LA FAMILLE SEIGNEURIALE DE CLAIX du XIIème au XVème siècles

 

J’ai consacré un temps très appréciable à l’étude de cette famille, qui explique peut être le nom de Claix, d’autant qu’un certain Michel de Claix – assurément homonyme fortuitement mais non ancêtre puisque mes origines assurées sont en Oisans – vécut en ces lieux partie sur un 14ème siècle finissant et partie sur un 15ème siècle naissant.

Après de longues années de gestation, sans doute justifiées par une recherche systématique et un constant souci de cohérence globale, j’ai estimé, en juin 1992, que le moment était sans doute venu de publier, alors dans la revue d’histoire des Amis de la Vallée de la Gresse, une étude qui a reçu, alors un accueil élogieux puis ultérieurement pour l’Académie Delphinale. La présente synthèse résulte, pour l’essentiel, de cette publication que j’ai, depuis lors, un peu complétée au hasard de recherches postérieures.

Eu égard à la complexité du sujet, j’ai cru utile – pour les futurs historiens – de citer toutes les sources auxquelles je me suis référé.

Cette contribution a nécessité, faut-il le souligner, de longues et patientes recherches systématiques aux sources les plus fondamentales au plan local : la série « B » des Archives Départementales de l’Isère, le Regeste Dauphinois d’Ulysse CHEVALLIER, le Fonds Dauphinois de la Bibliothèque Municipale de Grenoble et les archives de l’évêché de Grenoble qui m’ont été communiquées par l’érudit Abbé COFFIN, archiviste de ce même évêché.

La mise en forme a nécessité un travail moindre mais méticuleux et semé d’embûches.

A cet égard, même si cette synthèse peut donner l’impression d’un travail achevé, un certain nombre d’incertitudes – voire d’incohérences – subsistent encore dans mon esprit : différents hiatus peuvent ainsi apparaître au lecteur averti : ils résultent de l’approximation de rédaction des certains actes médiévaux étudiés et, surtout, de la destruction irrémédiable de ceux dont la connaissance aurait pu éviter les nécessaires extrapolations auxquelles j’ai du recourir.

La réalité médiévale consistant à attribuer aux héritiers des familles nobles les prénoms ancestraux, l’incertitude de certaines dates ou leur approximation et le « flou » rédactionnel de certains actes n’ont guère facilité la recherche globale ; c’est ainsi que l’on aura, tout comme moi, quelques difficultés à s’y retrouver dans les différents Guillaume, Isnard, Isoard et autres Amblard de Claix.

Mais que l’on ne s’y méprenne point. Bien que je les aie côtoyés durant une très longue période, les choses n’ont guère été plus faciles pour moi. Il m’a néanmoins semblé que cette inédite synthèse de la famille de Claix, jusqu’alors profondément ignorée sinon méconnue par les historiens, devait être tentée et qu’elle pouvait être une contribution utile à l’histoire de Claix et de ses environs et, au-delà, à l’histoire même du Dauphiné..

La famille de Claix parait avoir tiré son patronyme de la terre du même nom : l’inverse, sans être totalement improbable, ne me parait guère vraisemblable.

Le nom même de Claix (Cf. annexe 1) est d’origine discutable : peut être vient-il, comme on l’a suggéré, de « glaise, glaison » (1) ou du bas latin « cleta » ou « cleya » qui a donné « claie », c'est-à-dire la clôture (2).

(1)  Louis ROYER : notes manuscrites sur Claix, dossier R 10319, BMG

(2)  L. D. BEZEGHER : Claix et Pont de Claix à travers les siècles, 1968

Mais ceci n’est guère satisfaisant, pas davantage que ne l’est l’explication faisant dériver ce nom de « cal », pouvant signifier la pierre, la montagne ou encore la hauteur (3).

L’explication toponymique faisant remonter le nom du lieu à un domaine gallo romain, en l’occurrence celui d’un nommé CLAVIUS (4) me parait nettement plus convaincante. En effet, sans être abondants, les vestiges romains sur Claix sont largement tangibles : viculus d’Allières, vestiges de Rochefort, ferme gallo romaine du Cellier… (5)  et peuvent, jusqu’à preuve du contraire, corroborer cette hypothèse.

Ce qui complique cette problématique est que le nom du village et celui de la famille qui pourrait en avoir pris le nom apparaissent à peu près dans le même temps.

En effet, dès l’an 1100 environ (6) est mentionnée dans le cartulaire de Saint Hugues, évêque de Grenoble, une « ecclesia de Clais » et le premier membre connu de la famille de Claix, GIRAUD (Géraldus, Giraldus), qui était alors chanoine de l’église cathédrale de Grenoble, apparaît précisément en 1108 (7). Ce Géraldus de Claix est ensuite régulièrement cité dans divers actes qui s’échelonnent de 1108 à 1111 (8). Dès cette époque lointaine, la famille de CLAIX apparaît donc comme ayant des attaches certaines avec le chapitre de la cathédrale Notre Dame de Grenoble. Ceci est fondamental car, ainsi qu’on le verra, le Chapitre sera depuis ces temps anciens et jusqu’à la Révolution le co seigneur, puissant, constant et souvent dominant de la terre de Claix.

Cette famille était sans doute de haute lignée car, selon Guy ALLARD, les chanoines de l’église cathédrale devaient être anciennement nobles (9).

L’an 1100 est une période un peu mythique. C’est l’époque où les châteaux de terre se transforment en châteaux de pierre. Le souverain régnant est alors Pierre 1er. Au plan local, le Dauphiné est alors dominé par Guigues III dit le Comte (10).

Comme de nombreuses régions, celle qui nous intéresse ici voit naître et se mettre en place de nouvelles structures. Regroupés autour de son église, parfois de son prieuré, de son cimetière, souvent de son château, l’habitat rural s’établit et s’organise pour former véritablement une communauté villageoise dont les différentes composantes perdureront jusqu’à nous. L’an 1100 est également le creuset d’où surgissent la plupart des familles seigneuriales qui marqueront la vie de chaque village durant tout le moyen âge. Peut être en était-il déjà ainsi pour la famille de Claix ?

Mais c’est surtout à partir du 13ème siècle que l’histoire de cette famille – mais aussi de la terre de Claix – commence à se préciser de façon plus complète ainsi que les efforts du chapitre Notre Dame de Grenoble pour se faire reconnaître la seigneurie temporelle de Claix.

(3)  P. L. ROUSSET : les Alpes et leurs noms de lieux, 6000 ans d’histoire, 1968

(4)  DAUZAT : les noms de lieux, origine et évolution, 1946 ; P. H. BILLY : origine des noms des villes et des villages de France, 1981 

(5)  Voir à cet égard le présent site Internet  

(6)  Date incertaine comprise sous l’épiscopat de Saint Hugues entre 1080 et 1120

(7)  J. MARION : cartulaires de l’église cathédrale de Grenoble dits cartulaires de Saint Hugues, 1869 

(8)  Le 30 avril 1108, cartulaires de Saint Hugues, charte 119 B, 9 septembre 1108, 30 mai 1109, 9 juin 1911, cartulaires précités (5 A, 15 B, 24 B, 101 et 102 B)

(9)  Guy ALLARD : dictionnaire du Dauphiné, manuscrit du 17ème siècle publié en 1864

(10)   voir en annexe 2 la table chronologique des différents dauphins

On ne connaît malheureusement pas de manière précise la date à laquelle le chapitre Notre Dame avait pris pied à Claix. On peut évidemment supposer que cela remonte à une fort lointaine origine. J’ai par ailleurs expliqué que, dès Saint Hugues, ce même chapitre possédait la terre de Marcelline, alors sur Claix (11).

De plus, l’église de Claix est citée dès la fin du 11ème siècle (12). Or l’on sait précisément que le cartulaire, qui donne la liste des églises existant vers 1100, ne mentionne que celles relevant de la directe de l’évêque (13) ce qui exclut toutes les autres.

Par ailleurs, le fait que cette église ait été, dès au moins cette haute origine, placée sous le patronage de Saint Pierre laisse augurer une très haute origine possible. Georges de MANTEYER a en effet expliqué (14) que les églises sous le patronage de l’apôtre pouvaient remonter à une haute antiquité qu’il situait à la fin de la période gallo romaine (vers 432 – 440). Mais, outre le chapitre Notre Dame, le monastère clunisien de Domène possédait lui aussi certains biens sur Claix depuis une époque au moins aussi ancienne, sinon plus ancienne encore. Le 10 août 1058, en effet, lors de la dédicace du monastère de Domène, l’énumération de ses biens mentionne des terres, vignes, prés et bois à « Malum Consilium » (15) c'est-à-dire Cossey, ce hameau de Claix situé à l’ouest du rocher de Comboire. Quoiqu’il en soit, au début du 13ème siècle, l’emprise du chapitre Notre Dame sur Claix est certaine. En effet, par un acte  de janvier 1215 (16) la dame Boveria, femme de feu Girard de Clérieu et ses fils Chabert, Guillaume et Didier font hommage au chapitre (17) de ce qu’ils ont à Claix sous la dépendance annuelle d’une livre.

Cette reconnaissance est la plus ancienne connue à l’égard du chapitre qui atteste de la domination que celui-ci avait établie sur la terre de Claix. Par contre, on ignore tout de la famille de Claix à cette époque ; avait-elle la seigneurie complète de cette terre ou n’était-elle qu’une des grandes familles féodales qui pouvaient se partager Claix, tels les Clérieu attestés dans l’acte précité et qui étaient implantés localement notamment à Lans en Vercors (18) et surtout les Sassenage dont les terres jouxtaient celles de Claix ?

En 1219, on trouve mention d’un Didier de Claix, « vestiaire » (19).

Les deux premiers seigneurs de la famille de Claix possédant peut être en franc alleu (20) la terre de ce nom qui soient connus avec certitude sont les frères Isnard (ou Isoard) et Amblard de Claix. Leurs armes étaient « d’argent au chevron d’azur accolé de trois croisettes tréflées des mêmes » (21)

(11)   Voir mon étude : un très ancien domaine, Marcelline, bulletin des AVG n° 28 des AVG, décembre 1991

(12)   Cartulaires de Saint Hugues, op. cit. 192

(13)   Des Burgondes à Bayard, ouvrage collectif 1981 – 1984, notice n° 409

(14)   Georges de MANTEYER : les origines de la Seconde Narbonnaise, 1924

(15)   Cartulaire de Domène 1-4, n° 1 ; Nicolas CHORIER : Histoire générale du Dauphiné, 1661-1672, II – 13 ; Regeste Dauphinois n° 1940

(16)   ADI, série B, 4215 f° 30-4

(17)   En droit féodal, l’hommage était une recommandation dérivée d’une reconnaissance de souveraineté. De là, l’acte ou la formalité par lequel on se reconnaissait sous la dépendance de quelqu’un qui, de son coté, devait appui et protection

(18)   L. ROYER : Claix et son mandement, manuscrit BMG R 10319

(19)   R. D. n° 6517

(20)   C'est-à-dire en pleine propriété, à l’opposé d’un fief

(21)   RIVOIRE de la BATIE : armorial du Dauphiné, 1867

Elles sont toujours aujourd’hui le symbole de la commune de Claix.

