responsabilité de l’ensemble des provinces
Européennes. D’autres, nous l’avons dit, lui confèrent le titre de
« dux ».
Les
troupes de Placidianus sont à Grenoble, lorsqu’elles apprennent les succès de
Claude et celui ci fait alors graver la dédicace qui a été conservée.
On
ignore les raisons qui empêchent alors Placidianus de secourir Autun qui, après
un siège de sept mois disent les « Panegyrici » tombe aux mains de
Victorinus qui procède à une sanglante vengeance.
On
en sait pas si cet événement dramatique est survenu alors que Placidianus était
en marche ou si, délibérément, il avait cantonné son armée à Cularo dès le
début du siège d’Autun : attente de renforts ? de l’empereur lui
même ? tactique d’observation ?
Les
historiens ne savent pas expliquer les raisons de l’attitude de Placidianus.
Sans doute répondait-elle à de sérieux mobiles, car il est tout à fait établi
que Placidianus et son armée ont séjourné longuement dans la région grenobloise
au sein de cette province Narbonnaise, toute acquise au pouvoir de Rome.
En
effet on sait que Placidianus, très postérieurement à son arrivée à Cularo et à
la dédicace consacrée à Claude, était encore sur place : le prouve une
seconde inscription, aujourd’hui encastrée dans le clocher de l’église Saint
Jean Baptiste de Vif ainsi libellée :
« aux
feux éternels, Julius Placidianus, clarissime, préfet du prétoire, a élevé (cet
autel) à la suite d’un vœu ». On s’est longuement interrogé sur ces
« feux éternels » : sont-ils ceux de la Fontaine Ardente proche
ou l’allusion au culte solaire dont Aurélien avait fait l’un des éléments fondamentaux
de sa réforme religieuse ?
J’ai
longuement discuté cette problématique dans une étude spécifique et il ne me
paraît être nécessaire d’y revenir ici. Mais l’intérêt majeur de cette
inscription, pour ce qui nous intéresse, est que Julius Placidianus y apparaît
comme préfet du prétoire, la préfecture la plus élevée de l’empire en cette
seconde moitié du 3ème siècle, faisant de son titulaire un quasi
vice empereur.
Quand
Placidianus fut-il élevé à cette dignité ? Peut-être à l’extrême fin du
règne de Claude II ou, plus probablement, au début de celui d’Aurélien. Les
auteurs ne sont toutefois pas d’accord pour fixer la date de la mort de Claude
II : extrême fin 269, début 270 ou encore le 26 Août, voire le 6 Septembre
270. Il en découle une incertitude de même nature à propos du début du règne
d’Aurélien : extrême fin 269 ou fin 270. L’inscription de Vif se situe
donc à une date comprise entre mi 270 pour la période la plus précoce et 272
pour la période la plus tardive. Celle ci ne fait aucun doute puisque l’on
sait, par ailleurs, que dès le 1er Janvier 273 Placidianus était
devenu consul ordinaire. Son séjour à Grenoble aurait donc duré du début du
siège d’Autun (fin 269) jusqu’à fin 270 pour l’amplitude la plus courte, ou
jusqu’à fin 272 pour l’amplitude la plus longue, soit entre un et trois ans ce
qui, dans les deux cas, est considérable.
Cela
montre toutefois – et trop peu d’auteurs l’ont jusqu’alors relevé – que Cularo
devait disposer d’infrastructures suffisamment importantes pour accueillir aussi
longtemps un tel personnage et son armée. C. Jullian y voyait le lieu de
concentration des armées pour surveiller et menacer les empereurs des Gaules et
E. Cisek a conjecturé que Placidianus était originaire de Narbonnaise et qu’il
y jouissait d’une notable réputation : ceci pouvant en effet expliquer le
choix de Grenoble.
Mais
à quoi une telle armée a t-elle pu être occupée ?
Certains
auteurs, limités il est vrai mais dont je fais partie, pensent que Placidianus
aurait profité de ce long séjour d’attente pour commencer, dès 269, la
fortification de Grenoble : ceci est loin d’être improbable quand on sait
qu’une pièce de monnaie de Claude II a été retrouvée dans les substructions de
l’enceinte.
