Conférence du 18 mars 2017
La grande saga des empereurs romains
L’on connait largement, je crois, mon intérêt, sinon ma
passion, pour l’époque romaine.
Autant dire que, depuis longtemps, j’envisageais une telle
conférence largement illustrée, d’autant que, par devers moi, j’ai de très
nombreux documents et une large iconographie. Et même s’il fallait faire
des choix cornéliens tant l’entreprise était hardie d’être résumée en une heure.
C’est peu, vous en jugerez, pour cinq siècles d’empereurs romains. C’est quand
même, le quart de notre histoire.
L’empire romain ce n’est, en effet, pas moins de 105
empereurs officiels et au moins plus du double d’usurpateurs. Tous nous sont
connus par des textes, d’abondantes monnaies mais aussi, moins largement par
leurs portraits et leurs statues surtout pour la partie la plus ancienne de ce
récit.
D’ores et déjà dans le temps imparti, je ne les citerai pas
tous, pas davantage que je ne citerai, sauf exception les Augusta
c’est-à-dire les femmes d’empereurs ayant le titre d’impératrice. Il en ira de
même pour les usurpateurs qui justifieraient à eux seuls une conférence dédiée.
Celle-ci viendra peut-être le moment venu. C’est au demeurant une quasi
histoire parallèle avec de beaux personnages dont certains ont concerné notre
proche région.
Mais, nonobstant ces restrictions, c’est quand même un long
parcours : de la fin du Ier siècle avant notre ère jusqu’au dernier tiers
du Ve siècle. Il y aura pour agrémenter le propos quelques beaux portraits ou,
à défaut, des monnaies fort belles aussi. Chaque fois que possible, je
signalerai leur point de découverte dans notre département sans que cela ne
soit exhaustif. Il y en a tellement !
Quel empereur romain voulut faire de son cheval un
consul ? Qui édifia la Colisée ? (je vous rassure tout de suite, ce
ne fut pas Néron, contrairement à la légende), lequel prit part à 735 combats
de gladiateurs, même si ceux-ci étaient largement truqués ? Quels furent
les plus longs règnes ou les plus courts ? Quel fut le dernier empereur
romain d’Occident ?
Vous saurez tout cela très bientôt grâce à votre patience.
Mais commençons par le début et rendons à César ce qui lui
est dû. César, contrairement à l’imaginerie populaire, ne fut jamais empereur.
Selon le beau mot de Chateaubriand « il fit de son nom un titre supérieur
à celui des rois et des empereurs ». Dictateur provisoire puis à vie, il
sera assassiné le 15 des Ides de mars, en 44 avant notre ère. Il s’ensuivit
alors une guerre civile, l’une des plus graves que Rome ait connues.
Peu avant, adopté par César son grand-oncle, Octave se
révèle être son héritier à défaut de descendants directs, tous morts
prématurément. Fort de cet héritage, il forme un triumvirat avec Antoine et
Lépide avant de rompre avec eux et de vaincre Antoine à la célèbre bataille
d’Actium. Antoine se suicider alors à Alexandrie avec Cléopâtre, la belle reine
d’Egypte au nez resté légendaire.
Consul tous les ans, Octave se voit conférer en 26 avant
notre ère, le titre d’Auguste, mot quelque peu archaïque signifiant sacré ou
vénéré. Tel sera donc son nom et ce titre subsistera au-delà de lui durant
toute la durée de l’empire romain jusqu’à l’extrême fin de celui-ci.
Il parait ici nécessaire de dire quelques mots sur la
titulature romaine d’Auguste à sa mort :
« Imperator Caesar », expression qui servira dès
lors à désigner tous les empereurs jusqu’au IVe siècle.
« Divi filus Augustus », son fils divin Auguste.
« Pontifex maximus », grand pontife, c’est-à-dire
chef de la religion romaine. Le titre ne sera abandonné que sous Gratien en 383
mais il subsiste depuis lors pour les papes.
« Consul » suivi du nombre de consulats :
titre des principaux magistrats de Rome, élus ou réélus chaque année.
« Imperator », titre honorifique accordé à un
général romain par ses soldats à la suite d’une victoire.
« Tribunicia potestalis », puissance
tribunicienne renouvelée chaque année. Auguste en comptait 37.