L’an 1223, en leur qualité de seigneurs de Claix, Isnard et Amblard reconnaissent en faveur de Robert, doyen de l’église cathédrale Notre Dame de Grenoble et de son chapitre, détenir cette terre depuis le ruisseau nommé la Pissarde (22), jusqu’à la fontaine nommée la Palud (23) allant par les lieux accoutumés dessus le « Peu » (24) divisant le mandement de Sassenage et celui de Claix.

Cet acte, reçu en présence d’Eudes Alleman et de Rodolphe, seigneur du Gua, témoins au titre du doyen fut scellé du sceau de Soffrey, évêque de Grenoble, et de celui de Pierre, seigneur d’Avallon (25).

Un autre membre de cette famille seigneuriale, MARCHIS de CLAIX, apparaît vers cette époque, le 3 janvier 1236 – ou 1237 – comme témoin d’une assemblée tenue à Varces par le Dauphin Guigues André (26).

Peu après, un acte atypique, mentionné comme étant de l’année 1240 par Louis ROYER (27) fait état d’une dame BRENIER – ou PRENIER – « femme du seigneur de Claix » - et Charles, Guillaume et Didier ses enfants qui confessent tenir en fief du Chapitre tout ce qu’ils avaient possédé à Claix, hommagé en faveur dudit Chapitre avec une rente annuelle perpétuelle d’une livre de cire. Cet acte, seulement mentionné par L. ROYER (28) pose un sérieux problème chronologique. En 1240, en effet, les seigneurs de Claix étaient indubitablement les frères Isnard et Amblard. De plus, il existe des similitudes troublantes avec l’acte de 1215 évoqué précédemment : sur le nom de la femme du seigneur du lieu, dame BOVERIA (BOVERE) dans le premier cas et BRENIER dans le second, sur la forme de la redevance : « une livre de cire »… Il y a peut être eu une confusion de date et cet acte « suspect » est sans doute, en l’absence d’éléments complémentaires, à apparenter au premier acte cité. Ce qui est patent c’est que ISNARD et AMBLARD de Claix sont de nouveau mentionnés en 1246 dans la continuité de leur hommage de 1223. Ce fut en effet le 12 ou le 13 décembre 1246 que dans l’église Notre Dame de Grenoble, en présence de tout le Chapitre ainsi que de nombreux clercs et laïcs, ISNARD et AMBLARD de Claix se déclarèrent « hommes liges » (29) de l’église de Grenoble, reconnaissant avoir reçu en fief du Chapitre le château et mandement (30) de Claix, promettant de  

 

(22)   qui limite toujours le territoire de Claix au sud ouest

(23)   lieudit non situé

(24)   Le Peuil

(25)   Original perdu. Le document est connu par CHORIER et par G. ALLARD. Mention dans les archives du chapitre notre Dame (ancien inventaire n° 878). On notera également à cet égard l’observation d’E. PILOT de THOREY (Notice historique sur le chapitre de l’église cathédrale de Grenoble in BSSI, 3ème série, T XIV (1887) qui indique notamment : « quand à la terre de Claix, dès les premières années du 13ème siècle, elle était divisée en deux parties : l’une était déjà la possession du Chapitre, l’autre appartenait à Isnard et Amblard de Claix. Quelques années après, en 1223, ces deux seigneurs abandonnèrent la suzeraineté de leur fait au Chapitre… ».

(26)   R. D. n° 7481

(27)   L. ROYER : hommages et donations concernant la terre de Claix. Dossier manuscrit R 10319, BMG

(28)   Il ne figure toutefois pas au Regeste et je l’ai vainement recherché dans la « série B » des Archives Départementales de l’Isère

(29)   C'est-à-dire, entièrement dévoués à…  

(30)   Circonscription administrative, judiciaire et financière fort ancienne

défendre les personnes et biens dudit Chapitre toutes les fois qu’ils en seraient requis (31).

Parmi les témoins de cette reconnaissance figure un autre membre de la famille de Claix, UMBERTUS (Humbert), qualifié d’ « officialis » (32). Cette reconnaissance, par laquelle les deux frères promettaient corollairement de rendre le château de Claix à toute réquisition et de laisser hissée la bannière de Saint Vincent en signe de haut domaine, n’était cependant pas une dépossession gratuite. En effet, le Chapitre leur donnait, en contrepartie, la somme considérable de cent livres viennoises, ce qui semble montrer soit qu’ISNARD et AMBLARD de Claix étaient gravement endettés, soit qu’il y avait – déjà – une urgence impérieuse de faire consolider, voire même reconstruire, le château de Claix. Les caractères architecturaux fondamentaux de celui-ci paraissent en effet correspondre à ceux du 13ème siècle local, ce qui laisse conjecturer que c’est bien à la suite de cet hommage de l’an 1246 que le château de Claix aurait été en partie transformé voire même reconstruit.

Son origine réelle reste inconnue. Mais le site, assez remarquable, laisse présager qu’il dut être fortifié très tôt, sans doute même avant l’érection de la première église car, sinon, celle-ci aurait sans doute été construite sur cet escarpement dominant et protégé, à l’instar de celle, voisine, de Varces. Les premières fortifications remontaient-elles à l’antiquité ? A cet égard, H. ROCHAT indique (33) qu’on y aurait trouvé, au début du 19ème siècle, « des pièces de monnaie romaine fort bien conservées ». Lesdites pièces ont malheureusement disparu et elles ne figurent dans aucun inventaire, ce qui interdit toute datation.

ROCHAT, repris ultérieurement par le Général BEZEGHER (34), n’ hésite d’ailleurs pas à voir sur ce plateau du Pertuis une occupation préhistorique occasionnelle, puis « un lieu de résistance gauloise », un poste gallo romain et, enfin, une « redoute mérovingienne ». Rien n’est véritablement improbable, mais la stratigraphie des lieux a du être profondément modifiée lors de l’édification du château et, sans fouilles probantes, on ne peut aujourd’hui ce prononcer.  

Mais bien que les archives fassent défaut, on peut sans grands risques d’erreur penser que le premier château de pierre fut élevé vers le 11ème siècle, époque où dans toute la contrée les ouvrages défensifs antérieurs, faits de levées de terre et de constructions en bois, furent remplacés par de solides châteaux en pierre.

Selon PILOT (35), lorsque GUIGUES le VIEUX prit le titre de Comte du Grésivaudan – vers 1040 – et eut à chasser les Savoyards, il trouva des secours en troupes et en argent auprès du plus puissant des seigneurs hommagers de l’évêque, le baron de Sassenage. La seigneurie de Sassenage englobait alors les terres de Sassenage, Fontaine, Seyssins, Seyssinet, Pariset, Claix, Engins, Noyarey, Veurey, Méaudre, Lans, Villard de Lans, Corrençon et Autrans, c'est-à-dire pratiquement tout le Vercors. Les Sassenage furent-ils les premiers constructeurs du château de Claix ? Ceci est très probable, comme le supposait le Général BEZEGHER.

 

(31)   ADI B 4215, R. D. n° 8284

(32)   Ibid et L. ROYER, op. cit. L’ « officialis » (ou official) était le juge ecclésiastique déléguer par l’évêque pour exercer, en son nom, la juridiction contentieuse.

(33)   H. ROCHAT : une tour mystérieuse, BSDEA (1924)

(34)   L. D. BEZEGUER, op. cit.

(35)   J. J. A. PILOT : histoire de Grenoble et de ses environs (1865)

 

Quoiqu’il en soit, c’est ce premier château qui aurait été réparé ou reconstruit par ISNARD et AMBLARD de Claix vers le milieu du 13ème siècle, grâce sans doute à l’argent reçu du Chapitre Notre Dame. L’évêque de Grenoble voulut-il alors symboliser à la fois cette reconstruction et sa mainmise sur l’édifice ?

E. BONNEFOUS indique à ce propos (36) que des ruines du château fut tirée, peu avant 1840, une grande pierre portant, sculptées, les armoiries d’un évêque. Cette pierre, dite « Pierre des Evêques » existe toujours. J’ai pu l’étudier et la photographier dans les années 1980. Elle a été réemployée dans le mur sud de la grande pièce du premier étage de la demeure dite de Mariette d’Enghien située en contrebas du château. Elle mesure environ 60 cm sur 25 et parait représenter des symboles épiscopaux. Sa datation est évidemment délicate mais rien ne semble s’opposer à ce que cette sculpture remonte au 13ème siècle. Elle aurait, en ce cas, un lien indiscutable avec les travaux entrepris à cette époque au château.

Ce qui est assuré, c’est que le rôle du Chapitre dut être déterminant et considérable dans la transformation, les réparations ou la reconstruction du château de Claix. Mais son influence ne se limitait pas au château. Le Chapitre eut également un rôle essentiel dans la construction du premier pont connu avec certitude sur le Drac (37), l’entretien de l’église paroissiale Saint Pierre et dans l’élévation des remparts du « burgus ».

Des deux seigneurs de Claix, ISNARD était sans doute l’aîné. Il est en effet cité avant AMBLARD dans l’hommage de 1223, ce qui traduit sans doute une préséance. Il en est de même dans la reconnaissance de 1246.

En cette même année 1246, apparaît un autre membre de cette famille, CHABERT de Claix, qualifié d’ « official de Grenoble » que l’on trouve également mentionné peu après, le 16 octobre 1252 (38).

En 1251, pour mettre fin semble t-il à de graves dissensions avec le chevalier Guillaume du GUA, la fille de celui-ci, Marguerite, épouse ISNARDET, le fils d’ISNARD de Claix. Et à Lyon, le 8 mars 1251, sur la prière de Rodolphe, fils du Comte de Genève, le pape Innocent IV les dispense du quatrième degré de consanguinité (39). Ce mariage endogamique traduit une parenté certaine entre la famille de Claix et celle du Gua (40).

AMBLARD, pour sa part, avait épousé à une date non connue, Fine, la fille de Guigue de Champs (41). De cette union était né un fils prénommé GUILLAUME (42) Les deux seigneurs hommagers, ISNARD et AMBLARD, avaient aussi, semble t-il, un frère puîné également nommé GUILLAUME. Cette parenté, qui n’est explicitée dans aucun texte, est extrapolée à partir de divers éléments (43).

Ce GUILLAUME de Claix (44) est, de tous les membres de cette famille, celui sur

(36)   E. BONNEFOUS : l’Allobroge (1842)

(37)   Voir à cet égard mon étude « le Pont de Claix, merveille du Dauphiné », bulletin n° 11 des AVG (juin 1983)

(38)   L. ROYER, op. cit.

(39)   R. D. n° 8720

(40)   Connue depuis 1161 selon Guy ALLARD

(41)   L. ROYER, op. cit.

(42)   R. D. n° 9317

(43)   Notamment CHORIER, op. cit. 1849, G. ALLARD, op. cit. et L. ROYER, op. cit.

(44)   Nommé GUILLAUME I pour la commodité du repérage dans l’index général figurant en annexe 3

lequel on dispose du plus grand nombre de références. Alors que ses frères étaient chevaliers, il était devenu religieux, comme au moins l’un des membres cadets de toute famille seigneuriale à l’époque. Le premier texte qui le mentionne date de 1250. Il est alors juge du Grésivaudan (45) et chanoine de Saint André de Grenoble (46).