Par
ailleurs, le nombre important de monnaies de Claude II et d’Aurélien trouvées à
Grenoble ou dans les proches environs (Vif, Saint Martin le Vinoux, le
Fontanil, Veurey, Brézins…) atteste également des évènements importants dont
Grenoble fut témoin à la charnière des règnes de Claude II et d’Aurélien.
On
ne sait malheureusement rien de Placidianus postérieurement à ces évènements
sauf qu’il devint consul ordinaire en 273 en compagnie d’Aulus Tacitus.
Peut-être suivit-il Aurélien lors du semblant de campagne menée contre
Tétricus ? Peut-être retourna t-il à Rome siéger au Sénat auquel il avait
accédé lors de sa désignation comme préfet du prétoire comme le mentionne
l’inscription de Vif ?
On
ne le sait car ce personnage, pourtant considérable, n’est pas autrement connu
que par les deux inscriptions de Grenoble et de Vif et les Fastes consulaires.
Mais
Grenoble lui doit peut-être l’initialisation de son enceinte et, partant de là,
le statut de civitas dont la dotera quelques années plus tard la Tétrarchie.
1ère
série de projections
Transparents :
1
– Maïa : plaque en bronze trouvée en 1896, 3 Place Sainte Claire. « A
Maïa, Caius Attius Atticus a accompli son vœu comme il l’avait promis ».
Les Attii son très connus à Vienne et à Grenoble et on rapprochera leur
patronyme du pagus Attius.
2
– Vulcain : marteaux votifs d’Uriage
3
– prêtre d’Isis ? contrepoids de balance découvert anciennement à Saint
Georges de Commiers
4
– autel à Mars : « à Mars, Decimus Decmanius Caper a ordonné par
testament que ce monument soit élevé
5
– la porte Romaine, d’après le manuscrit de Barlet, à la gloire de Dioclétien
Jupiter
6
– la porte Viennoise, d’après le même manuscrit, à la gloire de Maximein
Hercule
7
– côte à côte, les deux empereurs de 268, Claude II l’empereur officiel et
Postumus, l’usurpateur
8
– l’inscription de Vif : « aux feux éternels, Julius Placidianus,
clarissime, préfet du prétoire, a élevé cet autel à la suite d’un vœu.
Diapositives :
1
– autel aux Mères Augustes découvert en 1863 sous la nef de la cathédrale Notre
Dame (couloir de la chapelle, M. D.), consacré aux Mères Augustes par Titus
Cassius Eros, personnage que l’on trouve aussi à Seyssuel sur une dédicace à
Junon.
2
– autel à Saturne, découvert rue Bayard (cloître du M. D.) : « à
Saturne, Decimus Decmanius Caper a ordonné par testament que ce monument soit
élevé.
3
– selon le testament de Caper, cet autel, comme celui de Mars, était surmonté
d’une statue. On en voit encore les trous de fixation.
4
– sur la vue d’artiste publiée par Vernet dans son « histoire populaire de
Grenoble » on relèvera l’emplacement supposé de deux temples.
5
- En ce qui concerne la figuration du temple situé à côté de la Porte Viennoise
on peut penser à Mars. Mais certains y voyaient un temple à Diane.
6
– et là, peut-être, le temple à Saturne « au toit couvert de tuiles de
bronze ».
7
– ici, le marteau votif de Rochefort qui pourrait témoigner d’un culte à
Vulcain.
8
– et l’autel à Mercure, situé de temps immémorial à Echirolles.
9
– ce qui subsiste de la citadelle de Lesdiguières, place Lavalette, dans les
murs de laquelle fut trouvée, en 1879, la grande inscription consacrée à Claude
le Gothique par Placidianus.
10
– et l’inscription de Vif consacrée aux feux éternels par le même personnage.