« Pater patriae », père de la patrie ; Titre
purement honorifique conféré à l’origine en 63 avant notre ère par le Sénat à
Cicéron puis repris par César, Auguste et leurs successeurs.
Mais, nous ne sommes pas ici pour étudier la riche vie
d’Auguste. Sachez néanmoins qu’il a régné 44 ans et transformé, ou plutôt créé
l’empire romain. Il est mort dans son lit à l’âge de 76 ans, de diarrhée
semble-t-il. Chose rare pour tous les empereurs comme vous pourrez le
constater. Dans son testament, il peut écrire : « Rome que j’ai reçue
de brique, je vous la laisse de marbre ». Ce qui n’était pas inexact. Une
monnaie de lui a été récemment découverte à Jarrie. On en connait peu d’autres
dans notre département. Auguste avait sans doute d’autres priorités. Mais les
monnaies circulaient dans tout l’empire quand bien même elles étaient
obsolètes.
Un mot sur Livie, sa seconde épouse. Vous connaissez sans
doute le temple d’Auguste et de Livie à Vienne. Livie demeura durant 52 ans son
épouse ? On a dit que la dernière phrase d’Auguste fut pour elle :
« Livie, conserve le souvenir de notre union ». Pourtant, il n’avait
guère été fidèle si l’on en croit ses biographes.
Le second empereur est Tib7re, fils de Livie, qu’Auguste
avait adopté. Un mot sur l’adoption en droit romain. Elle existait bien avant
César mais se généralisera à compter d’Auguste. En effet, il était courant à
défaut d’héritier direct d’adopter en enfant, un neveu, un parent, voire même
un étranger en vue d’une succession.
Mais, nous sommes en 14 avant notre ère. Tibère prend
aussitôt des mesures pour limiter les pouvoirs de Livie que le testament
d’Auguste avait fait Augusta.
Très vite, le nouvel empereur fuit Rome pour Capri où il
fait édifier une somptueuse demeure. C’est sous son règne, on le sait peu, que
le Christ fut crucifié mais vraisemblablement pas sur son ordre. En 37, Tibère
meurt à l’âge de 77 ans. A propos de sa mort Tacite rapporte une anecdote
pittoresque. Caligula, son fils par adoption, aurait retiré la bague de
l’empereur qu’il croyait mort et aurait alors été proclamé à sa place. On
aurait cependant appris à ce moment-là que Tibère revenait à lui et demandait à
manger. Le chef de la garde prétorienne, Macron, l’aurait alors étouffé avec un
coussin. Ainsi serait-il mort.
Vient alors Caligula, c’est-à-dire littéralement « la
petite bottine », adopté par Tibère et son fameux cheval Incitatus qui
possédait une écurie de marbre et dont il voulut faire un consul ! Dans
les derniers mois de son règne, il adopta l’apparence d’une divinité bien que
sa santé ne fût équilibrée ni au physique ni au moral selon Suétone. En 40, il
est assassiné. C’est le second après Tibère d’une fort longue liste comme vous
pourrez en juger par ce qui suivra.
Lui succède son petit fils Claude qui n’est guère aimé par
sa mère qui le décrit comme « un monstre que la nature n’a pas achevé mais
seulement esquissé ». Alcoolique, il s’immerge néanmoins dans la recherche
historique, écrit des livres et même une autobiographie. Il meurt empoisonné
après avoir été longtemps dominé par sa troisième femme Messaline que vous connaissez
sans doute de surnom. On gardera de Claude que c’est l’un des rares empereurs à
avoir conquit la Grande-Bretagne.
Puis vint Néron, adopté par Claude, dit le malade ou le
cruel qui fit assassiner sa mère après avoir tenté de la noyer. Néron restera
célèbre par l’incendie de Rome qu’on lui impute mais qui ne fut peut-être que
fortuit et la persécution des chrétiens qui, elle, fut certaine. Un monstre au
demeurant qui se suicidera d’un poignard dans la gorge le 11 juin 68.
Vient ensuite Galba au physique franchement
repoussant : chauve, les yeux bleu sombre, le nez aquilin et de petite
taille. Il périra sous le glaive de même que son successeur Pison. On dit qu’on
promena leurs têtes sur le Champ de Mars à Rome.