Omniprésent dans les actes de cette époque, on le trouve, tour à tour :

-       juge à la cour delphinale à Bourg d’Oisans le 12 mai 1251 (47),

-       juge du Comte Dauphin (48) à Gap, le 18 juin 1251 (49),

-       procureur de l’évêque de Grenoble le 20 octobre 1255 (50),

-       et surtout prévôt (51) de Saint André de Grenoble dès le 16 février 1258 (52).

Ce chapitre de Saint André avait été fondé en 1226. Le 13 avril de cette année là, en effet, l’évêque Soffrey, du consentement du doyen Robert et de tout le chapitre de son église, à la prière instante du Dauphin André, lui avait concédé l’église de Champagnier et ses dépendances pour y établir un chapitre, au vocable de Saint André, de treize chanoines réguliers sous l’obédience épiscopale. Mais l’année suivante, sans doute en raison des difficultés d’installation à Champagnier, le nouveau chapitre était transféré à Grenoble où son prévôt, Hugues, prenait possession de l’église Saint André qui devenait ainsi plus spécialement delphinale.

On sait par les lettres de Soffrey, évêque de Grenoble, en date du 1er février 1227, réglant divers points relatifs à la discipline collégiale, que le Chapitre avait droit d’élire son prévôt, de choisir son trésorier son chantre et ses chapelains mais que les prévôts, après leur élection, devaient être confirmés par l’évêque (53).

Dans les faits, le rôle du prévôt de Saint André était relativement important (54).

Dès le milieu du 13ème siècle, GUILLAUME de Claix était donc un personnage local de tout premier plan, reconnu par ses pairs, confirmé par l’évêque, ce qui explique que son nom figure dans la plupart des actes religieux ou delphinaux du temps. Dans certains actes – notamment une déclaration du 11 avril 1255 (55), il est mentionné sous la forme « Vill. De Claix ». Or l’on sait que dans les habitudes de l’époque, « Villelme » équivalait à Guillaume et « Villelma » à Guillelmette (ou Guillaumette) (56) et que la forme utilisée dépendait des habitudes du greffier.

On trouve encore GUILLAUME de Claix dans d’autres actes :

-       le 27 janvier 1261, il intervient à une transaction avec le commandeur de Saint Jean d’Hérans (57),

-       le 13 mai 1262 il est témoin, à Meylan, au testament d’Agnès, dame de Faucigny (58),

 

(45)   CHORIER, op. cit. G. ALLARD, op. cit. R. D. n° 8625

(46)   R. D. n° 8709

(47)   R. D. n° 8758

(48)   Guigues VII

(49)   R. D. n° 8764

(50)   ADI, B 3266, R. D. n° 9176

(51)   C’est à dire supérieur

(52)    R. D. n° 9425

(53)   ADI B 3257

(54)   G. ALLARD op. cit. et ADI B 3254

(55)   Regeste supplémentaire n° 1119

(56)   Voir notamment à cet égard R. D. n° 8378

(57)   Archives départementales B 1130

(58)   R. D. n° 9863

 

-       le 8 septembre 1262, il intervient à la Chapelle Blanche à l’occasion d’une reconnaissance au profit du Dauphin (59),

-       le 15 juin 1263, il concède au nom du Chapitre Saint André, ès qualités de prévôt, une maison construite par feu le chapelain du Chapitre, Guillaume Sias (60),

-       le 17 juillet 1264, il est l’un des témoins essentiels au testament muncupatif du Dauphin Guigues VII (61),

-       le 25 (ou 27) juin 1267, on le retrouve parmi les exécuteurs du nouveau testament établi par ce même dauphin (62),

-       le 7 mai 1270, il fait donation (63) au Chapitre Notre Dame du pont et du port de Claix ainsi que d’un pré « au-delà du pont édifié par Scalpin » (64). Cette donation, fort importante, était faite moyennant engagement pour trois anniversaires à célébrer chaque année : un le jour de son décès, un autre à la fête de Saint André, le troisième à celle de Sainte Anne, ainsi que de partager aux prêtres célébrants 3 sols et de payer aux foires de Grenoble, 60 sols viennois pour les pelisses des chanoines.

En cette même année 1270, le chapitre de Vienne partage les terres « qu’avait tenues Guillaume de Claix » (65), ce qui a pu faire accroire que Guillaume de Claix était décédé peu après sa donation du port et du pont de Claix (66). Or, il est improbable que le Guillaume de Claix visé dans ce partage soit le prévôt de Saint André que l’on retrouve dans nombre d’actes postérieurs. Peut être s’agit-il, en fait, de son père, porteur du même prénom ou d’un autre Guillaume de Claix que je ne sais pas situer.

L’année suivante, en effet, Guillaume de Claix, toujours prévôt de Saint André, poursuit ses donations au profit du Chapitre Notre Dame (67) : il s’agit là de tous les droits et actions qu’il avait au lieu nommé « Molard Chantillon » (68).

Par ailleurs, il fait cession dans le même temps au profit du commandeur de Trièves de tous les droits qu’il avait contre le commandeur à raison de la succession de Guigues de Caunie, situés à Anthernant au fief de Gap (69). L’acte précise que cette cession est faite « du consentement de son père », ce qui induit que le père de Guillaume était peut être bien l’homonyme visé dans le partage de 1270 et, en tout cas, que les possessions de la famille de Claix s’étaient précédemment étendues très au-delà de leur mandement.  

 

(59)   Regeste supplémentaire n° 1283

(60)    R. D. n° 10019

(61)   R. D. n° 10175

(62)   ADI B 3254, R. D. n° 10543

(63)   ADI B 4215, R. D. 10838

(64)   Selon L. ROYER, il s’agit du « Pont Carpin » à Saint Martin d’Hères, sur l’ancien ruisseau de la grande Mogne. Quelques documents nouveaux sur l’ancien pont de Claix, R 10319, BMG

(65)   Liber divisiorum terra rum capit. Eccl. Viennen XXV et R. D. n° 10849

(66)   L. ROYER, op. cit.

(67)   Inventaire du chapitre Notre Dame n° 878 et L. ROYER op. cit.

(68)   Le « Molard Chantillon » (ou Chandillon) est encore mentionné sur le parcellaire de Claix de 1784 (carte 5). Il convient également de noter sur le même parcellaire un lieudit « Chandillionneyres » (carte 2), Archives communales de Claix 

(69)   Regeste supplémentaire n° 1453

Dans le même temps, d’autres membres de la famille de Claix apparaissent au hasard des archives conservées.

Ainsi, dès 1257, encore un autre GUILLAUME de Claix (70), fils d’AMBLARD et neveu supposé du prévôt de Saint André, fait don à Eudes VI Alleman dit Odon ou l’Odon, seigneur du château de Champ de tout ce qu’il possédait dans la vallée de Valbonnais au prix de 28 livres viennoises (71). Un acte du 20 octobre 1266 (72) montre qu’il possédait à cette date une maison à la Balme (73) et qu’il reconnaît « dans la cour supérieure de la maison épiscopale » du même lieu (74) devant l’évêque de Grenoble la tenir de lui ainsi que de nombreux autres biens sur Claix.

Sans grands risques d’erreurs, on peut en déduire que la maison que possédait GUILLAUME de Claix était située à l’emplacement de l’une des demeures médiévales existant encore au nord de ce qui subsiste de l’antique chapelle Sainte Marie Madeleine de la Balme, édifiée par le Chapitre Notre Dame de Grenoble (75).

De même, est cité un certain « Ms de Claix », abréviation scripturale vraisemblable de MARQUIS ou MARCHIS de Claix, diminutif de MARC, au profit duquel AMBLARD et GUILLAUME (76), qualifiés conjointement de « seigneurs de Claix » cèdent, le 5 avril 1266 une vigne « près des fossés » (77) et un champ à Rochefort (78).

Puis, ISOARD, fils de GUILLAUME (79), curieusement qualifié à la fois de « seigneur de Claix » et de « damoiseau » (80) et ce, dès 1269 (81) auquel GUILLAUME de CHYPRE (82), également damoiseau, fait reconnaissance (83) de deux maisons contiguës à Claix « proches la Porte du Rif » (84).

Le même ISOARD alberge (85) en 1287 (86) à Giraud Beorard de Varces, l’eau du ruisseau des Clairières (87).

 

(70)   Repéré pour des raisons évidentes de différenciation sous l’appellation générique arbitraire de Guillaume II dans la table récapitulative de l’annexe 3

(71)   R. D. n° 9317

(72)   ADI B 3266, R. D. n° 10472

(73)   Hameau de Claix, au nord est de la commune

(74)   A l’emplacement de l’actuel château de la Balme

(75)   A cet égard, voir mon étude sur les églises et chapelles de Claix, bulletin des AVG n° 31, juin 1993

(76)   Vraisemblablement son fils, celui même qui est cité dans l’acte de 1257 précité

(77)   Sans doute s’agit-il des anciens fossés du burgus de Claix

(78)   ADI B 3266, R. D. n° 10105

(79)   Et peut être le petit fils d’AMBLARD, à moins qu’il ne s’agisse d’un parent non repéré distinctement

(80)   C'est-à-dire jeune noble qui n’est pas encore chevalier  

(81)   4 février 1269 (ou 1270)

(82)   Sur la famille de Chypre et ses liens possibles avec la famille de Claix voir infra

(83)   ADI B 3266 ; R. D. n° 10803

(84)   Le « rif » ainsi visé est manifestement le « Rif Talon ». La porte dont il s’agit ici devait donc se trouver au nord ouest de l’enceinte, c'est-à-dire coté Furonnières

(85)   C'est-à-dire en bail emphytéotique

(86)   Inventaire du Grésivaudan III, 1208, R. D. n° 10969

(87)   Ou de Clavières. Ce ruisseau n’est pas identifié 

 

Il est, là aussi, qualifié de « seigneur de Claix » alors qu’il n’était encore sans doute que « bachelier » (88).

Le 1er mai 1272 une vente, signée dans le cimetière paroissial de Saint Pierre de Varces (89) est effectuée au profit d’ISNARD de Claix, « damoiseau ». Il ne semble pas qu’il s’agisse là d’un nouveau membre de la famille de Claix. Sans doute ne faut-il y voir qu’une des nombreuses déformations scripturales de l’époque et, selon toutes probabilités, il s’agit du même ISOARD.

Par contre, une cession datée du 21 avril 1273, consentie par la veuve de Chabert de Clerieu, dame ESTIBORS (ou ESTIBORA) permet de connaître le nom d’un autre membre de la famille de Claix, GUICHARD, sans doute déjà décédé à cette époque puisque la vente est faite au profit de sa femme, CLEMENCE.

Cet acte est intéressant car il témoigne (90) de la vente des derniers biens que la famille de Clérieu possédait , ledit Chabert de Clérieu n’étant autre que le fils de feu Girard de Clérieu, déjà évoqué en 1215 (91).