11
– la Porte Romaine, enfin, telle que présentée au Musée des fortifications selon
le célèbre cliché de Ferrand à la BMG.
c)
en ce qui
concerne les inscriptions relatives à des militaires
je
passerai plus vite sur les quatre inscriptions que comporte cette
catégorie :
-
un vétéran de la
3ème légion Gallica qui, après avoir fait la guerre sur les bords du
Rhin et en Syrie obtint d’importantes récompenses militaires de l’empereur
Hadrien, entre 132 et 135 et se retira à Cularo où étaient, sinon ses origines
du moins ses attaches familiales.
-
Un tribun de
légion, c’est à dire le commandant d’une numeri de 1000 hommes, nommé Pompeius
Pollion
-
Un centurion de
la 1ère légion Germanica, entré dans l’armée comme
« aquilifer » ou porte enseigne
-
Et enfin, un sous
préfet de cavalerie que nous avons déjà rencontré à propos des dédicaces à
Saturne et à Mars, Decimus Decmanius Caper, qui est donc cité trois fois dans
l’épigraphie de Grenoble. Son inscription funéraire est particulièrement
intéressante : « à Decimus Decmanius Caper, sous préfet de cavalerie
de l’Ala Agrippiana, qui adonné, par testament 50 000 sesterces pour des
statues de Mars et de Saturne en bronze et un toit de tuiles en bronze destiné
à l’ornement… ».
Le
leg ainsi fait est relativement important : environ
Enfin,
en ce qui concerne le présumé toit de tuiles en bronze, il y a lieu de noter
qu’une inscription de même époque (1er siècle) trouvée à Vienne,
fait mention d’une flaminique qui a également donné de ses deniers les
« tuiles en bronze doré de la toiture d’un temple ».
d)
pour ce qui
est des inscriptions relatives à des fonctions municipales,
on
distinguera les fonctions liées aux cultes de celles liées à l’administration
de la cité.
En
ce qui concerne les fonctions liées aux cultes, le plus haut magistrat est le
flamine du culte impérial, desservant du culte romain sous la direction d’un
flamine provincial dont la circonscription comprenait toute la Province.
Souvent perpétuels, les flamines du culte impérial étaient recrutés parmi des
citoyens ayant rempli précédemment des fonctions municipales. C’est le cas
d’une inscription de Grenoble, aujourd’hui fragmentaire. Si le flaminat du
culte impérial est très fréquent en Gaule, il n’en va pas de même du flaminat
attaché à une divinité qui n’apparaît que dans quelques cité et se rapporte
toujours à Mars. C’est le cas à Grenoble de la très belle inscription de
Caprilio Antullo, antérieure à 70. En outre, dans la seule cité de Vienne, se
rencontrent, à côté des flamines de Mars, des flamines de la Jeunesse :
deux inscriptions de ce type ont été découvertes à Grenoble.
Le
rôle des flaminiques est mal connu : épouses des flamines, les assistant
dans leur charge ou prêtresses des cultes ordinaires ? deux inscriptions
également pour Grenoble.
Enfin,
les sévirs augustaux, membres d’un collège de six membres sont pris parmi les
affranchis ou les gens de la plèbe et nommés par les décurions de la cité. La
célébration du culte impérial fut, à Grenoble, le fait d’un nombre appréciable
de sévirs augustaux issus, pour l’essentiel, d’un milieu d’affranchis. Ainsi
pourrait-on citer Quintus Vettius Epictetus, affranchi de Nobilis.
En
ce qui concerne les fonctions liées à l’administration locale on sait que dès
qu’elle devint colonie romaine, la cité de Vienne fut administrée à l’image de
Rome. Al’origine, la magistrature suprême était assurée par quatre magistrats,
les quattuovirs, remplacés à la fin du règne de Tibère ou de Caligula par les
duumvirs, l’un chargé des finances (aerarius) l’autre de la justice (juredicundo).
