A la recherche de Placidianus
Article publié dans le bulletin n° 9
des AVG de juin 1982 et revu et complété en décembre 2008
Julius Placidianus
a attaché perpétuellement son nom à VIF, sans doute un jour de l’an 271 de
notre ère (1) où il fit édifier un autel qui a été conservé depuis lors.
Depuis la fin du 17ème siècle,
époque de la reconstruction du clocher de Vif, cet autel est encastré dans la
façade orientale du clocher de telle sorte que les lignes sont placées
verticalement ; un crampon, fixé entre la quatrième et la cinquième ligne
l’a nettement endommagé et la hauteur de l’encastrement, par rapport au sol en
rend difficile la vision exacte. L’inscription (2) que nombre de générations de
vifois ont pu voir sans pour autant sans doute en
comprendre le sens et qui figure dans les principaux ouvrages d’épigraphie
romaine est la suivante :
IGNIBUS
AETERNIS
IVL
PLACIDIANVS
VC
PRAEF PRAE
TORI
EX
VOTO POSVIT
Littéralement « Ignibus
Aeternis Julius Placiadianus
vir clarissimus praefectus praetori ex voto posuit ».
La traduction couramment admise (3) est la
suivante : « Aux feux éternels, Julius Placidianus
homme consulaire, préfet du prétoire a élevé (cet autel) d’après un vœu ».
Il faut néanmoins noter certaines divergences
d’appréciation quant à la traduction littérale des lettres « V C »,
certains exégètes proposant l’expression « vir consularis », homme consulaire, d’autres celle de
« vir clarissimus »,
personnage clarissime, c'est-à-dire de l’ordre sénatorial (4) ou tout simplement
sénateur (5) selon une formule usuelle depuis Marc Aurèle (6). On notera que
cette expression se retrouve également dans l’inscription dite de Valerianus du troisième quart du 6ème siècle
conservée dans la sacristie de l’église de Vif (7)
Le deuxième titre du personnage, préfet du
prétoire, qui n’est pas sujet à interprétation, est beaucoup plus intéressant.
J’y reviendrai un peu plus tard.
(1)
tout
au moins dans la première partie du règne d’Aurélien et avant 273 (infra)
(2)
classée
monument historique au titre des objets mobiliers le 30 septembre 1911
(3)
J.
J. A. PILOT : note sur une inscription gallo romaine gravée sur une pierre
du clocher de Vif, BSSI, 1860, pages 366 à 368 ; F. VALLENTIN :
l’inscription de Vif, bulletin de l’Académie delphinale,
1876, pages 236 et 237 ; CIL XII n° 1551 (1888)…
(4)
ALLMER
et TERREBASSE : 3ème supplément aux inscriptions antiques et du
moyen âge de Vienne, n° 2069 (1880) ; CAG 38/1, 1994, page 155
(5)
MERCIER
et SEGUIN : l’épigraphie et les fontaines ardentes du Dauphiné (1938)
(6)
R.
CAGNAT : cours d’épigraphie latine (1926)
(7)
R.
GIRARD : rapport sur les fouilles exécutées en 1966 près de l’église de
Vif (CAHMGI) ; M. F BOIS : écoutons parler nos pierres, bulletin des
AVG n° 5, juin 1980 ; E. CHATEL : monuments sculptés en France (IV° -
X° siècles), II, 1980, pages 100 et 101
Certes, l’inscription de Vif n’est pas datée
mais une autre inscription, découverte en mai 1879 place Lavalette à Grenoble
dans l’un des murs de l’enceinte de Lesdiguières fait mention de ce même Julius
Placidianus et permet, par recoupement, de situer la
date d’érection de l’autel de Vif.
Cette seconde inscription faisait
vraisemblablement partie d’une statue élevée à Grenoble en l’honneur de
l’empereur Claude II, surnommé « le Gothique » en référence à ses victoires
remportées sur les Goths. Cette dédicace, en pierre calcaire de Sassenage,
maintenant conservée au Musée Dauphinois (34.5692) est ainsi rédigée :
IMP
CAESAR
M
AUR CLAVDIO
PIO
FELICI INVICTO
AVG
GERMANICO
MAX
PM TRIB POTES
TATIS
II COS PATRI PA
TRIAE
PROC VEXIL
LATIONES
ADQVE
EQVITES
ITEMQVE
PRAEPOSITI
ET DVCE
NAR
PROTECT TEN
DENTES
IN NARB
PROV
SVB CVRA IVL
PLACIDIANI
V P PRAE
FECT
VIGIL DEVOTI
NUMINI
MAIESTA
TIQ
EIVS
Soit, en développé : « Imp(eratori) Caesar(i) / M(arco) Aur(elio) Claudio / pio felici invicto :
Aug(usto) Germanico / Max(imo) trib(uniciae) potes / tatis iterun co(n)s(ulli) patri pa / triae proc(onsuli) vexil / lationes adque / equites itemque / praepositi et duce / nar(ii) protect(ores) ten / dentes in Narb(onensi) / Prov(incia) subcurra Iul(ius) / Placidiani(us) v(iri) p(erfectissimi) prae / fect(i) vigil(um) devoti / numini maiesta / tiq(ue)
eius ».