Leur successeur, Othon, ne règnera que trois mois et se
suicidera pour ne pas tomber dans les mains de son rival Vitellius.
Celui-ci se trouvait à la bonne place et au bon moment. Il
devint donc empereur mais mourra aussi poignardé et son cadavre sera jeté dans
le Tibre. Même s’il ne fut pas un empereur très brillant, il ne méritait sans
doute pas une fin aussi terrible. On a dit de lui que c’était un colosse d’une
gloutonnerie phénoménale. Avec lui prend la fin de la dynastie
Julio-claudienne.
Commence alors l’ère des flaviens avec Vespasien, nommé
« le bien aimé ». Ayant obtenu les faveurs d’une dame fort
consentante, celui-ci lui aurait fait cadeau de 400 000 sesterces, somme
alors considérable. A son trésorier qui lui demandait sous quel titre il devait
enregistrer la dépense, il aurait répondu : « de Vespasien le bien
aimé ». Son épouse, Flavia Domitilla lui donna deux fils : Titus et
Domitien. Vespasien règnera dix ans et vous connaissez sans doute les toilettes
de son règne encore appelées au XIXe siècle « vespasiennes ». C’est
encore lui, on le sait trop peu, qui édifia le Colisée de Rome et non Néron
comme on le dit trop fréquemment.
Titus luis succède. On connait sa passion pour Bérénice par
les vers tragiques de Racine. Ne guérit-on jamais d’un chagrin d’amour ?
Il va néanmoins se forger l’une des meilleures réputations parmi les empereurs
romains. Pour vous situer dans le temps, c’est sous son règne que le Vésuve
détruit Pompéi et Herculanum. Il meurt empoisonné semble-t-il par son frère
Domitien.
Celui-ci, âgé de 30 ans, lui succède alors. C’est le
dernier de la dynastie flavienne qui n’aura, en fait, durée que 27 ans.
Autocrate bienveillant et administrateur compétent, il meurt néanmoins après 15
ans de règne sous le poignard. Seule l’armée pleurera sa mort. Un as de
son époque a été découvert à Claix, au Val d’Allières.
Commence alors le règne des Antonins avec Nerva. Il a alors
66 ans. Après un règne paisible de deux ans, il meurt de mort naturelle à la
suite semble-t-il d’un accès de colère, sans doute déjà un infarctus. L’un des
rares empereurs à mourir paisiblement si l’on peut dire.
En 96, Trajan, alors gouverneur de la Germanie Supérieure,
reçoit un message de l’empereur qui l’informe de son adoption. On connait de
lui la célèbre colonne Trajane de Rome. Il excelle dans la guerre et conquiert
la Dacie puis il part à la conquête de l’Orient. Il meurt néanmoins empoisonné.
Au Moyen Âge, Dante en fait le seul de tous les empereurs non chrétiens à avoir
au paradis.
Un mot sur Matidia, sa nièce, qui fut Augusta dont on
conserve l’une des plus belles sculptures de l’époque romaine.
Lui succède Hadrien, son fils adoptif. Que je vous dise
encore un mot sur l’adoption romaine que j’ai déjà évoquée. Très fréquemment
depuis César, des parents même lointains étaient adoptés par les empereurs en
vue d’une succession probable. Ce fut le cas pour Auguste, pour Tibère et pour
bien d’autres ensuite dont Hadrien. Celui-ci poursuit les conquêtes et bâtit le
fameux « mur d’Hadrien » en Grande-Bretagne. Dans le même temps, il
construit le panthéon de Rome et ce qui deviendra le château Saint-Ange. Par
ailleurs, on connait des voyages dans tout l’empire romain, restés célèbres. Il
meurt paisiblement semble-t-il. Sa statue avec son épouse Sabine est conservée
au musée de Vaison-la-Romaine. Curieusement, on a découvert un buste de lui à
Goncelin, aujourd’hui au Musée Dauphinois.
Puis vient Antonin le Pieux qui a eu la chance de régner
durant 23 ans sur un empire jouissant de la pax romana. La maladie qui
l’emporte est assez soudaine. Son biographe l’attribue à un abus de fromage des
Alpes. Il meurt donc dans son lit à l’âge de 74 ans. Un milliaire de lui est
visible à Chanas.
