Conférence du 18 mars 2017

 

La grande saga des empereurs romains

 

L’on connait largement, je crois, mon intérêt, sinon ma passion, pour l’époque romaine.

Autant dire que, depuis longtemps, j’envisageais une telle conférence largement illustrée, d’autant que, par devers moi, j’ai de très nombreux documents et une large iconographie. Et même s’il fallait faire des choix cornéliens tant l’entreprise était hardie d’être résumée en une heure. C’est peu, vous en jugerez, pour cinq siècles d’empereurs romains. C’est quand même, le quart de notre histoire.

L’empire romain ce n’est, en effet, pas moins de 105 empereurs officiels et au moins plus du double d’usurpateurs. Tous nous sont connus par des textes, d’abondantes monnaies mais aussi, moins largement par leurs portraits et leurs statues surtout pour la partie la plus ancienne de ce récit.

D’ores et déjà dans le temps imparti, je ne les citerai pas tous, pas davantage que je ne citerai, sauf exception les Augusta c’est-à-dire les femmes d’empereurs ayant le titre d’impératrice. Il en ira de même pour les usurpateurs qui justifieraient à eux seuls une conférence dédiée. Celle-ci viendra peut-être le moment venu. C’est au demeurant une quasi histoire parallèle avec de beaux personnages dont certains ont concerné notre proche région.

Mais, nonobstant ces restrictions, c’est quand même un long parcours : de la fin du Ier siècle avant notre ère jusqu’au dernier tiers du Ve siècle. Il y aura pour agrémenter le propos quelques beaux portraits ou, à défaut, des monnaies fort belles aussi. Chaque fois que possible, je signalerai leur point de découverte dans notre département sans que cela ne soit exhaustif. Il y en a tellement !

Quel empereur romain voulut faire de son cheval un consul ? Qui édifia la Colisée ? (je vous rassure tout de suite, ce ne fut pas Néron, contrairement à la légende), lequel prit part à 735 combats de gladiateurs, même si ceux-ci étaient largement truqués ? Quels furent les plus longs règnes ou les plus courts ? Quel fut le dernier empereur romain d’Occident ?

Vous saurez tout cela très bientôt grâce à votre patience.

 

Mais commençons par le début et rendons à César ce qui lui est dû. César, contrairement à l’imaginerie populaire, ne fut jamais empereur. Selon le beau mot de Chateaubriand « il fit de son nom un titre supérieur à celui des rois et des empereurs ». Dictateur provisoire puis à vie, il sera assassiné le 15 des Ides de mars, en 44 avant notre ère. Il s’ensuivit alors une guerre civile, l’une des plus graves que Rome ait connues.

Peu avant, adopté par César son grand-oncle, Octave se révèle être son héritier à défaut de descendants directs, tous morts prématurément. Fort de cet héritage, il forme un triumvirat avec Antoine et Lépide avant de rompre avec eux et de vaincre Antoine à la célèbre bataille d’Actium. Antoine se suicider alors à Alexandrie avec Cléopâtre, la belle reine d’Egypte au nez resté légendaire.

Consul tous les ans, Octave se voit conférer en 26 avant notre ère, le titre d’Auguste, mot quelque peu archaïque signifiant sacré ou vénéré. Tel sera donc son nom et ce titre subsistera au-delà de lui durant toute la durée de l’empire romain jusqu’à l’extrême fin de celui-ci.

Il parait ici nécessaire de dire quelques mots sur la titulature romaine d’Auguste à sa mort :

« Imperator Caesar », expression qui servira dès lors à désigner tous les empereurs jusqu’au IVe siècle.

« Divi filus Augustus », son fils divin Auguste.

« Pontifex maximus », grand pontife, c’est-à-dire chef de la religion romaine. Le titre ne sera abandonné que sous Gratien en 383 mais il subsiste depuis lors pour les papes.

« Consul » suivi du nombre de consulats : titre des principaux magistrats de Rome, élus ou réélus chaque année.

« Imperator », titre honorifique accordé à un général romain par ses soldats à la suite d’une victoire.

« Tribunicia potestalis », puissance tribunicienne renouvelée chaque année. Auguste en comptait 37.