« A l’empereur César Marcus Aurelius Claudius, pieux, heureux, invincible auguste, très
grand vainqueur des Germains, grand pontife, dans sa seconde puissance
tribunicienne, consul, père de la patrie, proconsul, les « vexillationes », les « adque
equites », de même que les « praepositi » et les « ducenarii
protectores » cantonnés dans le Province de
Narbonnaise sous le commandement de Julius Placidianus,
homme perfectissime, préfet des Vigiles (de la ville de Rome), dévoué(s) à la
puissance et à la souveraineté de l’empereur (ont élevé ce monument) » (8)
(8) l’Impartial des Alpes du 2 août
1879 ; F. VALLENTIN : l’inscription de Grenoble, Bulletin Monumental
T 45, 1879, page 120 ; Revue anthropologique T 38, 1879, page 120 ;
Congrès archéologique de France, 66ème session, 1879, pages 323 à
332 ; E. PILOT de THOREY : inscription découverte à Grenoble à
Certains termes de l’inscription méritent
d’être explicités :
Les « vexillationes »
sont, au 3ème siècle, les légionnaires et les auxiliaires maintenus
en réserve dans les villes fortifiées au nord de l’Italie (Milan notamment) qui
forment les détachements expéditionnaires.
Les « adque equites » correspondent aux troupes de cavalerie,
cependant que les « praepositi » désignent
ici les officiers placés à la tête des vexillationes
et des adque equites. Ce
qualificatif s’applique presque toujours, à cette époque, aux commandants des
détachements expéditionnaires.
Enfin, en ce qui concerne les « ducenarii protectores »,
Il s’agit là, en l’espèce, de soldats de la
garde impériale. FLAUM y voit les gardes du corps de Placidianus
qu’il qualifie de « dux » c'est-à-dire duc
(9).
Cette inscription est extrêmement
intéressante à divers titres. D’abord elle présente l’intérêt particulier de
pouvoir être datée de l’année 269 et, précisément avant le 10 décembre qui
marque la fin de la seconde puissance tribunicienne de l’empereur Claude II.
Celui-ci est en effet surnommé « Germanicus Maximus »
en souvenir sans doute de sa victoire de 268 sur les Alamans. Ensuite elle fait
connaître d’une manière certaine que dès le temps de Claude II une partie de
Mais que faisait donc ce personnage important
à Grenoble ? Il faut se souvenir qu’au
moment de la nomination de Claude II comme empereur en mars 268, peu
après la mort de Gallien, l’unité de l’empire romain était rompue depuis neuf
ans.
C’était en 259 en effet qu’un officier responsable
du front rhénan, Postumus, avait été proclamé empereur par ses troupes. Cette
proclamation n’avait d’ailleurs pas fatalement, de l’avis des historiens, une
volonté de sécession. Il s’agissait non de constituer un empire gaulois mais
bien un « empire romain des Gaules », d’assumer sa défense contre les
barbares et, par là, de sauver le monde romain (11)
(9)
H.
G. PFAULM : les fastes de la province narbonnaise, 30ème
supplément à GALLIA, pages 191 à 193 (1978)
(10)
S.
CHABERT : op. cit. « … il est remarquable qu’on ait détaché des
troupes d’infanterie et de cavalerie appartenant à la garnison de Rome comme
l’indiquent leurs dénominations ».
(11) E.
THEVENOT : les gallo romains (1948)
Postumus régna,
sagement et habillement, jusqu’en 267 ou 268 époque où il fut assassiné par ses
propres troupes. De cet évènement naquit en Gaule une période de guerre civile
qui incita, semble t-il, l’Espagne et
Placidianus, qui était donc déjà
un personnage très important dans la hiérarchie romaine, ne parait pas être
originaire de Gaule ni avoir accompli l’essentiel de sa carrière dans cette
contrée (15). En effet, l’épigraphie romaine ne permet pas de le retrouver
antérieurement dans d’autres inscriptions que les deux précédemment citées. Le
texte de Grenoble le qualifie de « vir perfectissimus », littéralement « grand
personnage ou préfet », titre d’honneur attribué comme attribut officiel
depuis Septime Sévère aux fonctionnaires de l’ordre équestre. La préfecture de
Vigiles de Rome, dont Placidianus était alors le
titulaire, avait été instituée ne l’an 7 avant notre ère par Auguste pour veiller
aux incendies et à la police de la capitale de l’empire. Elle disposait de sept
cohortes de vigiles, de mille hommes chacune, placées sous les ordres d’un
préfet de l’ordre équestre. Cette préfecture devint rapidement l’une des plus
élevées car elle n’avait au dessus d’elle que la préfecture de l’Annone,
chargée de l’approvisionnement de Rome et celle d’Egypte (16).