Lui succède son fils adoptif Marc-Aurèle qui désigne, chose
rare, comme co-empereur Lucius Verus également adopté par Antonin. Son règne
est marqué par des guerres rudes et incessantes. On connait de lui ses
« pensées », celles d’un homme d’une certaine grandeur d’âme. On
garde aussi de lui à Rome l’unique sculpture de l’antiquité à représenter un
empereur sur son cheval. Il meurt, sans doute empoisonné ou étranglé tout comme
Lucius Verus. Plusieurs films et notamment « la chute de l’empire
romain » ou « Gladiator » évoquent sa fin tragique.
Vient ensuite Commode, son fils, dont la passion était
l’arène plus que l’empire. C’est lui qui aurait fait 735 combats dans l’arène,
tous truqués, dont il sortait naturellement vainqueur. Comme nombre de ses
prédécesseurs, il meurt empoisonné.
Lui succède Pertinax, sorti du rang, acclamé par ses
soldats mais ratifié par le Sénat, qui ne règnera pourtant que 2 mois et 27
jours. Il sera assassiné, sa tête étant alors portée sur une pique par les
prétoriens.
Puis vient Dide Julien, d’une famille de sénateurs, mis à
mort lui aussi après 66 jours de règne. Selon ses détracteurs, il était aussi
gourmand que vaniteux et aussi vaniteux que riche. Toutefois, l’Histoire
Auguste le dit modeste et végétarien.
Ses successeurs Pescennius Niger et Clodius Albinus après
un court règne connaissent la même fin.
La plupart du temps en ce deuxième siècle de notre ère, il
ne faisait pas bon d’être empereur. Ce qui m’a toujours surpris c’est que, même
pour les règnes les plus courts, leur obsession était de battre monnaie. On en
a des témoignages dans tout l’empire, ce qui montre que la monnaie circulait de
partout et que l’on perdait beaucoup de pièces quand on ne les enterrait pas
volontairement.
Septime Sévère est alors nommé empereur. C’est le premier à
être issu d’Afrique du Nord. Il meurt, chose rare pour l’époque, dans son lit
nonobstant les crises de goutte qui l’handicapaient. Il aura néanmoins régné 18
ans. On a trouvé de lui des monnaies à Brié et à Jarrie.
Caracalla lui succède. Ce surnom, qui est resté, ne lui fut
donné qu’après sa mort. Son nom latin était Septimus Bassianus. Le simple fait
que Caracalla ait eu une réputation détestable n’en fait pas pour autant un
mauvais empereur. En effet, c’est lui qui promulguera l’édit resté célèbre sous
son nom accordant à tous les habitants de l’empire la citoyenneté romaine. C’es
également lui qui ordonnera que les voies romaines soient rechargées de brique.
C’est depuis lors que tant de nos chemins recèlent des briques. Il a bâti
également les très grands thermes de Rome qui portent son nom. Après 19 ans de
règne, il finira néanmoins assassiné.
Après le fugitif règne de son frère, Geta, vient celui de
Macrin durant un peu plus d’un an. D’origine maure, né à Césarée, il fit de
nombreuses guerres avant d’être battu à Antioche puis assassiné. On dispose de
lui, au musée de Belgrade, l’un des plus beaux portraits de l’antiquité.
Son fils Diadumenien, fugitif empereur connaitra le même
sort.
Vient ensuite Elagabale qui prit à son avènement le nom du
dieu de la montagne qu’il adorait. Il finit, après quatre ans de règne,
également assassiné.
Commence alors la dynastie des Sévères dont le premier fut
Alexandre (qui avait pris ce nom en hommage à Alexandre le Grand) qui finit par
l’épée comme ses prédécesseurs après 13 ans de règne.
Un mot sur sa mère, Julia Mamaea, co-régente, nommée
« mère de l’empereur, du Sénat et de la patrie » puis « mère de
tout le genre humain », à l’égale d’Eve.
Commence alors la période de l’anarchie militaire.
Le successeur de Sévère Alexandre, Maximin Ier dit le
Thrace, simple soldat sorti du rang de l’armée romaine, règnera trois ans avant
d’être assassiné à son tour.
Puis vint Gordien qui allait fonder une dynastie et qui ne
règnera pourtant que 20 jours, avant de mourir au combat à Carthage à moins
qu’il ne se soit pendu selon certaines sources. De ce court règne, des monnaies
ont été retrouvées, notamment à Claix.