Chabert de Clérieu, également décédé au moment de cette vente, avait été chevalier et seigneur de la maison forte de la Buissière en Grésivaudan. Il avait désigné comme ses exécuteurs testamentaires deux autres membres de la famille de Claix, peut être frères, GUIGUES de Claix, Chanoine de Saint André, l’un des témoins à l’acte (92) et PIERRE de Claix (93).

Dévoué à l’église, Chabert de Clérieu avait légué au Chapitre de l’église Notre Dame de Grenoble une maison en cette ville, proche de la tour de la Comté, encore connue sous le nom de « Tour de Clérieu » (94).

L’alliance entre les familles de Clérieu et de Claix devait être assez étroite pour justifier de la vente faite par la veuve de Chabert, ESTIBORS, et par ses fils Guigues, Chabert et Gontier au profit de CLEMENCE, femme de GUICHARD de Claix.

Elle porte en effet sur des biens considérables : les Clérieu cèdent alors, de fait, toutes leurs possessions en hommes, terres, vignes, près, bois sur Claix et, spécialement, des « Granges au Pont Meylat » (95).

Cette cession se comprend mieux en examinant l’arbre généalogique ci après, déduit de CHORIER (96) qui montre qu’ESTIBORS, veuve de Chabert de Clérieu, était fille de la famille de Claix et qu’il s’agissait, en fait, de la sœur du prévôt Guillaume de Claix (97).   

 

 

(88)   c'est-à-dire jeune noble aspirant à devenir chevalier

(89)   ADI B 3317, R. D. n° 11049

(90)   ADI B 3317, R. D. n° 11175

(91)   La famille de Clérieu était une maison puissante qui possédait en en souveraineté la terre éponyme, une des plus importantes du Bas Dauphiné et de nombreuses possessions

(92)   BEZEGUER op. cit.

(93)   L. ROYER, op. cit.

(94)   R. D. n° 11984

(95)   Lieudit non identifié en dépit de recherches minutieuses

(96)   CHORIER, op. cit. 1148

(97)   Voir également infra, l’analyse du testament de GUILLAUME de Claix.

 

 

 

 

Ainsi :  

 

GIRARD de CLERIEU marié à Dame BOVERIA (+ avant 1215)

______________________________________________________

 

CHABERT de CLERIEU marié à ESTIBORS, sœur de GUILLAUME de Claix prévôt de Saint André (+ avant 1273)

 

 

Gilet, Guigues, Gontier, Chabert, Guichard (neveux de GUILLAUME de Claix

 

D’autres membres de la famille de Claix apparaissent dans le même temps :

Trois frères sont cités à l’occasion d’un albergement établi en 1275 (98) pour un fonds au « Molard de Rochefort « : MARQUIS (99), GONTIER (ou GAUTHIER) et DIDIER de Claix (100) ainsi que LANTELME de Claix, chanoine d’Oulx en 1273 (101) et prieur de Saint Pierre de Grenoble dans le même temps (102).

Pour sa part et au cours de ces mêmes années, le chevalier GUILLAUME de Claix, fils d’AMBLARD, continuait ses cessions :

-       le 23 mai 1273 il vend ses droits et actions sur des fonds et héritages à Rochefort et au port de Claix de l’eau de la Suze au Drac (103),

-       le 16 juin 1276, pour des raisons qui nous échappent, hormis de grands besoins financiers (104), il cède à Odon ALLEMAN, seigneur de Champ, ses droits sur le château et la juridiction de Claix, sous réserve de l’usufruit sa vie durant (105).

Cette cession capitale marque la fin de la maîtrise de la famille de Claix sur le château du lieu. Cet acte liminaire de dépossession amorce, de plus, le processus complexe, mal défini mais irréversible de la transmission progressive de la terre de Claix au profit de la puissante et tentaculaire famille des ALLEMAN.

Le lendemain même de cette cession, le bénéficiaire, Odon ALLEMAN, reconnaît tenir les biens dont il s’agit pour le compte du Chapitre Notre Dame de Grenoble (106) ce qui sous entend à la fois que la cession consentie par GUILLAUME de Claix avait été négociée de longue date et que celle-ci avait reçu l’agrément préalable du Chapitre.

Cette reconnaissance bénéficie de témoins de tout premier ordre : Jacques de Ravenne, professeur de lois, Guigues Czupi, jurisconsulte, Guifffrey de Virieu, Aimar de Commiers et Jean de Morges, ce qui en montre toute l’importance.

A ce moment précis, le Chapitre voulut sans doute réaffirmer sans équivoque possible la domination profonde qu’il exerçait depuis au moins un demi siècle sur la terre de Claix.

 

(98)   Le 27 février 1275 (ou 1276), ADI B 4391, R. D. n° 11504

(99)   Probablement le « Ms » de l’acte de 1266 susvisé

(100)               Sans doute déjà décédé à cette date compte tenu de la formulation de l’acte.

(101)               L. ROYER, op. cit.

(102)               L. D. BEZEGUER, op. cit.

(103)               ADI B 4391, R. D. n° 11182

(104)               Mais l’acte parle simplement de « donation »

(105)               ADI B 4391, R. D. n° 11549

(106)               ADI B 4214, R. D. n° 11550

 

 

PILOT fait état, à cet égard, d’un acte de 1276 indiquant que les chanoines de Notre Dame, pour bien montrer leur possession, portèrent avec eux la tête de Saint Vincent et la placèrent au sommet du château de Claix en signe de domination pendant qu’on chantait des hymnes religieux et qu’ils plantèrent aussi leur bannière sur le donjon de la tour (107).

Cet acte ostentatoire et hautement symbolique eut-il lieu en 1276 ou l’acte visé par PILOT ne fit-il que relater une cérémonie très antérieure : 1223 ou 1246 ?

Bien qu’il ne soit guère aisé de trancher, la seconde hypothèse parait toutefois plus vraisemblable. Ce qui est sur, c’est que la famille de Claix se dépossédait de façon constante et régulière de ses héritages.

Ainsi, le 7 avril 1277, GONTIER de Claix – déjà évoqué en 1275 – qui était alors prieur de Risset, cédait pour sa part une terre sur les bords du Drac près du pont de Claix (108). Peu après, le lendemain des octaves de Pâques de 1278, est dressé l’état des biens tenus sur Claix par ISOARD de Claix (109) et le 3 novembre de cette même année, celui-ci promet de reconnaître à Odon ALLEMAN ce qu’il tient de sa mouvance de Claix (110). Il est alors curieusement qualifié dans cet acte de « tuteur des enfants d’AMBLARD », ce qui laisse entendre que ce dernier était déjà décédé ou du moins déchu (111).

Dans le même temps, le 10 mars 1278, GUILLAUME de Claix intervient à un jugement arbitral entre le seigneur de Tullins et celui de Saint Quentin ; il est toujours prévôt de Saint André (112).

Cette année 1278 est importante : diverses procédures, dont on ignore les fondements réels, durent en effet être engagées puisque des actes essentiels interviennent pour clarifier – ou pour tenter de le faire – une situation particulièrement complexe. En effet, le Chapitre Notre Dame este très largement pour justifier ses droits de possession sur la terre de Claix :

-       par devant le cojuge des Comtes de Vienne et d’Albon il fait déposer et attester par plusieurs témoins que le château, lieu et seigneurie de Claix étaient bien du fief de l’église Notre Dame de Grenoble ; les témoins relatent avec force détails les conditions dans lesquelles les chanoines avaient porté le chef de Saint Vincent au plus haut de la grande tour du château et qu’après l’avoir ôté ils avaient mis leurs enseignes et étendards prouvant la possession,

-       à l’appui de la procédure les chanoines, redoutables procéduriers à n’en point douter, produisent les lettres patentes, scellées de trois sceaux, en l’occurrence ceux du Dauphin, Comte d’Albon, de l’évêque de Die et de l’abbé de Saint Théoffrey et la reconnaissance fondamentale de 1246 d’ISNARD et AMBLARD de Claix (113)

 

(107)               J. J. A. PILOT : histoire de Grenoble, op. cit. II, 276-77 et L. ROYER op. cit.

(108)               ADI B 4281, R. D. n° 11691

(109)               ADI B 4215 f° 2

(110)               ADI B 4231, R. D. n° 11934

(111)               A moins qu’il ne s’agisse là aussi d’un homonyme ne pouvant être identifié distinctement

(112)               ADI B 4157

(113)               Archives du Chapitre Notre Dame, inventaire n° 878 et L. ROYER, op. cit.

 

 

Cette procédure, succédant de peu à un mémoire de leurs possessions sur Claix établi en 1275 (114), visait sans doute à conforter des privilèges peut être un tant soit peu contestés.

A travers toute cette intrication d’actes, une sentence – dont on ignore le dispositif – fut alors rendue par Jean de Goncelin, juge delphinal, entre le Chapitre et ISOARD de Claix au sujet des revenus et droits de la terre de Claix  (115).

Le même ISOARD (116), peut être débouté, continuait pour sa part ses libéralités. En 1279, peut être par oblation, il cède des dîmes à Echirolles et à Seyssins (117) tout en faisant hommage au Chapitre Notre Dame de ce qui lui restait comme biens propres (118).

Mais la famille de Claix, sans doute consciente de son inexorable dépossession progressive, semble avoir eu, à ce moment, un sursaut d’orgueil en prenant des mesures conservatoires drastiques. Le 27 octobre 1280, GUILLAUME de Claix – le chevalier – encore qualifié de « seigneur de Claix » - fait reconnaître par un vassal, Jacques Gauthier cinq quartelées (119) de terres (120). Quelques jours plus tard, le 3 novembre 1280, une reconnaissance est faite à son profit (121) par Guillaume Orseti du Puy (122) d’une terre située à Cossey au lieudit « Valjala » (123).

Mais la querelle devait être rude : en décembre de cette même année, une procédure est alors ouverte auprès du juge delphinal à propos de la juridiction de Claix entre GUILLAUME de Claix et le syndic du Chapitre (124). Une instance « subsidiare » est également introduite dans le même temps à propos de la maison de GUILLAUME de Claix (125) déjà évoquée en 1266.

Puis, après toutes ces actions délétères, un temps d’accalmie – ou de réaction conservatoire – semble alors intervenir au profit de la famille de Claix.

C’est ainsi que le 11 août 1281, ISOARD achète (ou rachète ?) des terres sans doute peu conséquentes eu égard au prix de la transaction : 60 sous de bons viennois (126).

Le 27 août 1284, Alpaix de Cosseil (127) reconnaît des possessions au profit de GUILLAUME de Claix toujours qualifié de « seigneur de Claix » (128).

 

(114)               ADI 5 G 223

(115)               ADI B 4215, R. D. n° 11838

(116)               Ou ISNARD, les deux appellatifs étant utilisés indistinctement dans les actes.

(117)               Inventaire du chapitre Notre Dame et L. ROYER op. cit.

(118)               Ibid

(119)               La quartelée, ou quart de sétérée, équivalait à environ 428 m2

(120)               ADI B 4215, R. D. n° 12218

(121)               R. D. n° 12220 

(122)               Ancien hameau du Peuil

(123)               Ce lieudit correspond vraisemblablement à celui nommé « en Vaujala » sur la carte 3 du parcellaire de 1784 de Claix (archives municipales de Claix)

(124)               Inventaire du Chapitre Notre Dame n° 878 et L. ROYER, op. cit.