Placidianus était-il de noble
origine ? Il est difficile de le savoir mais, en tout état de cause, rien
ne le démontre, sauf à penser qu’il pouvait descendre de l’illustre « Gens
Iulia », celle de César lui même. En effet, aux premier et second siècles
de notre ère, il fallait pour aborder la carrière équestre posséder une fortune
personnelle et être inscrit sur la liste des chevaliers dressée sous le
contrôle de l’empereur (17). Depuis les Sévères et le milieu du 3ème
siècle (18), l’ordre équestre avait, on le sait, pris le pas sur l’ordre
sénatorial.
Dès Septime Sévère en
effet, la promotion sociale du soldat s’accélère sensiblement. Les gradés
sortis du rang sont alors admis en masse parmi les chevaliers alors
qu’auparavant on était chevalier de naissance ou on le devenait par faveur
impériale.
(12)à cette même époque
les rapports s’envenimèrent avec les Palmyréniens qui s’emparèrent pratiquement
de tout l’Orient.
(13)Sans doute composé de
plusieurs milliers d’hommes.
(14)B. BLIGNY :
histoire du Dauphiné (1973)
(15)Sauf pour E. CIZEK
(l’empereur Aurélien et son temps, 1994, page 82) qui considère qu’il était
peut être originaire de
(16)La préfecture du
Prétoire, considérée comme un poste sénatorial, est ici mise à part.
(17)R. CAGNAT, op. cit.
(18)Règne de Gallien
L’ordre équestre,
précédemment issu de la caste des notables des cités, devint alors l’émanation
directe de l’armée et la seconde moitié du 3ème siècle vit le
triomphe de l’ordre équestre, préparé du reste de longue date il est vrai par
des souverains comme Domitien et Hadrien à une époque où, déjà, nombre de
chevaliers étaient issus des élites municipales ou provinciales.
Cette généralisation
devait conduire à ce que l’ordre occupât pratiquement tous les hauts postes
administratifs : préfectures, commandements militaires, gouvernement d’un
grand nombre de provinces. Mieux même, au sommet de la hiérarchie, les préfets
du prétoire accédèrent au sénat et aux plus hauts postes de celui-ci.
Ceci a fait dire à un
auteur (19) que « … à cette époque le soldat sorti du rang peut, s’il est
énergique, actif et assez heureux pour survivre, espérer parvenir aux plus
hautes dignités. En devenant préfet, il reçoit régulièrement les ornements
consulaires et entre au sénat. L’armée est ainsi devenue le moteur de
l’ascension sociale ».
Après avoir situé ce
contexte général, revenons à l’inscription vifoise
qui apparaît donc comme légèrement postérieure à l’année 269 puisque Julius Placidianus est qualifié alors de préfet du prétoire et de
personnage de l’ordre sénatorial, ce qui semble indiquer que s’il ne l’était
pas déjà auparavant il aurait été fait sénateur du fait de sa promotion à cet
éminent poste sur le contenu duquel il est intéressant de s’arrêter quelques
instants.
En effet, la fonction
de préfet du prétoire était l’une des fonctions supérieures de l’ordre équestre.
A l’origine le prétoire « praetorium »
désignait la tente du général dans un camp. Par extension, le prétoire devint
ensuite le palais du gouverneur d’une province. Enfin, au bas empire, le préfet
du prétoire, chef de la puissante garde prétorienne, était en fait le second personnage
de l’empire. On a même dit jadis (20) qu’il était « un empereur sans
diadème ». Son pouvoir, qui était celui d’un quasi vice empereur s’étendait
à toutes les troupes (21). Sur le plan civil, il jugeait en appel à la place de
l’empereur. Cumulant les deux pouvoirs, civil et militaire, il exerçait auprès
de l’empereur une triple activité : de conseil, en lui donnant ses avis,
de suppléance en ayant des compétence en ses lieu et place et de service enfin
en étant chef d’état major commandant les prétoriens. En quelque sorte, c’était
un quasi « vice empereur ».
C’est probablement au début du règne
d’Aurélien (22), proclamé empereur par ses soldats, à la mort de Claude II que Placidianus fut élevé à la dignité de préfet du prétoire
(23). Il était encore vraisemblablement en poste à Grenoble lors de sa
nomination car semble établi que ses troupes et lui-même aient séjourné
longtemps dans la contrée. On peut d’ailleurs s’interroger sur les raisons d’un
aussi long séjour pour ce corps expéditionnaire d’élite, composé de soldats
pris dans la propre garde de Rome. Sans aucun doute, l’enjeu devait-il être
capital. A défaut d’argument définitif on peut avancer deux hypothèses :
peut être ses troupes, somme toute réduites et
l’échelle du conflit empêchèrent-elles Placidianus
d’aller plus avant en Gaule ou bien resta t-il cantonnée en cet endroit sur
ordre en attendant qu’Aurélien vienne le rejoindre avec son armée.