« Pater patriae », père de la patrie ; Titre purement honorifique conféré à l’origine en 63 avant notre ère par le Sénat à Cicéron puis repris par César, Auguste et leurs successeurs.

Mais, nous ne sommes pas ici pour étudier la riche vie d’Auguste. Sachez néanmoins qu’il a régné 44 ans et transformé, ou plutôt créé l’empire romain. Il est mort dans son lit à l’âge de 76 ans, de diarrhée semble-t-il. Chose rare pour tous les empereurs comme vous pourrez le constater. Dans son testament, il peut écrire : « Rome que j’ai reçue de brique, je vous la laisse de marbre ». Ce qui n’était pas inexact. Une monnaie de lui a été récemment découverte à Jarrie. On en connait peu d’autres dans notre département. Auguste avait sans doute d’autres priorités. Mais les monnaies circulaient dans tout l’empire quand bien même elles étaient obsolètes.

Un mot sur Livie, sa seconde épouse. Vous connaissez sans doute le temple d’Auguste et de Livie à Vienne. Livie demeura durant 52 ans son épouse ? On a dit que la dernière phrase d’Auguste fut pour elle : « Livie, conserve le souvenir de notre union ». Pourtant, il n’avait guère été fidèle si l’on en croit ses biographes.

Le second empereur est Tib7re, fils de Livie, qu’Auguste avait adopté. Un mot sur l’adoption en droit romain. Elle existait bien avant César mais se généralisera à compter d’Auguste. En effet, il était courant à défaut d’héritier direct d’adopter en enfant, un neveu, un parent, voire même un étranger en vue d’une succession.

Mais, nous sommes en 14 avant notre ère. Tibère prend aussitôt des mesures pour limiter les pouvoirs de Livie que le testament d’Auguste avait fait Augusta.

Très vite, le nouvel empereur fuit Rome pour Capri où il fait édifier une somptueuse demeure. C’est sous son règne, on le sait peu, que le Christ fut crucifié mais vraisemblablement pas sur son ordre. En 37, Tibère meurt à l’âge de 77 ans. A propos de sa mort Tacite rapporte une anecdote pittoresque. Caligula, son fils par adoption, aurait retiré la bague de l’empereur qu’il croyait mort et aurait alors été proclamé à sa place. On aurait cependant appris à ce moment-là que Tibère revenait à lui et demandait à manger. Le chef de la garde prétorienne, Macron, l’aurait alors étouffé avec un coussin. Ainsi serait-il mort.

Vient alors Caligula, c’est-à-dire littéralement « la petite bottine », adopté par Tibère et son fameux cheval Incitatus qui possédait une écurie de marbre et dont il voulut faire un consul ! Dans les derniers mois de son règne, il adopta l’apparence d’une divinité bien que sa santé ne fût équilibrée ni au physique ni au moral selon Suétone. En 40, il est assassiné. C’est le second après Tibère d’une fort longue liste comme vous pourrez en juger par ce qui suivra.

Lui succède son petit fils Claude qui n’est guère aimé par sa mère qui le décrit comme « un monstre que la nature n’a pas achevé mais seulement esquissé ». Alcoolique, il s’immerge néanmoins dans la recherche historique, écrit des livres et même une autobiographie. Il meurt empoisonné après avoir été longtemps dominé par sa troisième femme Messaline que vous connaissez sans doute de surnom. On gardera de Claude que c’est l’un des rares empereurs à avoir conquit la Grande-Bretagne.

Puis vint Néron, adopté par Claude, dit le malade ou le cruel qui fit assassiner sa mère après avoir tenté de la noyer. Néron restera célèbre par l’incendie de Rome qu’on lui impute mais qui ne fut peut-être que fortuit et la persécution des chrétiens qui, elle, fut certaine. Un monstre au demeurant qui se suicidera d’un poignard dans la gorge le 11 juin 68.

Vient ensuite Galba au physique franchement repoussant : chauve, les yeux bleu sombre, le nez aquilin et de petite taille. Il périra sous le glaive de même que son successeur Pison. On dit qu’on promena leurs têtes sur le Champ de Mars à Rome.