La
magistrature inférieure comprend l’édilité et la questure. Très importante à
l’origine de Rome, la magistrature des Aedilis vit, avec l’empire, son rôle et
ses fonctions considérablement diminués pour se réduire à la police des
marchés, de la ville, à l’entretien et aux travaux. Enfin, les questeurs
étaient chargés de la gestion des finances locales. Par ailleurs un conseil de
décurions l’ « ordo decurionum » est connu dans de nombreuses
cités de Narbonnaise : Apt, Arles, Béziers, Fréjus, Orange, Riez, Vaison,
Valence… Trois décurions sont connus à Grenoble. La cité de Vienne avait
également sa curie, composée de cent membres choisis parmi les riches citoyens
et nommés pour cinq ans. C’est parmi eux qu’étaient désignés les magistrats
municipaux : questeurs, édiles, duumvirs…
Tout
ceci est certes un peu technique, veuillez m’en excuser, mais fournit une
preuve supplémentaire de l’importance relative de Grenoble car on y trouve
mention d’au moins quinze magistrats ainsi qu’un préfet de pagus, subdivision
territoriale de la civitas, peut être le pagus At…ius, mais l’inscription est
incomplète. Selon le professeur Laronde, cette importance de Grenoble est
confirmée par le fait que Cularo fournit à Vienne 12 % des magistrats de la
cité, chiffre comparable à celui du vicus de Genève, les deux vici n’étant
devancés que par Vienne qui fournit, à elle seule 34 %. On arriverait du reste
à des résultats sensiblement équivalents en ce qui concerne les sacerdoces.
e)
l’administration
publique de l’état
va
nous permettre maintenant l’important problème de la Quadragesima Galliarum ou
impôt du 40ème des Gaules. Deux inscriptions de Grenoble, et
peut-être même trois, s’y rapportent. La première, la plus connue, est
aujourd’hui exposée au Musée de l’ancien évêché ; il s’agit de
l’inscription dite de Gaius Sollius Marculus ainsi rédigée :
« aux
dieux manes, Gaius Sollius Marculus, receveur du quarantième des Gaules à la
station de Cularo. Il est mort à 26 ans. Gaius Sollius Marcus, son père, à son
fils si affectionné, Attia Marciana et Marcula, ses sœurs, à leur frère très
affectionné et Attia Aurelia à son mari incomparable, ont dédié (ce monument)
sous l’ascia ». Ce receveur du « quarantième des Gaules » porte
le titre original de « librarius » qui n’est connu que par une autre
inscription, également de Grenoble, aujourd’hui perdue : celle de Publius
Primitivus, un affranchi, également qualifié du titre de
« librarius », que Camille Jullian traduisait par « teneur de
livre » et Allmer par « comptable ». La traduction par
« receveur » paraît la plus appropriée.
L’inscription
de Sollius Marcullus est aujourd’hui le seul témoignage conservé de
l’identification certaine de Grenoble avec Cularo. Sa datation est difficile et
l’on proposera une large fourchette : entre 161 au plus tôt et 212 au plus
tard. Mais arrêtons nous un peu sur la nature et le fonctionnement du
quarantième des Gaules.
Le
territoire de l’empire romain était divisé en un certain nombre de grandes
circonscriptions douanières englobant souvent plusieurs provinces. Sous le haut
empire, la Gaule, la Germanie et les Alpes forment la circonscription du
quarantième des Gaules encerclée par un véritable cordon douanier. L'impôt du
quarantième frappait de 2,5 % toutes les marchandises, sauf les bagages
personnels, en provenance ou à destination de la Gaule. Ces précisions sont
données dans les « Déclamations » de Quintilien : « à part
les bagages pour le voyage, toutes les marchandises sont soumises au
quarantième, à verser à l’agent préposé à cet impôt ; l’agent a le droit
de fouiller et les marchandises non déclarées seront confisquées mais il n’est
pas permis de toucher une matrone… ». Le quarantième des Gaules semble
avoir remplacé dans les Alpes un ancien droit de portage : le portorium.
Avant l’administration romaine, là où la topographie redait malaisé le
transport des marchandises, la population gauloise se réservait le droit de
l’assurer contre rétribution. Avec la construction des routes par les Romains,
le « portorium » paraît avoir été remplacé par le quarantième des
Gaules, contrepartie alors à un avantage fourni par l’état. Sur la voie du
Montgenèvre, deux bureaux du quarantième sont attestés : l’un en vallée de
Suse, à Avigliana, à la limite du royaume de Cottius et de l’Italie proprement
dite, l’autre à Grenoble, attestée par les deux inscriptions évoquées. Il y
avait donc sur cette importante route un double contrôle.