(19)P. PETIT :
histoire générale de l’empire romain (1974)
(20)L. MORERI :
grand dictionnaire historique (1759)
(21)Eu égard à ces
commandements et compte tenu qu’il devait accompagner l’empereur à la guerre il
était naturel que le préfet du prétoire eut nécessairement un passé de soldat à
son actif.
(22)Entre mars et août
270
(23)A moins que ce ne
soit à l’extrême fin de celui de Claude II (L. HOMO : essai sur le règne
d’Aurélien, 1904).
Prud’homme pense même (24) que Placidianus aurait profité de ce long séjour d’observation
et d’attente pour commencer, dès 269, la fortification de Grenoble (25).
Bien que la nomination de Placidianus
ne soit pas très explicable, il faut relever que c’est le seul préfet du
prétoire du règne d’Aurélien connu avec certitude (26). Peut-être celui-ci
nomma t-il Placidianus en récompense de sa mission
menée à bien ou encore voulut-il honorer un compagnon d’armes, de surcroît
particulièrement fidèle, qualité rare en cette époque où la trahison et les
complots étaient pratiques courantes.
Cette seconde hypothèse, si elle était
avérée, pourrait indiquer que Placidianus était alors
d’un âge avancé car Aurélien avait alors environ soixante ans lors de sa
nomination (27).
Ce qui semble avéré c’est que Placidianus fut maintenu à Cularo,
du moins pendant quelque temps encore après son élévation à cette dignité.
Telle est bien celle-ci, en effet, que nous mentionne l’inscription de Vif.
Combien de temps resta t-il préfet du
prétoire ? La durée de cette fonction avait souvent été de trois ans sous
Gallien mais Aurélien tendit à la réduire. On sait en effet que pendant son
règne aucun préfet ne resta en charge plus de deux ans. Ainsi donc on peut,
avec une bonne part de probabilité, fixer à l’an 271 (28). En effet, si l’on
admet que Placidianus est resté deux ans préfet du
prétoire on peut raisonnablement penser que c’est à l’issue de cette charge
qu’il serait devenu consul comme nous le verrons un peu plus tard.
Sans nous écarter des pas de ce haut
personnage et en évitant de tomber dans une exégèse répétitive, il y a lieu de
revenir sur l’inscription de Vif et de s’arrêter sur l’autre aspect de son contenu,
tant qu’il est vrai que l’on ne peut occulter la référence aux « feux
éternels ».
Ainsi donc, Julius Placidianus,
préfet du prétoire, membre du sénat romain, éleva vers l’an 271 et à la suite
d’un vœu à Vif, ou dans les environs immédiats, puisque tous les auteurs
s’accordent à penser qu’il n’a guère été déplacé au cours des siècles, un autel
dédié aux « feux éternels ». Mais ce vœu quel était-il ?
(24)Histoire de Grenoble
(1888)
(25)Traditionnellement
attribuée à Maximien et Dioclétien. Mais, selon
Prudhomme et d’autres auteurs après lui « … l’examen des restes de
remparts parvenus jusqu’à nous autorise cette supposition : en effet, on y
distingue nettement la trace des interruptions diverses qui ont eu lieu pendant
la période de construction ». De fait, une monnaie de Claude II a été
retrouvée dans les substructions de l’enceinte.
(26)L. HOMO, op. cit. On
notera toutefois que l’ « Histoire Auguste », au demeurant très
controversée, dans le chapitre que Flavius Votiscus de Syracuse consacre au « divin Aurélien »,
ne mentionne nullement Placidianus et cite comme
préfet du prétoire Ablavius Murena,
personnage qui semble avoir été inventé de toutes pièces (Histoire Auguste,
traduction A. CHASTAGNOL, 1994, page 949)
(27)J. F. MICHAUD :
bibliographie universelle, ancienne et moderne, T 8 (1966)
(28)ou à l’année 272 si
l’on considère que Placidianus est resté en poste à
Grenoble jusqu’à l’automne 273 (Cf. infra).
Selon Hirschfeld
(29), Placidianus aurait exprimé sa reconnaissance à
la suite de sa campagne menée avec succès contre Tétricus.
Mais ceci n’est guère satisfaisant puisqu’il ne semble pas que Placidianus ait jamais été au contact direct de
l’usurpateur.