Leur successeur, Othon, ne règnera que trois mois et se suicidera pour ne pas tomber dans les mains de son rival Vitellius.

Celui-ci se trouvait à la bonne place et au bon moment. Il devint donc empereur mais mourra aussi poignardé et son cadavre sera jeté dans le Tibre. Même s’il ne fut pas un empereur très brillant, il ne méritait sans doute pas une fin aussi terrible. On a dit de lui que c’était un colosse d’une gloutonnerie phénoménale. Avec lui prend la fin de la dynastie Julio-claudienne.

Commence alors l’ère des flaviens avec Vespasien, nommé « le bien aimé ». Ayant obtenu les faveurs d’une dame fort consentante, celui-ci lui aurait fait cadeau de 400 000 sesterces, somme alors considérable. A son trésorier qui lui demandait sous quel titre il devait enregistrer la dépense, il aurait répondu : « de Vespasien le bien aimé ». Son épouse, Flavia Domitilla lui donna deux fils : Titus et Domitien. Vespasien règnera dix ans et vous connaissez sans doute les toilettes de son règne encore appelées au XIXe siècle « vespasiennes ». C’est encore lui, on le sait trop peu, qui édifia le Colisée de Rome et non Néron comme on le dit trop fréquemment.

Titus luis succède. On connait sa passion pour Bérénice par les vers tragiques de Racine. Ne guérit-on jamais d’un chagrin d’amour ? Il va néanmoins se forger l’une des meilleures réputations parmi les empereurs romains. Pour vous situer dans le temps, c’est sous son règne que le Vésuve détruit Pompéi et Herculanum. Il meurt empoisonné semble-t-il par son frère Domitien.

Celui-ci, âgé de 30 ans, lui succède alors. C’est le dernier de la dynastie flavienne qui n’aura, en fait, durée que 27 ans. Autocrate bienveillant et administrateur compétent, il meurt néanmoins après 15 ans de règne sous le poignard. Seule l’armée pleurera sa mort. Un as de son époque a été découvert à Claix, au Val d’Allières.

Commence alors le règne des Antonins avec Nerva. Il a alors 66 ans. Après un règne paisible de deux ans, il meurt de mort naturelle à la suite semble-t-il d’un accès de colère, sans doute déjà un infarctus. L’un des rares empereurs à mourir paisiblement si l’on peut dire.

En 96, Trajan, alors gouverneur de la Germanie Supérieure, reçoit un message de l’empereur qui l’informe de son adoption. On connait de lui la célèbre colonne Trajane de Rome. Il excelle dans la guerre et conquiert la Dacie puis il part à la conquête de l’Orient. Il meurt néanmoins empoisonné. Au Moyen Âge, Dante en fait le seul de tous les empereurs non chrétiens à avoir au paradis.

Un mot sur Matidia, sa nièce, qui fut Augusta dont on conserve l’une des plus belles sculptures de l’époque romaine.

Lui succède Hadrien, son fils adoptif. Que je vous dise encore un mot sur l’adoption romaine que j’ai déjà évoquée. Très fréquemment depuis César, des parents même lointains étaient adoptés par les empereurs en vue d’une succession probable. Ce fut le cas pour Auguste, pour Tibère et pour bien d’autres ensuite dont Hadrien. Celui-ci poursuit les conquêtes et bâtit le fameux « mur d’Hadrien » en Grande-Bretagne. Dans le même temps, il construit le panthéon de Rome et ce qui deviendra le château Saint-Ange. Par ailleurs, on connait des voyages dans tout l’empire romain, restés célèbres. Il meurt paisiblement semble-t-il. Sa statue avec son épouse Sabine est conservée au musée de Vaison-la-Romaine. Curieusement, on a découvert un buste de lui à Goncelin, aujourd’hui au Musée Dauphinois.

Puis vient Antonin le Pieux qui a eu la chance de régner durant 23 ans sur un empire jouissant de la pax romana. La maladie qui l’emporte est assez soudaine. Son biographe l’attribue à un abus de fromage des Alpes. Il meurt donc dans son lit à l’âge de 74 ans. Un milliaire de lui est visible à Chanas.