Outre
Grenoble et Avigliana où plusieurs documents épigraphiques attestant de
l’importance de la station douanière ont été retrouvés ainsi que le tabularium situé dans les bâtiments de
la statio exhumés par les fouilles, diverses stations de la Quadragesima
Galliarum sont également connues dans les Alpes et, notamment, à Bourg Saint
Dalmas près de Coni, à Susa, à Saint Maurice en Valais, à Tournon près
d’Albertville et à Genève. Ceci montre que les stations du Quarantième des
Gaules ne jalonnaient pas systématiquement les frontières des districts ou des
provinces : les postes de douane se trouvaient, en fait, situés au pied
des Alpes, souvent au carrefour des vallées, ce qui est particulièrement le cas
pour la basse Isère. Enfin, en direction du Sud, l’agglomération secondaire de
l’Achard sur Varces, fouillée en sauvetage en 1994-1995, assurait peut-être,
elle aussi un rôle de station douanière à la sortie du territoire des
Allobroges.
f)
les autres inscriptions funéraires
On l’a
vu, l’essentiel des documents épigraphiques sont des autels funéraires mais le
plus grand nombre concerne de modestes citoyens de Cularo qui n’étaient ni
militaires, ni prêtres, ni édiles, ni fonctionnaires.
C’est
ainsi que l’on trouve parés de ce seul titre des « époux
remarquables », des « épouses vertueuses », des « parents
si affectionnés » ou encore des enfants prématurément décédés tels ce
« Caius Innocentius » à l’âge de 6 ans, 9 mois et 16 jours que pleure
sa mère.
La
plupart des noms, je l’ai déjà signalé, sont romains. Quelques rares exceptions
méritent toutefois d’être relevées ; ainsi, Bitunia Titiola et Bitugia
Modestina qui sont probablement d’anciens patronymes gaulois cependant que
d’autres traduisent des ascendances grecques tels Eudrepites, Eudaemon,
Threpte…
Au
delà des termes très conventionnels, on peut noter que la formule « Dis Manibus » est extrêmement présente : on la trouve
28 fois. Sa perdurance est d’ailleurs remarquable car
l’une des inscriptions paléochrétiennes du site funéraire de Saint Laurent,
datée du 5ème siècle, commence encore par l’invocation aux Dieux Manes même si celle ci, très curieusement, encadre une
colombe.
2ème
série de projections
transparents :
1
– l’une des plus belles inscriptions de Grenoble, en belles lettres du 1er
siècle (M. D.) « à Aulus Caprilius
Antullus, flamine de Mars, Primulus,
son affranchi, à son patron »
2
– l’inscription du sarcophage de Sextus Julius Condianus, flamine de la jeunesse, découverte en 1804 dans
la porte Viennoise et conservée au M. D.
3
– l’autel funéraire de Nammia Saturnina
et de Taurus, élevé par leurs enfants, trouvé à la porte Romaine. On
remarquera, en bas et à droite, l’ascia.
4
– autre autel de même type élevé par des enfants à leurs parents
5
– l’inscription émouvante à la mémoire éternelle de Caius Innocentius
Siconius, décédé à l’âge de 6 ans, 9 mois et 16 jours
dont j’ai parlé il y a quelques instants
6
– enfin, parmi tant d’inscriptions, celle à la mémoire éternelle de Gnatia Verunila, Militius Titullinus à son épouse
très chère. Le monument est à la fois placé sous la protectiondes
Dieux Manes et de l’ascia : c’est peut-être pour
cela qu’il nous a été conservé.