Reste le problème infiniment plus complexe
des feux éternels ! Les auteurs sont là fortement divisés. On peut, en
simplifiant, dire qu’il y a ceux qui voient en ces feux éternels une allusion à
Les auteurs les plus anciens (30) pensaient
qu’il s’agissait d’un autel consacré par Placidianus
« aux feux éternels de la ville de Vif au pays des Voconces »,
c'est-à-dire de la fameuse « fontaine ardente » du Gua. Que l’ex voto ait pu se
rapporter à celle-ci est du reste parfaitement concevable. On sait, en effet,
que les romains divinisaient toutes les puissances. « Avant
l’établissement du christianisme » observe LONG, « les peuples se
faisaient des dieux des objets divers qui frappaient l’imagination : les montagnes,
les fleuves… Une fontaine dont l’exhalaison s’enflammait devait attirer leurs
hommages. Placidianus… voyait dans ce phénomène de
feux éternels Vesta, symbole de la ville éternelle… ». Il émet cependant
un doute puisqu’il ajoute : « les feux éternels, « ignes sempiterni »
désignaient aussi les astres ; notre inscription leur serait-elle
adressée ? » s’interroge t-il (31).
Ce qui est établi est que la fontaine ardente
était extrêmement connue au début de l’ère chrétienne et avait dans l’empire un
retentissement amplifié : vers 350, Saint Hilaire de Poitiers lui aurait
consacré des vers (32) bien avant le passage célèbre de la « Cité de
Dieu » de Saint Augustin : « … au sujet des autres phénomènes
dont j’ai parlé et que je n’ai pas éprouvés mais seulement lus, exception à
propos de cette fontaine où les flambeaux allumés s’éteignent et où ceux qui se
sont éteints se rallument… Pour cette fontaine je n’ai trouvé personne qui mait dit l’avoir vue en Epire mais j’en sais qui m’ont dit
en avoir vu une toute semblable en Gaule près de Grenoble » (33).
Que Placidianus ait
connu la fontaine ardente est plus que probable puisque ce sont les armées, et
peut être même la sienne, qui devaient en apporter la réputation à Rome où
Saint Augustin en recueillerait l’écho, près de cent quarante ans après.
Au nombre des partisans de cette première
interprétation il faut également citer Camille Jullian qui écrit :
« …
La première opposition parait venir de Hirschfeld qui conteste que les feux éternels puissent se
rapporter à la fontaine ardente et pense qu’ils désignent le soleil et la lune.
Pour lui, à la suite de la réussite de sa mission, Julius Placidianus
aurait exprimé sa reconnaissance envers des divinités particulièrement en
faveur à la cour de son temps et suivant une formule qui serait d’Aurélien
lui-même.
(29)O. HIRSCHFELD :
corpus inscriptionum latinarum,
T XII, n° 1552 (1888)
(30) J. D.
LONG : mémoires présentés par divers savants à l’Académie des Inscriptions
et des Belles Lettres de l’Institut (1849), F. VALLENTIN : bulletin
épigraphique de
(31)J. D. LONG : op. cit.
(32)U. CHEVALLIER : Regeste dauphinois, I, 28 (1913)
(33)MAROUD : Saint
Augustin et la fin de la culture antique (1937)
(34)C. JULLIAN :
histoire de
C’est ainsi qu’il penche nettement pour une
dédicace au soleil et à la lune. Il faut se souvenir, en effet, que la
constitution de la religion solaire en culte d’état est le couronnement de la
politique intérieure d’Aurélien. Cette réforme importante s’articulait en effet
en trois parties :
-
la
reconnaissance officielle du soleil comme dieu suprême de l’empire,
-
la
construction d’un temple du soleil à Rome avec l’instauration de fêtes
périodiques en son honneur,
-
la
création d’un collège des pontifes du soleil (35).
Mais le véritable contre-pied, avec
argumentation méthodique, vient de Jacques Chevalier (36) pour qui les
explications associant les feux éternels à la fontaine ardente ne sont pas
convaincantes. Il se demande si l’épithète « aeternis »
appliquée à ces feux leur convient bien. Il note, pour réfuter l’argumentation
de Long, que le feu de Vesta est toujours désigné par un singulier. Il indique
que, selon Horace et Ovide, le culte du feu était très répandu chez les anciens
peuples mais que les feux éternels « ines sempiterni » désignaient aussi les astres. Il reprend
ainsi l’interrogation de Long : « l’inscription de Vif ne leur
était-elle pas adressée ? » et tient alors le raisonnement
suivant : « … D’après la tradition platonicienne, les astres étaient
des êtres divins, dieux visibles et engendrés. Or cette tradition était très
vivante à Rome précisément à l’époque qui nous occupe… ». Selon lui, en effet,
l’un des écrivains les plus représentatifs de la mentalité de cette époque,
Macrobe, philosophe et philologue, cite dans l’un de ses ouvrages (37) cette
phrase de Cicéron : « Les hommes sont nés sous la condition d’être
les gardiens du globe que vous voyez au milieu de ce même temple et qu’on
appelle la terre. Leur âme est une émanation de ces feux éternels que vous
nommez constellations et étoiles et qui parcourent leurs orbites avec une
admirable célérité ». Et Macrobe d’expliquer comment l’homme, habitant ce
temple qu’est l’univers, les regards élevés vers le ciel, participe à la
divinité parce qu’il parut apte à recevoir une parcelle de l’intelligence qui
anime les corps célestes : c’est de cette intelligence qu’il est question
lorsqu’il est parlé de cette âme qui est une émanation des feux éternels,
c'est-à-dire, non pas de leur corps mais de l’esprit divin qui les anime.