(125)               Ibid

(126)               ADI B 4025, R. D. n° 12327

(127)               Cossey

(128)               ADI B 4025, R. D. n° 12327

 

 

Le 7 novembre 1285, Guigues et Rodolphe de Miribel reconnaissent également des possessions à Cossey au profit du « chevalier GUILLAUME de Claix » et de son neveu GILET (ou GUILLET) « fils d’AMBLARD (129).

Cet acte pose dès lors un nouveau problème. Le chevalier GUILLAUME, on l’a vu, est cité dès 1257 comme étant le fils d’AMBLARD. Il ne peut donc être l’oncle de GILET (qui, en l’occurrence, serait donc son frère). On peut donc conjecturer que l’acte est entaché d’une erreur de transcription et que le GUILLAUME de Claix qu’il vise est plutôt le prévôt de Saint André ; à moins qu’il ne s’agisse là aussi de membres distincts et que le nommé AMBLARD ainsi visé se situe sur la même lignée généalogique que le chevalier GUILLAUME et qu’il soit ainsi le fils de l’un des frères de Claix, ISOARD ou AMBLARD, cités dès 1223.

Manifestement il y a là l’un des irritants hiatus auxquels je me suis heurté dans cette étude.

Dans le même temps, le 16 février 1285 (ou 1286), ISOARD de Claix, le damoiseau, échange avec Hugues du Gua de Saint Paul de Varces, son Molard de Fontanieu appelé « Châtelard » (130) contre une rente à Claix (131) et le 16 mars 1286 (ou 1287) une reconnaissance est passée au même – encore qualifié de « seigneur de Claix – pour des fonds audit lieu (132).

Un autre membre de la famille de Claix se trouve évoqué pour cette période : il s’agit de NANTELME de Claix, prieur de Saint Jean de Grenoble (133).

Puis, le 12 août 1288, le chevalier GUILLAUME de Claix cède à Odon ALLEMAN, l’usufruit des droits qu’il possédait encore sur les seigneuries de Claix et de Pariset et dont il lui avait, dès 1276, cédé la nue propriété (134). Cet acte marque un tournant décisif dans la mise à l’écart sur sa propre terre de la famille de Claix.

Peu après intervient un acte de proximité important : le 10 mai 1289, en effet, le dauphin Humbert 1er ayant besoin de s’assurer les places fortes gardant la frontière savoyarde, échange avec Aymeric de Briançon son château de Bellecombe en Grésivaudan contre le château de Varces (135) avec ses territoires, maisons fortes, mandement, hommes nobles et autres fiefs avec toute leur juridiction, de la ville de Vif au château de Claix et des monts qui divisent les mandements de Sassenage et de Varces à la rivière du Drac (136). Puis en 1290 intervient une alliance entre les familles de Claix et Alleman qui peut, à défaut d’autre explication, justifier l’acte précité du 12 août 1288 : Marguerite ALLEMAN, fille du premier mariage d’Odon ALLEMAN avec Catherine de BERENGER et mariée en premières noces en 1268 avec Guy de Montluel (137) épouse GUILLAUME de Claix (138).

 

(129)               ADI B 4025, R. D. n° 12903

(130)               Ancien château de Malissoles sur Varces

(131)               ADI B 4025, R. D. n° 12949

(132)               R. D. n° 13093

(133)               CHORIER op. cit.

(134)               ADI B 4015, R. D. n° 13303

(135)               Ce château, situé à Saint Géraud, avait été acquis en 1255 par le dauphin

(136)               ADI B 3338, R. D. n° 13441

(137)               M. RIEUTORD : les Alleman de Dauphiné et de Faucigny (1988)

(138)               ADI B 3974, R. D. n° 13642

 

 

 

Le GUILLAUME dont il s’agit est manifestement celui qui est qualifié de « chevalier ». S’il s’agissait de remariage pour Marguerite ALLEMAN, il en allait de même, selon toutes probabilités, pour Guillaume de Claix puisqu’un acte antérieur en date du 8 avril 1289 (139) fait état d’une certaine Marguerite, fille de feu André GRASSI, « femme de Guillaume de Claix ». Peut être celle-ci était-elle décédée peu après cet acte, à moins qu’il ne s’agisse encore d’un autre Guillaume de Claix !

Quoiqu’il en soit, l’union de Marguerite ALLEMAN et de Guillaume de Claix, sans doute arrangée pour des motifs patrimoniaux, parachevait les cessions faites par ledit Guillaume depuis 1276 au profit d’Odon ALLEMAN. Ce dernier, sentant sa fin prochaine, avait peut être voulu officialiser de manière irréversible l’union des deux familles et, tout en régularisant d’une certaine manière les libéralités antérieures dont il était bénéficiaire, pérenniser sa possession de la terre de Claix.

Dans le même temps, le 26 décembre 1290, Isoard, fils de Guillaume de Claix, vend – peut être sous la pression de son père – à Guigues (ou Guigonet) ALLEMAN, fils d’Odon, né également du premier mariage de celui-ci avec Catherine de BERENGER (140), sa part du château de Claix, les limites en étant expressément spécifiées avec dénombrement des revenus (141). Alors dépossédée de l’essentiel de la propriété du château de Claix, la famille éponyme n’en conservait pas moins de notables possessions : divers actes établis au cours de cette période en témoignent et, notamment, une cession au profit de Guillaume de Claix le 4 octobre 1291 (142) et un albergement au profit de Gilet de Claix le 9 mai 1292 (143).

Le 5 juillet 1292, Odon ALLEMAN établit son testament : il élit sépulture dans le cimetière de l’église paroissiale de Valbonnais et, pour le moins mégalomane, veut cent prêtres à ses funérailles. Il partage également ses très importants biens entre ses nombreux enfants. Il cède notamment à Gilet, pour ce qui nous intéresse ici, ses droits dans les châteaux et mandements de Claix et de Vif et dans les paroisses de Claix, Pariset, Seyssins, Varces, Saint Paul, Fontanieu, Genevrey, Chabottes, Avignonet, Cluze (144), Vif et la « vallée chevalllerosa ». Il lègue à sa fille Marguerite (145) sa dot et 100 sols ; Il attribue à sa seconde femme, Sibylle d’Aix dame de Saint Jalle (épousée en 1286), la tutelle de son dernier fils dit GILET II. Il institue enfin pour héritier universel, son fils aîné Guigues, dit Guigonet (146). Odon ALLEMAN meurt vers la fin juillet, avant même l’enregistrement de son testament seulement effectué le 13 août 1292 par Jean de Goncelin, juge de la Cour des Comtes de Vienne et d’Albon (147). Le même jour, Sybille d’Aix, sa veuve, tutrice de Gilet (148) – frère consanguin de Guigues ALLEMAN – le déclare homme lige dudit Guigues (149).

 

(139)               RD n° 13418

(140)               C. FREYNET : les Alleman et la seigneurie de Valbonnais (1939)

(141)               RD n° 13419

(142)               RD n° 13954

(143)               ADI B 4420, RD n° 14048

(144)               Aujourd’hui Saint Martin de la Cluse

(145)               Inexplicablement qualifiée de « femme de Guy de MONTLUEL » alors qu’elle était remariée à Guillaume de Claix (confirmation dans RIEUTORD, op. cit.)

(146)               ADI B 3354, RD n° 14064

(147)               ADI B 3973, RD n° 14080

(148)               Qui devait avoir 5 ans

(149)               ADI B 3354, RD n° 14081

 

Cet acte, signé « dans la chambre postérieure de la maison de feu Guillaume de CHYPRE » a, entre autres témoins, Marquison de Claix (150). Il serait bien évidemment vain de vouloir rechercher l’emplacement de cette demeure dont on sait seulement qu’elle était située « près la Porte du Rif », c'est-à-dire comme indiqué précédemment (151), sans doute au nord ouest de l’enceinte médiévale de Claix, sur le versant du Rif Talon. Il est par contre intéressant de s’arrêter un peu sur le patronyme, surprenant dans notre contrée, de cette « famille de CHYPRE ». Ledit Guillaume de CHYPRE, déjà évoqué à propos de la reconnaissance de 1269 (152) et qui par oblation avait fait don de tous ses biens situés à Claix au Chapitre Notre Dame de Grenoble se prétendait issu des rois de Chypre. Le Général BEZEGHER a estimé (153) qu’il s’agissait peut être d’un descendant de l’une des nombreuses branches de la famille ALLEMAN, ce qui pourrait expliquer l’hommage lige rendu dans sa maison. On trouve, en effet, un Garnier ALLEMAN, seigneur de Césarée (154) en 1250. Son fils, Nicolas, également seigneur de Césarée, aurait épousé sa cousine Isabelle de Beyrouth, laquelle après la mort prématurée de son époux se serait remariée avec Guillaume Barlais, descendant des régents impériaux chypriotes (155). Entretemps, le chevalier Didier, frère ou cousin de Garnier ALLEMAN, rentré en Dauphiné avec les survivants de la croisade aurait à la fois pris les armes des rois de Chypre et adopté de patronyme tant pour magnifier son acte que pour se différencier des autres branches familiales. Les autres membres de sa proche parenté auraient fait de même, notamment ses fils Guillaume et Raynaud qui, de façon ostentatoire bien qu’usurpée, se faisaient appeler « de CHYPRE ». Par ailleurs, il est vraisemblable qu’une vague parenté, découlant d’alliances non connues et pour le moins compliquées, ait existé entre la famille de Chypre et celle de Claix par l’intermédiaire de celle de CLERIEU. Par un acte, daté de la Sainte Madeleine de l’année 1281, Guillaume et Raynaud de CHYPRE reconnaissent en effet tenir du Chapitre Notre Dame de Grenoble ce qu’ils ont à Claix, venant de BOVERIA, femme de CLERIEU (156). Cette curieuse transmission pourrait s’expliquer par le fait que BOVERIA soit née de CHYPRE ou qu’elle soit devenue membre de cette famille par remariage avec l’un de ses membres (157).

L’arbre généalogique restreint présenté un  peu plus loin, reprenant partiellement celui établi précédemment à propos de la parenté des Claix et des Clerieu, permet peut être de comprendre l’alliance possible des deux familles précitées avec celle de CHYPRE. Quoiqu’il en soit, selon RIVOIRE de la BATIE (158), cette prétendue famille de CHYPRE aurait eu des descendants dans le Trièves (159) jusqu’au 15ème siècle.

 

(150)               S’agit-il toujours de celui dénommé dans d’autres actes « Ms » et Marquis » ?

(151)               Voir note 84

(152)               Supra

(153)               Op. cit.

(154)               Ancienne capitale de la Cappadoce aux époques romaine et byzantine, actuellement Kaiseri en Turquie

(155)               GROUSSET : histoire des croisades (1939)

(156)               ADI B 4215, F° 5

(157)               Précisément Didier de CHYPRE

(158)               RIVOIRE de la BATIE : op. cit.