Diapositives :
1
– nous avons tout à l’heure parlé d’un centurion. Voilà à quoi pouvait
ressembler Sextus Sammius Severus, coiffé du casque et de la cuirasse d’apparat dans
une reconstitution de la XX° légion, la Valeria Victrix du milieu du 1er siècle, par l’Ermine Street Guard
2
– toujours dans le même cadre de reconstitution, un porte enseigne et un
légionnaire
3
– là enfin, à la fois le centurion, le porte enseigne et les vétérans
4
– la grande inscription d’un magistrat : « aux Dieux Manes, Sextus Attius
Atticus qui a rempli toutes les fonctions (dans sa
cité), Sextus Attius Atticus, son fils, a élevé ce monument.
5
– une autre vue de cette dédicace de la fin du 1er siècle ou du
début du 2ème siècle, visible dans le cloître du M. D.
6
– toujours pour la magistrature civile, l’inscription de Caius Coetius Lucinius, décurion,
dédiée par Sextia Threpte à
son époux très cher (cloître du M. D.)
7
– l’inscription visible rue Saint Laurent : « aux Dieux Manes de Veratia Lucina, fille de
Lucius.
8
– la belle inscription funéraire : « aux D. M. de Sextus
Vinicius Julianus, décédé à
Rome, Vinicia Vera à son père si affectionné »
9
– comme rien n’indique un transfert à Cularo des
cendres du défunt, il s’agit peut-être d’un cénotaphe, le seul en ce cas connu
à Grenoble.
10
– on remarquera, dans le fronton, la représentation d’un disque et de l’ascia
(cloître du M. D.)
11
– Enfin, la plus connue des inscriptions romaines de Grenoble, celle de Gaius Sollius Marculus, receveur du 40ème
des Gaules
12
– sur laquelle, à la fin de la 4ème ligne et au début de la 5ème,
apparaît le nom de Cularo
f)
quelques mots,
enfin, sur les inscriptions réputées fausses
Je
ne reviendrai pas sur l’inscription dite du « Divin Gratien », dont
j’ai parlé lors de la première conférence, pas davantage que j’insisterai sur
la pseudo inscription des pontonniers de Cularo que
Paul Féchoz, de l’Académie Delphinale,
disait avoir vue à Grésy en Savoie. Je préfère
attirer l’attention sur les trois inscriptions impériales que Barlet avait notées mais qui étaient déjà perdues du temps
d’Allard qui en fait la relation suivante : « … Il nous reste peu des
inscriptions que je veux rendre publiques. Jean de Saint Marcel d’Avançon,
avocat général en ce parlement, avait eu le soin de faire porter dans la maison
qu’il avait en cette ville, les pierres ou plusieurs estoient
gravées ; cette maison ayant été acquise par les pères Minimes ils n’en
ont pas connu le prix car ils les ont fait ensevelir dans les fondations de
leur église. N’est-ce pas une espèce de barbarie ou si l’on veut d’une crasse
ignorance ! Quel outrage à la sacrée antiquité et quelle injure à la
curiosité des savants qui doivent encore une grande obligation aux recherches
de Barlet… »
Ces
inscriptions sont-elles sous le couvent des Minimes fondé en 1613 dans la rue
du même nom ? S’agit-il d’inscriptions controuvées ou, au contraire,
d’inscriptions provenant d’un culte impérial ? Aucune indication ne permet
aujourd’hui d’incliner vers l’une ou l’autre de ces hypothèses. Seules des fouilles
sous l’ancien couvent permettraient peut-être d’être fixés.
Il
y a donc bien là, Mesdames et Messieurs, une épigraphie de tout premier ordre,
comme nous avons pu le voir, tant par le nombre et la diversité des
inscriptions que par l’exceptionnel degré de romanisation et dont Grenoble
devrait s’enorgueillir.
Et
pourtant, 105 inscriptions pour plus de trois siècles de civilisation, c’est
fort peu dans l’absolu ; la validité statistique de cet ensemble pose un
problème qui n’est, du reste, pas spécifique à Grenoble.
Les
14 000 inscriptions connues pour les Gaules et les Germanies,
recouvrant nos trois premiers siècles ne correspondent, somme toute, qu’à
environ 1500 inscriptions par génération pour un territoire beaucoup plus vaste
que la France actuelle. A ce titre Grenoble serait pourtant mieux située que
les grandes capitales romaines que sont
Lyon, Trêves, Arles ou encore Bordeaux.