Son fils, Gordien II, ne règnera également que 20 jours.
Amoureux des belles lettres, il possédait une bibliothèque de 62 000
ouvrages.
Vient ensuite Balbin, qui règnera à peine 97 jours avant
d’être tué à son tour par les prétoriens qui démontraient ainsi leur puissance
pour faire et défaire les empereurs.
Il en fut de même de son successeur Pupin.
Gordien III règnera quant à lui 5 ans avant de mourir au
combat contre les Perses. L’un des rares empereurs à mourir sans poignard ni
poison.
Vient alors Philippe Ier dit l’Arabe (car né en Arabie)
également pour 5 ans. Cette époque est l’une des plus confuses et des plus mal
connues de toute l’histoire de l’empire romain. Sous son règne, pas moins de
seize usurpateurs ont pris le titre d’Auguste, sans qu’aucun ne soit décédé de
mort naturelle.
Du 21 avril 247 au 21 avril 248, Philippe célèbre par des
fêtes grandioses la millième année de la fondation de Rome. L’espace d’une
année, ces fastes créent l’illusion que la puissance et la grandeur de Rome
sont encore intactes alors que l’empire vit en pleine anarchie. Philippe est
tué au combat en 249. Un trésor de son époque a été découvert et un autre,
substantiel, à la Rivière.
Philippe II, son fils, règnera 2 ans avant d’être assassiné
par les prétoriens. On connait de lui un trésor découvert à Vinay.
Son successeur, Trajan Dèce ne règnera pas plus et même
plutôt moins ? Il fera de son fils, Herennius Etruscus, un co-empereur qui
mourra peu après lors d’une bataille contre les Goths.
Trébonien Galle qui vient ensuite aura un court règne avant
de finir assassiné par ses propres soldats.
Après de fugitifs empereurs dont je vous fais grâce, vint
le tour de Valérien Ier qui règnera un peu plus de six ans avant d’être mis à
mort lui aussi. Peu avant, nous sommes alors en 259, il avait été capturé par
les Perses. Ce sera l’unique fois qu’un empereur sera capturé sur un champ de
bataille. Divers trésors locaux attestent néanmoins de son règne.
Puis vient Gallien, son fils, qui règnera 14 ans, durée
considérable pour l’époque. Cultivé, ami des arts, les chefs-d’œuvre
fleurissent en peinture et en sculpture sous son règne. Il finira néanmoins
égorgé. Un trésor de plusieurs milliers de ses pièces à été découvert à
Saint-Quentin- sur-Isère ou encore à Trept.
Mais, c’est ici qu’intervient ce que l’on a nommé l’empire
gaulois ou des « trente tyrans ». Leur règne fut court d’autant qu’il
existait de manière concomitante deux empereurs, l’officiel de Rome et un
usurpateur pour les Gaules. Je vous ferai grâce de ces trente tyrans bien
connus par l’Histoire Auguste.
Il s’agissait à l’époque non de faire sécession avec Rome
mais plutôt de protéger les Gaules.
En 268, Claude dit le Gothique, ainsi nommé en raison de
ses victoires sur les Goths, devient l’empereur officiel. Sous son règne, le
préfet du prétoire, c’est-à-dire quasiment un vice empereur, était Iulius
Placidianus dont j’ai eu maintes fois l’occasion de parler à propos des
inscriptions de Grenoble et de Vif.
De son époque, on a trouvé diverses monnaies et surtout à
Pierre-Châtel en 1813 quatre vases en argile contenant 30 000 monnaies. Il
s’agissait vraisemblablement de la solde des armées cantonnées à Grenoble.
Celle-ci fut sans doute enfouie par suite d’une grave insécurité locale. Un
trésor semblable a été également découvert au Fontanil.
Lui succède, fugitivement, son frère Quintille.
Et puis ce sera Aurélien qui finira assassiné et que le
Sénat divinisera aussitôt après. En cinq ans de règne celui-ci a pourtant
restauré l’intégrité de l’empire romain. Il a aussi refait le rempart de Rome
et une muraille en Grande-Bretagne qui portent tous deux son nom. De lui est
connu une partie du trésor de Saint-Vincent-de-Mercuze ainsi que le campus
Aureliani, le camp d’Aurélien, pouvant être situé à Chapareillan où les
armées d’Aurélien et de Placidianus auraient pu faire leur jonction.