(159)               Ibid

 

CLAIX                        CLERIEU                             ALLEMAN / CHYPRE  Régents de

                                                                                                                              CHYPRE

 

                        Girard marié à Boveria     sœur ou épouse de Didier ALLEMAN

                                                                                                          Frère de Garnier

                     __________________________________________________

 

Guillaume  frère d’ Estibors                      Raynaud et Guillaume    Nicolas époux

                        mariée à Chabert de Clerieu       de Chypre                 d’Isabelle de

                                                                       (héritiers de Boveria)         Beyrouth remariée

oncle de Chabert, Gontier et Guigues                                   à Guillaume Barlais

 

Le 12 novembre 1292, des reconnaissances sont passées par plusieurs habitants de Claix en faveur de Sibylle d’Aix intervenant toujours comme tutrice de Gilet ALLEMAN (160). Il en est de même le 23 juin 1293 (161). Peu après à Grenoble, le 16 octobre 1293, Chabert de CLERIEU reconnaît, à la demande et en présence de l’évêque, tenir de lui en fief une tour et une maison près des murs de la ville, vers la Pertuisière, la véhérie (ou viguerie) (162) de la cité de Grenoble – dite de Clerieu – (163), un pré au même lieu et divers autres biens (164). Cette reconnaissance a pour témoin l’omniprésent Guillaume de Claix – oncle du donateur comme le montre l’arbre généalogique ci avant – toujours qualifié en la circonstance de « prévôt de Saint André » (165). Puis, le 23 novembre 1293 (166), Guillaume de Claix sans doute alors fort âgé, établit son « obit » (167). Il attribue notamment au couvent de Saint Robert (168) pour son anniversaire 25 livres placées sur Guillaume de la Balme à Seyssins (169). Il meurt vraisemblablement peu après. Cependant, L. ROYER (170), sur la base du texte de CHORIER (171) le fait décéder quelques années plus tôt, vers 1285. Voici ce qu’en dit cet auteur (172) :

 

(160)               ADI B 3354, RD n° 14117

(161)               ADI B 3319, RD n° 14198

(162)               La véhérie était la demeure du véhier, officier subalterne chargé de la perception de certaines redevances

(163)               Sur la véhérie de Clerieu voir J. J. A. PILOT : les maisons fortes du Dauphiné (1840)

(164)               RD n° 14246

(165)               Pourtant, dès janvier 1291, il semble que le nouveau prévôt de Saint André ait été Guillaume Véteris (Cf. notamment RD n° 13791 et 14064)

(166)               L’année n’est toutefois pas établie avec certitude

(167)               C'est-à-dire la liste des dispositions religieuses à prendre au bénéfice de son âme pour le moment où il serait défunt  

(168)               Fondé au 11ème siècle à Saint Egrève par les bénédictins, à l’emplacement de l’ancien hôpital psychiatriques qui subsiste partiellement

(169)               ADI B 3354, RD n° 14268. Voir aussi à ce sujet le nécrologue de Saint Robert, calendes de novembre (329-25) : « Guillemus de Clais prepositus sancti Andice Gratianopolis in U. CHEVALLIER : documents inédits relatifs au Dauphiné (1868)

(170)               L. ROYER : op. cit.

(171)               N. CHORIER : op. cit.

(172)               Ibid, I-248

 

« …. En 1285 le prévôt de Saint André était Guillaume de Claix qui mourut l’année suivante et laissa cet emploi à son successeur… Guillaume de Claix était dans l’étroite confidence de la comtesse Béatrix : il lui légua 50 livres et son cheval appelé « Palfroi » dans l’acte et voulut que les exécuteurs de ses dernières volontés ne fissent rien que de son conseil ».

« Ce furent l’évêque de Grenoble à qui il légua 30 livres viennoises et un saphir d’Orient, Guillaume Breyfoud, sacristain de son église, Nantelme de Claix, prieur de Saint Jean de Grenoble, Amblard de Claix, son frère (173) et Chabert de Clerieu, son neveu. Il donna 300 livres à trois chevaliers pour aller au secours de la Terre Sainte et voulut que Guichard de Clerieu son neveu fût de ce nombre. Enfin, il ordonna que sa vaisselle d’or et d’argent fut vendue et que le prix fut employé à doter et à marier de pauvres filles… ». Et CHORIER d’ajouter : « il fut enseveli dans l’église de Saint André au devant de l’autel Sainte Magdelaine… ». Avant de conclure, en forme de panégyrique : « le nom et la dignité de la maison de Claix étaient alors fort célèbres et l’étroite liaison qui était entre ce prévôt et la dauphine Béatrix est une preuve de ce mérite particulier de même que la noblesse de son sang… ».

La relation de CHORIER est manifestement d’un intérêt majeur puisqu’elle établit le renom et la noblesse de Guillaume de Claix, sa fortune (174), les liens étroits qu’il avait avec le pouvoir delphinal tout en explicitant sa parenté avec les enfants de Chabert de Clerieu mais elle pose aussi d’importants problèmes, ainsi :

-       la date de son décès qui se trouve contredite par les textes de 1293 visés ci avant,

-       la référence à Amblard qui ne pouvait manifestement être celui cité dès 1223,

-       l’identification de Béatrix, tantôt citée comme comtesse, tantôt comme dauphine ; il parait probable que le texte vise Béatrix, fille du comte de Savoie et épouse du dauphin Guigues VIII mais, ce dernier étant décédé en 1270, la dauphine en titre à la période supposée du testament de Guillaume de Claix (entre 1285 et 1293) était alors Anne, la propre fille de Béatrix de Savoie, mariée à Humbert de la Tour du Pin, dit Humbert 1er (175). Il y a là, une fois encore, un important hiatus qui, s’ajoutant à ceux déjà mis en exergue, rend impossible, on le comprendra, l’établissement d’une généalogie aussi précise et complète que je l’aurais voulue.

Peu après, le 20 novembre 1295, l’autre Guillaume de Claix – fils d’Amblard et époux de Marguerite ALLEMAN – donne les derniers biens qu’il possédait encore sur le château de Claix à Sibylle, tutrice de Gilet ALLEMAN (176). On a dit (177) que cette donation était faite à défaut d’héritier, ce qui est parfaitement plausible compte tenu du fait que les époux étaient déjà d’un âge avancé.

 

 

(173)               deux interprétations sont envisageables : Amblard de Claix, son frère ou bien, plutôt, le frère de Nantelme précité

(174)               davantage explicable par de larges prébendes que par celle de sa famille qui, comme on l’a vu, était quasi ruinée

(175)               Il ne peut raisonnablement s’agir de la dauphine Béatric de Hongrie, fille du roi de Hongrie, épouse du dauphin Jean 1er, puisque celle-ci ne l’avait rejoint qu’en 1296 alors qu’elle n’avait que 11 ans et que celui-ci ne devait devenir dauphin qu’en 1307

(176)               ADI B 3319, RD n ° 14616

(177)               L. ROYER, op. cit.  

 

A cette date, la famille de Claix ne devait plus guère posséder, de façon effective, de biens significatifs sur la terre de Claix et elle avait, notamment, perdu presque tous ses droits de propriété sur le château ancestral.

Le 9 mai 1296, pour des raisons non explicitées, Guillaume de Commiers, doyen de l’église Notre Dame de Grenoble et son chapitre, avec le consentement de leur évêque cèdent en augmentation de fief (178) au dauphin Humbert 1er le château, mandement et dépendances de Claix et plus généralement dit l’acte (179) « tout ce que les chevaliers Amblard et Isoard frères, jadis seigneurs de Claix, avaient reçu d’eux en fief avec la seigneurie, la juridiction et les émoluments ». Mais le chapitre ne se dépossédait pas pour autant puisque l’acte faisait réserve expresse de leurs autres propriétés, tènements, fiefs et cens et que la justice restait commune.

Le dauphin leur en passe reconnaissance le même jour, mercredi avant la Pentecôte, devant Aymeric de Tornafot, notaire de Montluel (180). Mais il ne gardera pas longtemps la terre de Claix. Le 31 janvier 1299 (181), désireux de s’assurer de meilleures places, Humbert, la dauphine Anne et leur fils aîné le dauphin Jean échangent avec Guigues ALLEMAN, seigneur de Valbonnais et héritier universel d’Odon ALLEMAN, tout ce qu’ils avaient reçu du château et mandement de Claix du fief du doyen et du chapitre Notre Dame contre le château de Cornillon en Trièves que possédait ledit Guigues (182).

Peu après, le 26 février 1300, dans le cloître de la cathédrale Notre Dame de Grenoble, le doyen et le chapitre, réunis devant le dortoir, prenant acte de l’échange susvisé et constatant que Guigues ALLEMAN avait en outre acquis l’héritage du damoiseau Ysoard de Claix et celui de ses enfants, également du fief de Notre Dame, lui en accordent l’investiture par la tradition d’un bâton. Guigues rend hommage et fidélité, sauf ses devoirs envers l’archevêque de Vienne et le dauphin et promet de payer trois quarterons de cire de cens et une livre et demi de cire de plaid (183). Corrélativement intervient un traité (184) entre le chapitre et Guigues ALLEMAN au sujet de leurs droits respectifs sur le fief de Claix. Cet acte, extrêmement important, nous renseigne sur les droits utiles qui étaient alors exercés au titre de la seigneurie de Claix et sur les libertés dont jouissaient les habitants : ils n’étaient point contraints d’aller aux chevauchées (185), ils ne payaient pas la taille et ne faisaient que les corvées accoutumées. En contrepartie, ils devaient concourir à la défense du château au cas qu’il fut attaqué. L’exercice de la justice appartenait au doyen et au chapitre « sauf dans les cas d’adultère ou autres emportant la peine capitale ou un châtiment corporel » lesquels étaient réservés à Guigues ALLEMAN.

A Grenoble, le 12 mai 1300, le dauphin Humbert, la dauphine Anne et leur fils Jean, à la requête conjointe de Guigues ALLEMAN et du chapitre Notre Dame de Grenoble,

 

(178)               G. ALLARD (op. cit.) qui parle d’achat par Humbert 1er situe l’acte en 1295

(179)               ADI B 3660, RD n° 14704

(180)               ADI B 4215

(181)               Ou le 27 janvier 1300, datation imprécise

(182)               ADI B 3660, RD n° 15450

(183)               VALBONNAIS : histoire du Dauphiné et des princes qui ont porté le nom de dauphins, II- 132,3, ADI B 2954-55, RD n° 15471 

(184)               ADI B 4215, RD n° 15470

(185)               C'est-à-dire à la guerre

approuvent, confirment et autorisent le traité précité du 26 février (186). Peu après, le 14 mai 1300, Isoard de Claix, encore qualifié de « seigneur de Claix, donne ce qui lui reste de propriété sur le château au même Guigues ALLEMAN (187). Dans le même temps (188), un autre membre de la famille de Claix, Catherine, passe reconnaissance en emphytéose à Amédée, comte de Genevois, pour cinq journaux de terre (189) au Rivier de Murianette sous le cens de deux sols de plaid (190).