En
effet, si l’on reprend l’estimation suggérée le 22 Janvier dernier par le
Professeur Laronde d’une population moyenne de 1500
habitants à Cularo et que l’on considère – tout cela
restant, bien sur, très approximatif – qu’il y a eu entre trois et quatre
générations par siècle en moyenne, on arrive, pour Grenoble, à un
échantillonnage légèrement supérieur à 1 % ce qui est très peu statistiquement
parlant mais néanmoins considérable à l’échelle de la Gaule et des Germanies pour lesquelles le même calcul grossier aboutit à
un chiffre compris entre 0,03 et 0,04 %, soit vingt cinq fois moins que pour
Grenoble. Mais ces chiffres sont très relatifs et, en l’absence de toute
véritable étude comparative, on se gardera bien d’en tirer les moindres
conclusions.
Je
terminerai brièvement cette conférence par quelques réflexions sur la vie et
les mœurs des Cularonenses :
J’aimerai
pouvoir dire beaucoup plus que je ne l’ai fait sur ces premiers grenoblois qui
avaient noms Aelius, Antonius,
Cassius, Coetius, Larinius,
Scribonius et autres Clemens, Fronto,
Lebeo ou Pollio. Je n’aurai
garde d’oublier leurs compagnes, très nombreuses aussi dans l’épigraphie, bien
que la parité, dans les temps qui nous occupent n’ait jamais été, si peu que ce
soit, un soucis. Elles avaient noms Aélia Italica, Appronia Cassata, Devillia Titiola, Gratia Gratinae, Prima Valeria, Vinicia Vera…
Même
si leurs épitaphes continuent, dix huit siècles plus tard, à nous chanter leurs
louanges, que savons nous réellement de leurs conditions d’existence ?
Sans doute les plus fortunés d’entre eux vivaient-ils, à l’encontre de tous les
clichés jusqu’alors reçus, dans de fort riches demeures : il suffira de
rappeler la « maison aux fresques » dans l’îlot de l’ancienne halle,
les mosaïques, les enduits peints dont certains de style pompéien, la grande
villa suburbaine de Saint Martin le Vinoux, le marbre
blanc, le marbre vert, les bijoux en or et en argent…
Certes,
n’ont malheureusement pas été retrouvés les bâtiments publics, notamment les
thermes et, peut-être, l’édifice de spectacle que toute cité romaine a du
posséder. Sans nul doute ont-ils existé à Grenoble mais en découvrirons nous
jamais les traces ?
Quant
à leur alimentation, jamais aucune étude spécifique n’a été entreprise sur ce
sujet particulier. Et pourtant, celle ci se laisse néanmoins deviner par les
ossements ou autres restes découverts dans les dépotoirs : fortement
carnée, elle était à base de bœuf, de cheval, de mouton, de chèvre et de porc
mais faisait aussi sa place aux produits de la chasse comme le lièvre, le cerf
et le sanglier. Des os de gallinacés et de petits oiseaux ont également été
trouvés. Plus surprenants sont des fragments de carapaces de tortues et de
nombreuses coquilles d’huîtres en plusieurs points et notamment rue Président
Carnot. Il semble donc que celles ci aient été appréciées, nonobstant les
difficultés que devaient engendrer un tel approvisionnement et son coût de
possession.
Enfin,
les nombreuses amphores retrouvées montrent que le vin, notamment
d’importation, n’était pas absent de l’alimentation de nos lointains
prédécesseurs.
Bien
que dans mon livre je me sois quelque peu hasardé à imaginer, à différentes
périodes, ce qu’avaient pu être les repas des Cularonenses,
je me garderai bien de réitérer ici cet exercice de style un peu hasardeux.
C’est
pourquoi, si vous le voulez bien, c’est sur la seule évocation de ces agapes
antiques que je vous proposerais, Mesdames et Messieurs, de clore cette seconde
conférence.