Puis vient Tacite, un homme déjà fort âgé qui prétendait à
tort être parent du célèbre historien. Après six mois de règne, il est lui
aussi assassiné.
Lui succède Florien pour un court règne de 88 jours durant
lequel il fit néanmoins battre monnaie.
Ensuite, vint Probus de Pannonie, remarquable général qui,
après bien des conquêtes, périra lui-aussi par le glaive. Un trésor de son
règne a été découvert à la Rivière et un autre à la Buissière.
Lui succède Carus qui, selon sa biographie, serait mort par
la foudre mais plus probablement, comme ses prédécesseurs, ce dut être par
l’épée.
Puis, Numérien devient empereur avant d’être lui-aussi
assassiné. Une partie de l’un des trésors de Saint-Vincent-de-Mercuze lui est
consacrée.
Lui succède Cari, dit le diabolique, pour un bref règne
avant d’être tué à son tour. On a dit de lui qu’il prenait des bains glacés.
Arrivé en hiver dans une localité où on utilisa pour son bain l’eau d’une
source tiède, il aurait dit « c’est de l’eau pour femme que vous m’avez
préparée ».
Commence alors, enfin pourrait-on dire, une grande période
de stabilité : la tétrarchie ou gouvernement des quatre, deux Augustes
pour l’Orient et pour l’Occident et deux césars pour les assister et destinés à
leur succéder. Peut-être avez-vous vu à Venise, à la basilique Saint-Marc, la
statue de ces tétrarques ?
Dioclétien règne sur l’Orient et Maximien sur l’Occident. Ils
regroupent les provinces en douze grands diocèses gouvernés par des vicaires.
C’est sous leur règne que furent édifiés les remparts de Grenoble dont les
portes portaient leur dédicace.
Avec eux débute ce que l’on a appelé le Bas-Empire,
expression qui n’est pas péjorative par rapport au Haut-Empire commencé avec
Auguste. C’est seulement le changement d’un mode de gouvernance.
En 305, les deux empereurs renoncent à leur charge et ils
mourront paisiblement semble-t-il. Leurs succèdent alors leurs deux césars,
Constance Chlore dit Constance Ier et Galère qui ne règnent pas longtemps.
Sévère II vient alors pour un règne de moins de deux ans.
La tétrarchie est dès lors finie avec Maxence qui règnera
seul six ans et finira noyé et décapité, sa tête étant ramenée à Rome.
Puis, après de fugitifs empereurs, vient l’un des plus
importants personnages de l’empire, Constantin, dit le Grand, qui règnera plus
de trente ans. C’est lui qui fit du christianisme la région officielle de
l’empire. C’est également le fondateur de la nouvelle capitale impériale,
Constantinople après Trêves. Son règne constitue l’une des périodes d’apogée de
l’empire romain mais sa mort, naturelle semble-t-il, inaugure une période de
lutte pour le pouvoir entre ses fils qui va durer quinze ans.
Lorsqu’il meurt le 22 mai 337, Constantin laisse trois fils
adultes : Constantin II, Constance II et Constant. Un milliaire de son
époque subsiste à Saint-Paul-d’Izeaux où il sert de support au bénitier de
l’église et un autre contre le mur extérieur de l’église de
Saint-Clair-de-la-Tour.
Ils règnent successivement mais peu longtemps. J’ai eu le
privilège de visiter en Espagne le mausolée de Constant, dit de Constanti, fort
bien conservé avec une architecture totalement préservée et des fresques
somptueuses.
Licinius vient ensuite pour un règne de 15 ans, à cheval
sur l’Orient et l’Occident.
Maximin II, dit Maximin Daia, vient ensuite pour régner
quatre ans.
Lui succède Valens pour un règne de trente jours mais dont
on connait plusieurs monnaies.
Vient ensuite Martinien pour 300 jours.
Puis, c’est le tour de Constantin II dit le Jeune pour un
peu plus de deux ans.
Après le règne de Constant Ier qui durera douze ans, vint
celui de Constance II qui durera 24 ans.