Lui succède son fils adoptif Marc-Aurèle qui désigne, chose rare, comme co-empereur Lucius Verus également adopté par Antonin. Son règne est marqué par des guerres rudes et incessantes. On connait de lui ses « pensées », celles d’un homme d’une certaine grandeur d’âme. On garde aussi de lui à Rome l’unique sculpture de l’antiquité à représenter un empereur sur son cheval. Il meurt, sans doute empoisonné ou étranglé tout comme Lucius Verus. Plusieurs films et notamment « la chute de l’empire romain » ou « Gladiator » évoquent sa fin tragique.

Vient ensuite Commode, son fils, dont la passion était l’arène plus que l’empire. C’est lui qui aurait fait 735 combats dans l’arène, tous truqués, dont il sortait naturellement vainqueur. Comme nombre de ses prédécesseurs, il meurt empoisonné.

Lui succède Pertinax, sorti du rang, acclamé par ses soldats mais ratifié par le Sénat, qui ne règnera pourtant que 2 mois et 27 jours. Il sera assassiné, sa tête étant alors portée sur une pique par les prétoriens.

Puis vient Dide Julien, d’une famille de sénateurs, mis à mort lui aussi après 66 jours de règne. Selon ses détracteurs, il était aussi gourmand que vaniteux et aussi vaniteux que riche. Toutefois, l’Histoire Auguste le dit modeste et végétarien.

Ses successeurs Pescennius Niger et Clodius Albinus après un court règne connaissent la même fin.  

La plupart du temps en ce deuxième siècle de notre ère, il ne faisait pas bon d’être empereur. Ce qui m’a toujours surpris c’est que, même pour les règnes les plus courts, leur obsession était de battre monnaie. On en a des témoignages dans tout l’empire, ce qui montre que la monnaie circulait de partout et que l’on perdait beaucoup de pièces quand on ne les enterrait pas volontairement.

Septime Sévère est alors nommé empereur. C’est le premier à être issu d’Afrique du Nord. Il meurt, chose rare pour l’époque, dans son lit nonobstant les crises de goutte qui l’handicapaient. Il aura néanmoins régné 18 ans. On a trouvé de lui des monnaies à Brié et à Jarrie.

Caracalla lui succède. Ce surnom, qui est resté, ne lui fut donné qu’après sa mort. Son nom latin était Septimus Bassianus. Le simple fait que Caracalla ait eu une réputation détestable n’en fait pas pour autant un mauvais empereur. En effet, c’est lui qui promulguera l’édit resté célèbre sous son nom accordant à tous les habitants de l’empire la citoyenneté romaine. C’es également lui qui ordonnera que les voies romaines soient rechargées de brique. C’est depuis lors que tant de nos chemins recèlent des briques. Il a bâti également les très grands thermes de Rome qui portent son nom. Après 19 ans de règne, il finira néanmoins assassiné.

Après le fugitif règne de son frère, Geta, vient celui de Macrin durant un peu plus d’un an. D’origine maure, né à Césarée, il fit de nombreuses guerres avant d’être battu à Antioche puis assassiné. On dispose de lui, au musée de Belgrade, l’un des plus beaux portraits de l’antiquité.

Son fils Diadumenien, fugitif empereur connaitra le même sort.

Vient ensuite Elagabale qui prit à son avènement le nom du dieu de la montagne qu’il adorait. Il finit, après quatre ans de règne, également assassiné.

Commence alors la dynastie des Sévères dont le premier fut Alexandre (qui avait pris ce nom en hommage à Alexandre le Grand) qui finit par l’épée comme ses prédécesseurs après 13 ans de règne.

Un mot sur sa mère, Julia Mamaea, co-régente, nommée « mère de l’empereur, du Sénat et de la patrie » puis « mère de tout le genre humain », à l’égale d’Eve.

Commence alors la période de l’anarchie militaire.

Le successeur de Sévère Alexandre, Maximin Ier dit le Thrace, simple soldat sorti du rang de l’armée romaine, règnera trois ans avant d’être assassiné à son tour.

Puis vint Gordien qui allait fonder une dynastie et qui ne règnera pourtant que 20 jours, avant de mourir au combat à Carthage à moins qu’il ne se soit pendu selon certaines sources. De ce court règne, des monnaies ont été retrouvées, notamment à Claix.