Puis, peu après que soit intervenue une procédure en vue d’évaluer l’état et la consistance des biens de Gilet ALLEMAN sur Claix (191), Sibylle d’Aix vend, le 23 octobre 1300, à l’omniprésent Guigues ALLEMAN ses droits et ceux de Gilet sur le château, la seigneurie et les dépendances de Claix pour lui tenir lieu de toute prétention à la succession d’Odon ALLEMAN (192), moyennant une somme de 2000 livres (193). Il était précisé à l’occasion de cette cession que le château demeurait dans la mouvance du dauphin et du chapitre Notre Dame (194). Vers la même époque, le chapitre renouvelle à Guigues ALLEMAN l’investiture de l’ensemble de ses biens, qu’ils proviennent de l’échange intervenu avec le dauphin ou qu’ils résultent des acquisitions faites sur les héritages de la famille de Claix (195).

Guigues ALLEMAN, seigneur de Valbonnais, était alors bien en cette année 1300 le véritable seigneur de Claix, nonobstant les droits du chapitre et ceux intangibles du dauphin.

Le 13 février 1301 (196), Guillaume de Claix, fils de feu Amblard, lui cède tous les droits qui lui restaient sur le château de Claix, son mandement et ses dépendances, moyennant une somme de 200 livres viennoises (197). Simultanément, Guigues ALLEMAN les reçoit en fief de Guillaume de Claix (198). La même transaction règle également les droits des deux parties « sur les eaux du ruisseau (199) et les artifices qui y sont ou y seront établis » (200).

 

 

(186)               ADI B 3008, RD n° 15555

(187)               ADI B 3660, RD n° 15556

(188)               Le 10 juin 1299

(189)               Le journal était une mesure agraire valant ¼ d’hectare environ et correspondait, étymologiquement, à la surface labourée en une journée par un attelage

(190)               RD n° 15340

(191)               Vers 1300. ADI B 4215, RD n° 15475 et 15490

(192)               Dans son testament susvisé, Odon ALLEMAN avait laissé à Gilet en sus des biens énumérés (Cf. supra) «  12000 sols, 12 livres, prêtés à sa femme Sibylle d’Aix » que celle-ci n’avait manifestement pas pu rapporter à la succession

(193)               RD n° 15640

(194)               Ibid

(195)               ADI B 4215

(196)               Ou 1300 ; La date est controversée mais l’année la plus vraisemblable parait bien être 1301

(197)               ADI B 4205, RD n° 15791

(198)               Ibid

(199)               Il s’agit vraisemblablement de la Robine         

(200)               C'est-à-dire les moulins et battoirs établis sur ce ruisseau

 

 

Ne laissant rien au hasard, Guigues ALLEMAN, qui ne parlait ni n’entendait le latin, réunit à Grenoble, le 27 mai 1302, un conseil de six personnes, dont trois au moins étaient des jurisconsultes, afin que l’acte qu’il avait conclu deux ans auparavant avec le chapitre Notre Dame – le traité du 28 février 1300 – lui fut expliqué en langue vulgaire et que ses droits fussent déclarés de façon positive (201). C’est, selon L. ROYER (202) l’un des trois seuls actes du moyen âge rédigés en langage grenoblois, les deux autres étant le testament de Guigues ALLEMAN, seigneur d’Uriage daté de 1275 et le rouleau des comptes consulaires de Grenoble allant de 1338 à 1340 (203).

L’acte explicatif de 1302, après avoir repris les dispositions du traité du 26 février 1300, résume les actes de juridiction que Guigues ALLEMAN est en droit d’exercer sur les hommes de la terre de Claix. Ses droits portent sur sept points :

1° - Il ne peut exiger des hommes de l’église que les corvées qui avaient continué d’être fournies aux seigneurs ses prédécesseurs,

2° - les hommes de l’église doivent aide au seigneur pour la défense du château et de son mandement,

3° - le seigneur ou son juge peuvent connaître au possessoire les causes existant entre les hommes de l’église d’une part et les personnes étrangères de l’autre et cela quelle que soit la qualité des tenures,

4° - le seigneur a également la connaissance des causes de jugement possessoire des hommes de l’église entre eux sauf lorsqu’il s’agit de biens appartenant à l’église ou qui sont tenus d’elle en fief ou en emphytéose. Dans ce dernier cas, l’église en aura connaissance,

5° - Guigues a le droit d’avoir des banniers et de lever des bans, conformément au tarif accoutumé, sauf toutefois sur les terres de l’église,

6° - il a juridiction haute, moyenne et basse sur les criminels, quels qu’ils soient, excepté sur les hommes de l’église sur lesquels le doyen et le chapitre ont la basse justice, la haute et moyenne étant réservées à Guigues,

7° - le seigneur peut établir un marché à Claix (203a) et y faire toutes ordonnances de police sur les denrées qui s’y vendent sauf sur celles qui appartiennent à l’église.

Peu après, le 24 février 1303 et, sans doute, toujours à la requête du même Guigues ALLEMAN, extrêmement vigilant sur ses droits et prérogatives, les consuls de Grenoble, Albert MATARD et Falquet COUTUIRIER attestent que cette cille n’a aucun droit sur les forêts de Claix et que celles-ci appartiennent bien audit Guigues ALLEMAN (204).

Dans le même temps, Sibylle d’Aix (205) lui donne quittance de la somme de 250 livres, par elle reçue (206) à compte du prix de la vente intervenue le 20 octobre 1300.

 

(201)               Archives de Grésivaudan, liasse 1308. Original perdu. Copie du 18ème siècle par LANCELOT (à la Bibliothèque Nationale)

(202)               L. ROYER : un texte inédit en langage de Grenoble : Revue de philologie française et de littérature, T XXXV (1923)

(203)               Infra

(203a)       C’est l’origine des foires de Claix qui se tenaient au « Champ de Foire », aujourd’hui site du château dit de Montolivet

(204)               ADI B 3223, RD n° 16135

(205)               16 février 1303

(206)               RD n° 16130                                                                   

 

Puis, le 27 mai 1304, un nouveau traité intervient entre le chapitre Notre Dame et Guigues ALLEMAN : il prévoit qu’au cas où celui-ci serait en guerre avec ses voisins, ses vassaux à la requête du mistral de la Balme (207) au nom du doyen et du chapitre devront coopérer à la défense du château et du mandement de Claix (208).

Bien que dépossédée de la plupart de ses biens et de la seigneurie du lieu, la famille de Claix continuait néanmoins à être présente sur les lieux mêmes de son ancien fief mais, surtout, à donner à l’église nombre de ses membres. Il en est ainsi de Girard de Claix, sacristain de Notre Dame de Grenoble, qui intervient le 14 juin 1307 à une transaction par laquelle le chapitre Notre Dame, considérant que le port de Claix tenu par leur procureur des anniversaires ne leur est d’aucune utilité à raison de la destruction du pont (209) et que le frais en barques, cordages, fournitures et mercenaires ne sont pas compensés, décide de l’alberger en emphytéose à Guigues ALLEMAN, le puissant seigneur de Claix, à charge pour lui de payer :

-       deux livres de poivre de redevance annuelle (210),

-       quatre livres, dix sols de « bonne monnaie antique » à leur maison de la Balme de Claix,

-       deux livre à l’église de Claix,

-       une obole d’or au dauphin pour la garde du port,

-       neuf livres à leur procureur des anniversaires dont trente sols pour les « pelissons » (211), suivant le don de Guillaume de Claix, prévôt de Saint André (212).

En aucune circonstance, on le voit, le chapitre ne faisait d’acte strictement désintéressé et les chanoines étaient, à l’évidence, des négociateurs avisés ; la précision de cet acte en témoignerait si besoin était.

Mais les dauphins n’étaient pas en en reste pour asseoir ou confirmer leur mainmise possessoire dès la survenance de la moindre transaction. C’est ainsi que le 8 juillet 1307, Guigues ALLEMAN doit prêter hommage au nouveau dauphin Jean II pour le tènement du Molard appelé le Châtelard au mandement de Varces (213) qu’il venait d’acquérir (214) pour le prix de 200 livres des frères Guillaume et François du Gua (215). En contrepartie, le dauphin lui confirme la donation à lui faite par ses père et mère des fiefs et hommes du château de Champ et de la maison forte de la Roche que son père Odon ALLEMAN, seigneur de Champ, avait cédés au dauphin et que tient son neveu Laurent ALLEMAN.

 

(207)               la mistralie était une division du mandement. Le mistral avait notamment la charge de collecter les impôts pour le seigneur dominant ; en l’occurrence, la Balme de Claix était administrée en communauté autonome pour le compte du chapitre Notre Dame

(208)               ADI B 4215, RD n° 16410

(209)               A cet égard, voir mon étude précitée sur le pont de Claix

(210)               Le poivre était alors une matière précieuse qui servait de monnaie d’échange. Certaines taxes devaient d’ailleurs être acquittées en poivre et non en argent. Le poivre, qui venait des Indes ou de Ceylan via Acre et Tripoli, était alors sous monopole des marchands vénitiens

(211)               Les pelisses des chanoines

(212)               VALBONNAIS, op. cit. II, 133-6, ADI B 4215, RD n° 17101

(213)               Infra, note 130

(214)               Le 19 janvier 1307

(215)               ADI B 3223, RD n° 17203

 

Il y ajoute, en augmentation de fief, l’hommage que son frère Jean ALLEMAN, chanoine de Vienne, tient du dauphin, spécialement la maison forte d’Entraigues…(216).

Les possessions de Guigues ALLEMAN étaient alors considérables : Valbonnais, Entraigues, Champ, Claix, Fontanieu et, par récurrence elles s’élargissaient régulièrement. C’est ainsi que le 13 novembre 1312, il reçoit, en présence du damoiseau Guillaume de Claix (217) l’hommage de sa cousine Isabelle, veuve de Siboud ALLEMAN, seigneur de Revel, pour ce que le défunt tenait en fief des paroisses de Nantes en Rattier, la Valette, Lavaldens et Auris (218).

Quant à la famille de Claix, elle apparaît encore de façon constante au travers de certains de ses membres, en tête desquels il convient de mentionner MARCHIS (Marc, Marquet) de Claix, religieux lui aussi, qui figure dans de nombreux actes à compter de 1318 :

-       le 26 août 1318, comme témoin au testament du dauphin Jean dans son château de Beauvoir (219),

-       le 10 décembre 1318 comme témoin d’une vente consentie par le dauphin à François de Bardonèche (220),

-       le 17 juillet 1319 comme conseiller et jurisconsulte d’un acte privé (221),

-       le 11 ou 12 mai 1321 comme témoin de l’évêque de Grenoble lors de la confirmation des libertés de la ville de Grenoble (222).

Marchis de Claix est, à cette époque, chanoine de Saint André de Grenoble (223). Le 2 août 1234, témoin à une reconnaissance, il est alors, comme l’avait été avant lui son parent Guillaume de Claix, prévôt de Saint André (224).