J. Chevalier ayant amené à ce point précis le
raisonnement n’a plus alors qu’à conclure sa démonstration, ce qu’il fait en
ces termes : « … quoi d’étonnant dès lors qu’à une époque où le
paganisme finissant cherchait à raviver ses dieux vieillis en restaurant les
anciennes croyances et en les combinant aux croyances orientales dans un
syncrétisme plus compréhensif que le christianisme attaché à une vérité unique,
un préfet du prétoire romain ait élevé un autel à ces feux éternels d’où les
hommes, croyait-on, tiraient leurs âmes. Ignibus aeternis, à un mot près, c’est l’expression de Macrobe mais
Placidianus, plus platonicien que Macrobe, aurait préféré
au mot « sempiternus » qui désigne ce qui
dure comme le temps lui-même et marche avec lui d’un pas égal, le terme « aeternis » qui surpasse toute durée et qui a une
portée non pas seulement mathématique mais encore métaphysique et
religieuse ».
(35)L. HOMO, op. cit. qui
traduit « Ignibus aeternis »
par « sol et luna »
(36)J. CHEVALIER :
sur l’inscription de Vif, bulletin de l’Académie delphinale,
1927
(37)Commentaire du songe
de Scipion
Enfin, Mercier et Seguin dans une intéressante
brochure publiée en 1938 (38) reprennent, sous forme d’inventaire, les diverses
théories avancées et font état, en outre, d’échanges de correspondances avec
divers spécialistes. C’est ainsi que Gaston Letonnelier
note que « … l’inscription de Vif est par trop proche de la fontaine
ardente pour qu’il n’y ait pas un rapport entre la dédicace et le phénomène
igné… L’auteur de la dédicace avait sous les yeux des feux qui ne s’éteignaient
pour ainsi dire jamais et qu’il appela, tout naturellement des « feux
éternels (39).
Jules Toutain
remarque pour sa part que le culte institué à Rome ne concerne que le soleil et
ne voit pas pourquoi, en cette région de
Jérôme Carcopino, alors directeur de l’école
de Rome, devait pour sa part répondre : « … quant à votre dédicace,
je persiste à penser qu’elle est astrologique » (41).
Enfin, nanti de tous ces avis, Mercier devait
conclure son étude en ces termes : « les rapports entre la dédicace Ignibus aeternis et la fontaine
ardente sont à notre avis absolument nuls… Que Placidianus
ait connu la fontaine ardente c’est plus que probable mais, supposer qu’au
moment où la dédicace a été conçue la pensée de la fontaine ardente a pu entre
un instant en balance avec la révérence due au soleil et à la lune dans
l’esprit de ce fonctionnaire respectueux de la religion en honneur, ne serait
donc pas seulement une naïveté mais constituerait une véritable hérésie ».
Plus récemment, R. Turcan
pense que l’inscription serait équivalente de « Soli invicto »
(le soleil invincible) mais pourrait néanmoins concerner la fontaine ardente
(42).
Pour être complet autant que faire se peut,
il faut verser au débat que, selon divers auteurs, étrangers au problème de la
fontaine ardente, la lune faisait l’objet à Rome et dans l’empire d’un culte à
l’imitation de celui rendu au soleil. Les deux astres présentaient en effet
l’image la plus évocatrice de l’éternité puisque l’un descend quand l’autre
monte.
On observera qu’un certain nombre
d’inscriptions s’adressent soit au soleil éternel « soli aeterno », soit à la lune éternelle « lunae aeterno », soit aux
deux réunis. Mais dans aucune autre inscription on ne retrouve l’expression
« ignibus aeternis »
qui apparaît donc comme unique. Peut-on admettre, dès lors, que Placidianus ait pu utiliser cette expression inusitée en
lieu et place de « soli et lunae aeternis » à la façon dont ses concitoyens
s’adressaient au dieux manes sans les citer et, dans
ces conditions, pourquoi un citoyen de son rang aurait, dans un monument votif
à des divinités si souvent invoquées, employé de tels termes ? Aurait-il
voulu jouer sur une certaine ambiguïté ?
On ouvrira ici une parenthèse sur le culte
« soli et lunae aeternis »,
dont les termes sont souvent isolés et parfois associés. Diverses inscriptions
aux astres sont connues en Gaule et, notamment, pour ce qui concerne le dieu
Sol :
-
à
Aix en Provence (43)
(38)A. MERCIER et A.