Son fils, Gordien II, ne règnera également que 20 jours. Amoureux des belles lettres, il possédait une bibliothèque de 62 000 ouvrages.

Vient ensuite Balbin, qui règnera à peine 97 jours avant d’être tué à son tour par les prétoriens qui démontraient ainsi leur puissance pour faire et défaire les empereurs.

Il en fut de même de son successeur Pupin.

Gordien III règnera quant à lui 5 ans avant de mourir au combat contre les Perses. L’un des rares empereurs à mourir sans poignard ni poison.

Vient alors Philippe Ier dit l’Arabe (car né en Arabie) également pour 5 ans. Cette époque est l’une des plus confuses et des plus mal connues de toute l’histoire de l’empire romain. Sous son règne, pas moins de seize usurpateurs ont pris le titre d’Auguste, sans qu’aucun ne soit décédé de mort naturelle.

Du 21 avril 247 au 21 avril 248, Philippe célèbre par des fêtes grandioses la millième année de la fondation de Rome. L’espace d’une année, ces fastes créent l’illusion que la puissance et la grandeur de Rome sont encore intactes alors que l’empire vit en pleine anarchie. Philippe est tué au combat en 249. Un trésor de son époque a été découvert et un autre, substantiel, à la Rivière.

Philippe II, son fils, règnera 2 ans avant d’être assassiné par les prétoriens. On connait de lui un trésor découvert à Vinay.

Son successeur, Trajan Dèce ne règnera pas plus et même plutôt moins ? Il fera de son fils, Herennius Etruscus, un co-empereur qui mourra peu après lors d’une bataille contre les Goths.

Trébonien Galle qui vient ensuite aura un court règne avant de finir assassiné par ses propres soldats.

Après de fugitifs empereurs dont je vous fais grâce, vint le tour de Valérien Ier qui règnera un peu plus de six ans avant d’être mis à mort lui aussi. Peu avant, nous sommes alors en 259, il avait été capturé par les Perses. Ce sera l’unique fois qu’un empereur sera capturé sur un champ de bataille. Divers trésors locaux attestent néanmoins de son règne.

Puis vient Gallien, son fils, qui règnera 14 ans, durée considérable pour l’époque. Cultivé, ami des arts, les chefs-d’œuvre fleurissent en peinture et en sculpture sous son règne. Il finira néanmoins égorgé. Un trésor de plusieurs milliers de ses pièces à été découvert à Saint-Quentin- sur-Isère ou encore à Trept.

Mais, c’est ici qu’intervient ce que l’on a nommé l’empire gaulois ou des « trente tyrans ». Leur règne fut court d’autant qu’il existait de manière concomitante deux empereurs, l’officiel de Rome et un usurpateur pour les Gaules. Je vous ferai grâce de ces trente tyrans bien connus par l’Histoire Auguste.         

Il s’agissait à l’époque non de faire sécession avec Rome mais plutôt de protéger les Gaules.

En 268, Claude dit le Gothique, ainsi nommé en raison de ses victoires sur les Goths, devient l’empereur officiel. Sous son règne, le préfet du prétoire, c’est-à-dire quasiment un vice empereur, était Iulius Placidianus dont j’ai eu maintes fois l’occasion de parler à propos des inscriptions de Grenoble et de Vif.

De son époque, on a trouvé diverses monnaies et surtout à Pierre-Châtel en 1813 quatre vases en argile contenant 30 000 monnaies. Il s’agissait vraisemblablement de la solde des armées cantonnées à Grenoble. Celle-ci fut sans doute enfouie par suite d’une grave insécurité locale. Un trésor semblable a été également découvert au Fontanil.

Lui succède, fugitivement, son frère Quintille.

Et puis ce sera Aurélien qui finira assassiné et que le Sénat divinisera aussitôt après. En cinq ans de règne celui-ci a pourtant restauré l’intégrité de l’empire romain. Il a aussi refait le rempart de Rome et une muraille en Grande-Bretagne qui portent tous deux son nom. De lui est connu une partie du trésor de Saint-Vincent-de-Mercuze ainsi que le campus Aureliani, le camp d’Aurélien, pouvant être situé à Chapareillan où les armées d’Aurélien et de Placidianus auraient pu faire leur jonction.