Magnence vient ensuite, reconnu comme empereur en Gaule,
puis Népotien, neveu de Constantin le Grand pour seulement 27 jours.
Vient ensuite Julien II, dit l’Apostat qui édifia les
thermes de Lutèce, les plus importants du nord de la Gaule. Avec lui, s’éteint
le dernier survivant mâle de la famille de Constantin.
Puis vient Jovien pour 230 jours.
C’est ensuite le règne de Valentinien Ier, fondateur d’une
dynastie. Col2reux, il serait mort d’une crise d’apoplexie après avoir régné 11
ans. J’en ai conté l’histoire naguère dans l’un de mes livres.
Lui succède son frère Valens, resté malheureusement célèbre
du fait de la funeste bataille d’Andrinople où l’armée romaine fut anéantie par
la cavalerie gothique. Valens y perdit son honneur et sa vie. Le désastre
d’Andrinople marque le commencement de la fin de l’empire romain. Nous sommes
alors en 378. Un as à son effigie a été découvert à Claix.
Vient ensuite Gratien, personnage qui a laissé son nom à
Grenoble à défaut d’y n’être jamais venu. Son règne fut court et il finira
assassiné, comme tant d’autres.
Il résidera à Trèves, alors capitale de l’empire, où son
buste figure toujours.
J’ajoute, pour la petite histoire que j’ai tenté vainement,
avec d’autres, de faire attribuer une rue ou une place Gratien à Grenoble, mais
les édiles grenoblois semblaient ne pas savoir de qui il s’agissait.
Puis vint Maxime, que l’on disait énergique, honnête et bon
chrétien, qui règnera cinq ans avant de finir exécuté.
Puis Valentinien II, fils de Valentinien, devient empereur.
Il règnera plus de seize ans avant de périr étouffé.
Il fut co-empereur avec Théodose Ier, dit le Grand, quand
celui-ci lui succède. Nous sommes alors en janvier 379. Théodose règnera 15 ans
et mourra de mort naturelle.
Honorius lui succède pour un règne de 28, voire 30 ans. Une
longévité remarquable. Il meurt d’hydropisie, c’est-à-dire d’œdème.
Lui succède Théodose II pour un long règne qui durera 48
ans et 190 jours, le plus long de tout l’empire romain. Une certaine stabilité
existe alors dans l’empire et les troupes ont fini de faire et de défaire les
empereurs. Au demeurant, Théodose mourra d’une chute de cheval.
Lui succède Valentinien III qui règnera 29 ans. On a
découvert de lui une pièce en or à Saint-Paul-de-Varces. Que faisait-elle
là ?
On arrive maintenant vers la fin des empereurs romains.
Après quelques-uns dont le règne n’a pas laissé grand souvenir vint Marcien qui
règnera 6 ans jusqu’en 457. Il mourra d’une longue maladie.
Après le fugitif règne de Pétrone Maxime (74 jours) ;
il y eut Avile puis Léon Ier dit l’Isaurien qui règnera 16 ans puis Majorien
pour un peu plus de 4 ans et Sévère III pour une durée équivalente.
Vint alors le règne d’Anthelme pour une durée de 5 ans. Ce
sera le dernier empereur tué par ses troupes.
Il en vint alors un, dont le nom est devenu surnom à connotation
péjorative, Olybrius, mort également d’hydropisie.
Après les fugitifs règnes de Glycère et de Léon II, vient
Zénon pour un règne de 17 ans, achevé le 9 avril 491.
Puis, Jules Nespos et Basilic pour moins d’un an chacun.
Et nous arrivons à la fin de cette saga qui revisite cinq
siècles d’histoire.
Romulus Augustule sera le dernier empereur d’Occident. Il
sera déposé le 4 septembre 476 par Odoacre qui se déclare alors roi d’Italie et
renvoie les insignes impériaux à l’empereur d’Orient, Zénon.
Il n’y a dès lors plus d’empire romain d’Occident. L’empire
romain d’Orient subsistera quant à lui jusqu’au XVe siècle et la prise de
Constantinople par les turcs.
Selon la tradition, le premier prince de Rome était un
jeune homme et s’appelait Romulus. Par une facétie de l’histoire le dernier
empereur, treize ans plus tard, s’appelait aussi Romulus.