SEGUIN : l’épigraphie et les fontaines ardentes du Dauphiné (1938)
(39)Lettre à M. Mercier,
1938
(40)Lettre à M. MERCIER,
1938
(41)Lettre à M. MERCIER,
1938
(42)R. TURCAN : les
religions de l’Asie dans la vallée du Rhône, EPRO 30, 1972
(43)CAG 13/4, 2006, page
461
-
à
Equevillon dans le Jura (44)
-
à
Deneuvre dans
-
à
Cocheren en Moselle (46)
-
à
Entrains sur Nohain dans
-
à
Strasbourg (48)
Pour ce qui concerne la déesse Luna :
-
à
Manduel dans le Gard (49)
-
à
Cocheren en Moselle (50)
-
à
Sarrebourg également en Moselle (51)
-
à
Entrains sur Nohain (52)
-
à
Rinxent dans le Pas de Calais (53)
-
à
Hyères (54)
-
à
Vaison
-
à
Beaumes de Venise dans le Vaucluse (56)
Les deux (Soli et Lunae)
sont associés dans un cas :
-
à
Reischoffen dans le Bas Rhin (57)
On notera à cet égard que
Je n’ai pu résister à l’envie de parler de
cette querelle d’interprétation, toujours ouverte d’ailleurs. Celle-ci situe
bien, en effet, l’importance que revêt notre inscription. J’ajouterai mon
sentiment sur la question : si Placidianus n’a
pas voulu faire allusion à la fontaine ardente en parlant des feux éternels,
pourquoi cet autel a-t-il été élevé à Vif ? Un autel d’inspiration
astrologique eut trouvé beaucoup plus naturellement sa place à Grenoble qui
était le siège officiel de la garnison et qui, en outre, était de loin
l’agglomération la plus importante de toute la contrée. La dédicace à Claude le
Gothique, faite par le même Placidianus, avait bien
été élevée à Grenoble et non ailleurs. Ainsi donc, pour moi, l’inscription aux
feux éternels de Vif ne peut s’expliquer en cet endroit que par une invocation,
même indirecte, à la fontaine ardente.
(44)CAG 39, 2001, page
372
(45)CAG 54, 2004, page
179
(46)CAG 57/1, 2004, page
368
(47)CAG 58, 1996, page
142
(48)CAG 67/2, 2002, page
452
(49)CAG 30/3, 1999, page
437
(50)CAG 57/1, 2004, page
368
(51)CAG 57/1, 2004, page
714
(52)CAG 58, 1996, page
142
(53)CAG 62/2, 1994, page
430
(54)CAG 83/1, 1999, pages
444 et 459
(55)CAG 84/1, 2003, page
113
(56)CAG 84/1, 2003, page
413
(57)CAG 67/1, 2000, page
524
(58)Prosopographia Imperii Romani, saec
I, II, III (1943), page 249
Et pourquoi Vif, plutôt que le Gua ou Miribel Lanchâtre ?
Sans aucun doute parce que ces deux dernières localités n’existaient pas encore
alors que Vif pouvait être un village, peut être même un vicus
si l’on s’en tient à l’étymologie la plus probable, en tout cas le lieu habité
le plus proche de la fontaine. Ce qui est sur est que l’ancien oppidum de Saint
Loup fut sans doute fortifié précisément à cette époque, vraisemblablement par
les soldats de Placidianus comme en témoignent les
restes de rempart et une monnaie de Claude II découverte sur le site.
Mais, revenons à Placidianus.
Qu’était-il devenu après avoir fait ériger cet autel ? Etait-il toujours
cantonné à Grenoble ? La seule chose que l’on sache avec certitude c’est
qu’Aurélien allait le récompenser et l’honorer encore davantage et ce, vers le
mois d’octobre 272 sans doute puisqu’on retrouve son nom dans les « fastes
consulaires » de l’an 273 (59). Les fastes consulaires, on le sait,
étaient les tables où l’on inscrivait dans l’ordre chronologique les noms des
consuls de l’empire. Au bas empire, c’est l’empereur lui-même qui faisait
désigner consuls ceux qu’ils voulait honorer. Il y avait ainsi, chaque année,
un certain nombre de personnages revêtus du titre de consul :
-
deux
consuls ordinaires, qui étaient éponymes (60) et qui prenaient leur charge le 1er
janvier,
-
un
nombre plus ou moins important de consuls suffects désignés le 9 janvier de
l’année où ils allaient exercer leur charge et qui se succédaient, par groupe
de deux, tous les quatre mois ou même, à certaines époques, tous les deux mois.