Puis vient Tacite, un homme déjà fort âgé qui prétendait à tort être parent du célèbre historien. Après six mois de règne, il est lui aussi assassiné.

Lui succède Florien pour un court règne de 88 jours durant lequel il fit néanmoins battre monnaie.

Ensuite, vint Probus de Pannonie, remarquable général qui, après bien des conquêtes, périra lui-aussi par le glaive. Un trésor de son règne a été découvert à la Rivière et un autre à la Buissière.

Lui succède Carus qui, selon sa biographie, serait mort par la foudre mais plus probablement, comme ses prédécesseurs, ce dut être par l’épée.

Puis, Numérien devient empereur avant d’être lui-aussi assassiné. Une partie de l’un des trésors de Saint-Vincent-de-Mercuze lui est consacrée.

Lui succède Cari, dit le diabolique, pour un bref règne avant d’être tué à son tour. On a dit de lui qu’il prenait des bains glacés. Arrivé en hiver dans une localité où on utilisa pour son bain l’eau d’une source tiède, il aurait dit « c’est de l’eau pour femme que vous m’avez préparée ».

Commence alors, enfin pourrait-on dire, une grande période de stabilité : la tétrarchie ou gouvernement des quatre, deux Augustes pour l’Orient et pour l’Occident et deux césars pour les assister et destinés à leur succéder. Peut-être avez-vous vu à Venise, à la basilique Saint-Marc, la statue de ces tétrarques ?

Dioclétien règne sur l’Orient et Maximien sur l’Occident. Ils regroupent les provinces en douze grands diocèses gouvernés par des vicaires. C’est sous leur règne que furent édifiés les remparts de Grenoble dont les portes portaient leur dédicace.

Avec eux débute ce que l’on a appelé le Bas-Empire, expression qui n’est pas péjorative par rapport au Haut-Empire commencé avec Auguste. C’est seulement le changement d’un mode de gouvernance.

En 305, les deux empereurs renoncent à leur charge et ils mourront paisiblement semble-t-il. Leurs succèdent alors leurs deux césars, Constance Chlore dit Constance Ier et Galère qui ne règnent pas longtemps. Sévère II vient alors pour un règne de moins de deux ans.

La tétrarchie est dès lors finie avec Maxence qui règnera seul six ans et finira noyé et décapité, sa tête étant ramenée à Rome.

Puis, après de fugitifs empereurs, vient l’un des plus importants personnages de l’empire, Constantin, dit le Grand, qui règnera plus de trente ans. C’est lui qui fit du christianisme la région officielle de l’empire. C’est également le fondateur de la nouvelle capitale impériale, Constantinople après Trêves. Son règne constitue l’une des périodes d’apogée de l’empire romain mais sa mort, naturelle semble-t-il, inaugure une période de lutte pour le pouvoir entre ses fils qui va durer quinze ans.

Lorsqu’il meurt le 22 mai 337, Constantin laisse trois fils adultes : Constantin II, Constance II et Constant. Un milliaire de son époque subsiste à Saint-Paul-d’Izeaux où il sert de support au bénitier de l’église et un autre contre le mur extérieur de l’église de Saint-Clair-de-la-Tour.

Ils règnent successivement mais peu longtemps. J’ai eu le privilège de visiter en Espagne le mausolée de Constant, dit de Constanti, fort bien conservé avec une architecture totalement préservée et des fresques somptueuses.

Licinius vient ensuite pour un règne de 15 ans, à cheval sur l’Orient et l’Occident.

Maximin II, dit Maximin Daia, vient ensuite pour régner quatre ans.

Lui succède Valens pour un règne de trente jours mais dont on connait plusieurs monnaies.

Vient ensuite Martinien pour 300 jours.

Puis, c’est le tour de Constantin II dit le Jeune pour un peu plus de deux ans.

Après le règne de Constant Ier qui durera douze ans, vint celui de Constance II qui durera 24 ans.

Magnence vient ensuite, reconnu comme empereur en Gaule, puis Népotien, neveu de Constantin le Grand pour seulement 27 jours.

Vient ensuite Julien II, dit l’Apostat qui édifia les thermes de Lutèce, les plus importants du nord de la Gaule. Avec lui, s’éteint le dernier survivant mâle de la famille de Constantin.

Puis vient Jovien pour 230 jours.

C’est ensuite le règne de Valentinien Ier, fondateur d’une dynastie. Col2reux, il serait mort d’une crise d’apoplexie après avoir régné 11 ans. J’en ai conté l’histoire naguère dans l’un de mes livres.

Lui succède son frère Valens, resté malheureusement célèbre du fait de la funeste bataille d’Andrinople où l’armée romaine fut anéantie par la cavalerie gothique. Valens y perdit son honneur et sa vie. Le désastre d’Andrinople marque le commencement de la fin de l’empire romain. Nous sommes alors en 378. Un as à son effigie a été découvert à Claix.

Vient ensuite Gratien, personnage qui a laissé son nom à Grenoble à défaut d’y n’être jamais venu. Son règne fut court et il finira assassiné, comme tant d’autres.

Il résidera à Trèves, alors capitale de l’empire, où son buste figure toujours.

J’ajoute, pour la petite histoire que j’ai tenté vainement, avec d’autres, de faire attribuer une rue ou une place Gratien à Grenoble, mais les édiles grenoblois semblaient ne pas savoir de qui il s’agissait.

Puis vint Maxime, que l’on disait énergique, honnête et bon chrétien, qui règnera cinq ans avant de finir exécuté.

Puis Valentinien II, fils de Valentinien, devient empereur. Il règnera plus de seize ans avant de périr étouffé.

Il fut co-empereur avec Théodose Ier, dit le Grand, quand celui-ci lui succède. Nous sommes alors en janvier 379. Théodose règnera 15 ans et mourra de mort naturelle.

Honorius lui succède pour un règne de 28, voire 30 ans. Une longévité remarquable. Il meurt d’hydropisie, c’est-à-dire d’œdème.

Lui succède Théodose II pour un long règne qui durera 48 ans et 190 jours, le plus long de tout l’empire romain. Une certaine stabilité existe alors dans l’empire et les troupes ont fini de faire et de défaire les empereurs. Au demeurant, Théodose mourra d’une chute de cheval.

Lui succède Valentinien III qui règnera 29 ans. On a découvert de lui une pièce en or à Saint-Paul-de-Varces. Que faisait-elle là ?

On arrive maintenant vers la fin des empereurs romains. Après quelques-uns dont le règne n’a pas laissé grand souvenir vint Marcien qui règnera 6 ans jusqu’en 457. Il mourra d’une longue maladie.

Après le fugitif règne de Pétrone Maxime (74 jours) ; il y eut Avile puis Léon Ier dit l’Isaurien qui règnera 16 ans puis Majorien pour un peu plus de 4 ans et Sévère III pour une durée équivalente.

Vint alors le règne d’Anthelme pour une durée de 5 ans. Ce sera le dernier empereur tué par ses troupes.

Il en vint alors un, dont le nom est devenu surnom à connotation péjorative, Olybrius, mort également d’hydropisie.

Après les fugitifs règnes de Glycère et de Léon II, vient Zénon pour un règne de 17 ans, achevé le 9 avril 491.

Puis, Jules Nespos et Basilic pour moins d’un an chacun.

Et nous arrivons à la fin de cette saga qui revisite cinq siècles d’histoire.

Romulus Augustule sera le dernier empereur d’Occident. Il sera déposé le 4 septembre 476 par Odoacre qui se déclare alors roi d’Italie et renvoie les insignes impériaux à l’empereur d’Orient, Zénon.

Il n’y a dès lors plus d’empire romain d’Occident. L’empire romain d’Orient subsistera quant à lui jusqu’au XVe siècle et la prise de Constantinople par les turcs.

Selon la tradition, le premier prince de Rome était un jeune homme et s’appelait Romulus. Par une facétie de l’histoire le dernier empereur, treize ans plus tard, s’appelait aussi Romulus.