L’empereur lui-même ne revêtait pas le
consulat en permanence, mais seulement certaines années, surtout pour honorer
tout particulièrement le collègue qu’il se choisissait. Mais seuls les consuls
ordinaires figuraient dans les Fastes. Toutefois, il s’agissait avant tout d’un
titre honorifique, l’intérêt du consulat, mis à part l’honneur très grand,
était d’ouvrir l’accès aux très hauts postes de l’empire : curatelles (61),
gouvernement des grandes provinces impériales, proconsulats (62)…
Sur les cinq consuls ordinaires du règne
d’Aurélien dont l’origine est connue, trois avaient suivi la carrière
sénatoriale, Pomponius Bassus en 271, Junius Veldumianus en 272 et Marcus Claudius Tacitus
en 273. Les deux autres, Julius Placidianus et Marcellinus étaient, pense t-on, des chevaliers qu’Aurélien
avait élevés au consulat en récompense de services exceptionnels (63).
Placidianus garda le consulat
toute l’année 273, charge qu’il partagea avec Claudius Tacitus
qui devait devenir empereur peu après (64). Ce dernier était présent à Rome en
273, ce qui tendrait à indiquer que Placidianus était
toujours en mission et que sa nomination comme consul était nettement plus
honorifique que fonctionnelle.
(59) Fasti anni 273. Toutefois, une inscription de la grotte du Taya (CIL 8, n° 1884) ne mentionne que le nom de Claudius Tacitus alors que, d’ordinaire, les ex votos
de la grotte sont datés par les deux consuls ordinaires de l’année en question.
Nous ignorons quelles ont été les raisons qui ont prévalu pour que les dothenenses aient omis le nom de Placidianus
mais nous supposons que le témoignage de tous les « Fasti »
suffit pour assurer l’authenticité du consulat de notre personnage.
(60) c'est-à-dire qui donnaient leur nom à
l’année.
(61) très hautes fonctions équestres
attribuées par l’empereur : chancellerie, routes, eaux…
(62) gouvernements d’une province sénatoriale
(63) pour sa part, E. CIZEK (op. cit.)
considère que c’est Aurélien qui l’aurait introduit au sénat sans pour autant
lui défendre de conserver la charge de préfet du prétoire.
(64) de fin septembre 275 à juin 276
Sa trace se perd à partir de l’année 273. On
peut raisonnablement penser que compte tenu de son long séjour en Narbonnaise
et de sa connaissance des problèmes particuliers de
Au-delà de ce problème particulier, on peut
conjecturer que Placidianus participa sans doute à
l’expédition de l’automne 273, lors du semblant de campagne mené contre
Tetricus (66). En effet, au cours d’un simulacre de combat à Chalons sur Marne,
celui-ci se rendit à Aurélien. On peut du reste se demander si cette mise en
scène, qui prouve des contacts entre Aurélien et Tetricus n’avait pas été
préparée de longue date par Placidianus lui-même.
Ainsi finit l’empire romain des Gaules.
A la mort d’Aurélien, assassiné fin août ou
au commencement de septembre 275 et après un interrègne sur la durée duquel les
historiens ne sont pas d’accord, les sénateurs se décidèrent à élire Tacitus alors âgé de 65 à 75 ans selon les sources, qui
prétendait descendre du grand historien du même nom dont il remit les œuvres au
goût du jour. Peu après sa nomination il partit pour l’Asie Mineure, attaquée
par les Goths de
C’est alors le début du lent processus de
désagrégation de l’empire romain qui durera encore deux siècles et ne connaîtra
que quelques pauses, notamment avec
Et Placidianus ?
Il ne semble qu’il ait suivi Tacitus en Asie. Peut
être avait-il été nommé dès 274 par Aurélien à l’une des charges illustres
ouvertes par le consulat ? A moins que se sentant suffisamment âgé et
comblé d’honneurs parce que les ayant tous obtenus sans avoir pour autant l’ambition
de l’empire il ne se soit retiré sur des terres qu’il ne devait pas manquer de
posséder, soit dans la campagne romaine, soit en Narbonnaise, soit encore en
tout autre endroit du vaste empire.
(65) J. J. A. PILOT : sur un édit
d’Aurélien et le chemin de l’empereur, BSSI (1861)
(66) Préfet de l’Aquitaine, proclamé Auguste
par ses soldats, qui prit la pourpre à Bordeaux en 268, d’abord associé à Victorinus puis seul empereur gaulois à la mort de
celui-ci.
Ce qui va le sens d’un accord tacite entre les
protagonistes est le fait que, bien que Tetricus ait paru au triomphe de son
vainqueur, il fut peu après nommé par celui-ci gouverneur de Lucanie.
Ainsi donc, en l’état actuel des sources
écrites disponibles, peut-on résumer le séjour dans notre région de ce
personnage illustre mais méconnu, dont on ne connaît que le nom Iulius, et le surnom « le Placide », qui fut
presque empereur et qui foula, il y a plus de dix huit siècles le sol de notre
contrée en y laissant le souvenir d’un vœu énigmatique.
J. C. MICHEL