Le dauphin Guigues VIII semble l’avoir tenu en grande estime : c’est en effet à lui qu’échoit le 9 mars 1328 l’une des deux commissions delphinales données (225) pour enquêter sur le droit prétendu par Guy de Groslée sur le château de Morestel (226) ; quelques jours plus tard, par une nouvelle commission, le dauphin étend ses prérogatives pour l’instruction des droits dudit Guy de Grolée (227). Peu après, le 4 juillet 1328, Marchis de Claix rend un jugement dans ce différent, en faveur du dauphin (228). On le retrouve ensuite dans divers actes civils, notamment le 1er janvier 1329 (229). Le 20 novembre 1329, il est lieutenant d’Antoine Seignoret, juge mage du Grésivaudan (230).

 

(216)               RD n° 17115

(217)               Dont l’ascendance n’est pas établie et qui figure sous la désignation de « Guillaume III » dans la table récapitulative figurant ci après en annexe 3

(218)               RD n° 18492

(219)               ADI B 3009, RD n° 20180

(220)               ADI B 3009, RD n° 20264

(221)               Regeste supplémentaire n° 3056

(222)               RD n° 21053

(223)               Ibid

(224)               Regeste supplémentaire n° 3319

(225)               L’autre étant donnée à Pierre Pétri, juge mage du Grésivaudan

(226)               RD 23814

(227)               ADI B 2616, RD n° 23821

(228)               ADI B 3309, RD n° 24176

(229)               ADI B 2611, RD n° 25333

(230)               ADI B 4657

 

 

Le 3 juillet 1331, Marchis de Claix est le représentant du dauphin à l’occasion d’un traité entre celui-ci et Bertrand de Dreux, archevêque d’Embrun (231). En cette même année 1331, il est également auditeur des comptes au conseil delphinal (232). Enfin, un acte du 27 juillet 1331 (233) montre qu’il est toujours, en sus de ces diverses charges, prévôt de Saint André. Le dernier acte qui le mentionne est une enquête du 19 février 1332 où il figure en tête d’un aréopage de cinq jurisconsultes et de huit notaires (234).

 

Entre-temps, Guigues ALLEMAN était décédé au cours de l’année 1320 (235). Son fils, Guillaume, né d’un second mariage, lui succède peu après (236). Guillaume ALLEMAN, qui avait épousé le 16 mars 1314 Agnès de VILLARS (237) devient seigneur de Valbonnais et de Claix, terre dont il rend hommage en 1323 (238). Il affranchit alors du droit de « deshominamentum », c'est-à-dire du prélèvement seigneurial sur les successions, vingtain (239), réquisitions, taxes de mouture, pâturage, corvées, les habitants de Valbonnais, du castrum d’Entraigues, du Périer, de Rattier, de Claix et autres castra et mandements de son domaine (240), préfigurant ainsi l’autonomie des communautés qui serait ensuite établie par la création de chartes de franchise.

En 1330, l’infortuné Gilet ALLEMAN, héritier présomptif durant un an de la seigneurie de Claix mais qui n’avait jamais profité, si peu que ce soit, de cet héritage, décède (241). Le 2 novembre de cette même année une procédure pénale a lieu contre Humbert GROS, mistral (242) « de la Dame de Claix », accusé de vol et violences sur la personne de Pierre MATHEYSIN, homme lige du dauphin (243), ce qui tendrait à montrer que l’indivision de fait de la terre de Claix n’allait pas sans poser des problèmes de coexistence. En 1331, interviennent diverses reconnaissances en faveur du chapitre Notre Dame de Grenoble, toujours aussi solidement implanté à Claix, notamment pour des fonds relevant de sa seigneurie de la Balme (244).

 

 

(231)               ADI B 2611, RD n° 25333

(232)               ADI Série B, T 2, f° 80

(233)               ADI B 2611, RD n° 25349

(234)               VALBONNAIS, op. cit. II 230-1 et RD n° 25452

(235)               C. FRENEY (op. cit.) situe, à tort, sa mort en 1323

(236)               Selon M. RIEUTORD (op. cit.) le premier successeur de Guigues aurait été son fils aîné, Jean, mais cette succession aurait été de courte durée, celui-ci n’ayant survécu que deux ans à son père

(237)               ADI B 3974

(238)               M. RIEUTORD, op. cit.

(239)               Le droit dit « de vingtain » était dû au dauphin par les emphytéotes de ses terres, à concurrence de 1/20ème du vin et du blé récoltés ; en contrepartie le dauphin s’engageait à maintenir en bon état les murailles du pays et du château pour la défense des habitants

(240)               L. D. BEZEGHER, op. cit.

(241)               C. FREYNET, op. cit.

(242)               Sur la mistralie, voire note 207 ci avant

(243)               ADI B 4657 f° 101

(244)               ADI B 4214, RD n° 25179 

 

Peu après, en avril 1332 (245) ou en mai (246), Guillaume ALLEMAN décède à son tour. Son fils Hugues – dit Hugonin – lui succède. Le 31 août 1355 il fait dresser un terrier (247) des reconnaissances qui lui sont dues au titre de la terre de Claix (248). Il prête hommage lige au dauphin Humbert II le 20 décembre 1338 avec reconnaissance des fiefs de Valbonnais et du Périer et du château, terre et mandement de Claix lui venant de feu Guillaume ALLEMAN, sauf certains droits du chapitre Notre Dame conformément à la concession faite en 1307 au profit de Guigues ALLEMAN (249).

Hugonin ALLEMAN est le seigneur de Claix au moment de la grande enquête sur la consistance et la valeur des châteaux delphinaux effectuée conjointement par les représentants du pape Benoît XII (250) et par ceux du dauphin (251).

Cette enquête – exceptionnelle – permet d’avoir un aperçu fort intéressant et parfois même une vue exhaustive sur l’état et la consistance des biens delphinaux. Il importe, naturellement, de s’arrêter largement sur l’aspect qu’avaient alors le château, le bourg et le mandement de Claix. On en possède du reste une description très complète, la plus complète d’ailleurs de toutes celles effectuées par les commissaires du dauphin, ce qui est d’ailleurs assez surprenant puisque le château de Claix n’était pas le plus considérable ni le plus stratégique des châteaux delphinaux. Néanmoins, pour des raisons qui nous échappent, les enquêteurs ont fait preuve, à Claix, d’un très grand souci du détail et de la précision. Neuf pages de parchemin sont en effet consacrées à la description de l’ancien château des seigneurs de Claix. La relation intégrale en est la suivante (252) :

 

« Le château est situé sur une roche, près de la cité de Grenoble, dans un lieu très fortifié et agréable et dans le donjon de celui ci il y a une maison carrée

Contenant (lire « renfermant ») en hauteur, sans compter les fondements et les créneaux 11 toises ½, en longueur16 toises, en largeur 13 toises et l’épaisseur des murs est de 4 pieds ½. (253). Dans cette maison il y a un plancher dont la moitié est en bois et l’autre est en pierre. Il y a une cave en pierre. Dans cette maison à la partie inférieure il y a une salle et une chambre qui constituent le rez de chaussée en longueur et la moitié en largeur et dans cette salle il y a une cheminée et une « capella » avec des fenestrages convenables. Dans la chambre il y a une cheminée qui mesure toute la hauteur de cette maison et deux grandes fenêtres et le mur divisant en deux cette salle et cette chambre a une longueur de 4 toises ½ une hauteur de 4 toises et une épaisseur de 4 pouces.

 

(245)               M. RIEUTORD, op. cit.

(246)               C. FREYNET, op. cit.

(247)               Registre contenant le dénombrement des propriétés qui relevaient d’une seigneurie et de leurs redevances ou obligations

(248)               Archives de la Chambre des Comptes du Dauphiné n° 1623 et RD n° 27614

(249)               ADI B 3019, RD n° 29498

(250)               Sur cette enquête papale, voir notamment l’étude de M. l’abbé COFFIN publiée dans la revue d’histoire des AVG, n° 11, juin 1983

(251)               ADI B 4443, f° 95 à 99

(252)               La traduction littérale de la description latine est due à l’obligeance et à la grande connaissance des textes médiévaux de M. l’abbé COFFIN

(253)               1 toise = 1,949 m ; 1 pied = 0,3248 m : 1 pouce = 0,27 m

Dans une autre partie de cette maison, en bas, est une cave en pierre qui égale la longueur de cette maison et la moitié de la largeur et à coté est un vestiaire (« garda roba ») et, dans ce vestiaire il y a une grande fenêtre. Le mur divisant cette salle et cette chambre a une longueur de 14 toises ½, une hauteur de 3 toises et l’épaisseur des murs est de 4 pouces. Dans cette maison, au dessus, il y a une salle construite sur toute la longueur et dans cette salle il y a trois cheminées et sept fenêtres. Toutes les fenêtres de cette salle sont en pierre et contre le mur il y a une belle « chapella » (chapelle).

Aux deux angles de cette maison il y a deux tours rondes dont on donne les mesures : hauteur 4 toises ; circonférence 4 toises ; le mur est d’une épaisseur de deux pieds.

Il y a une autre maison contiguë à cette demeure (les mesures ne sont pas données) et dans cette autre maison il y a deux vestiaires.

En dessous de ce château il y a une autre maison avec un vestiaire contigu à cette maison du côté inférieur contenant : en longueur 6 toises, en largeur 4 toises, en hauteur 5 toises et dont le mur est épais de 2 pieds. Dans cette maison sont deux chambres et une cheminée.

Depuis cette maison jusqu’aux deux chambres il y a un mur long de 10 toises, haut de 5 toises, épais de 4 pieds. Dans ce mur il y a une poterne.

A toutes ces choses évoquées ci dessus est joint un « pellyum » (254) contenant en longueur 6 toises, en largeur 4 toises, en hauteur 5 toises et l’épaisseur des murs est de 4 pieds ½.

A ce « pellyum » touche une cuisine qui a en longueur 6 toises, en largeur 4 toises, en hauteur… (non précisé) et l’épaisseur des murs est de 3 pieds.

A cette cuisine adhère une chambre avec une cheminée démolie et de cette chambre jusqu’à la roche il y a un mur contenant en longueur 16 toises ½ en hauteur 4 toises ½ et l’épaisseur des murs est de 3 pieds ½. Et dans ce mur il y a le portail du château et sur celui ci il y a un petit toit couvert d’essendoles.

En dehors de ces édifices il y a un mur avec un glacis faisant le circuit de ce château sur une longueur de 81 toises. La hauteur de ce mur est de 3 toises ½ et le mur a une épaisseur sur le glacis de 4 pieds. Dans celui ci il y a une poterne.

Suit le bourg (burgus) et le village (villa) de ce château, clos et entouré de murs et de remparts d’une contenance en longueur jusqu’à l’angle de l’église de 140 toises, en hauteur de 4 toises et d’une épaisseur de 3 pieds ½.

Dans ces remparts il y a trois portails en pierre taillée contenant… (les dimensions ne sont pas données).

Les revenus et la valeur de ce château consistent dans les choses suivantes :

- en froment et en seigle                           : 40 sétiers (255)

- en avoine                                                  : 40 sétiers

- en épices                                                   : 1 livre de gingembre

- de poules                                                   : 17

- de poulets                                                  : 19

- deniers                                                       : 100 de bonne monnaie

- pour le port de Claix                                : 40 florins

- La leyde                                                     : 2 florins

- des gauchoirs et battoirs                         : 5 florins

- les trois moulins                                       : 100 sétiers de blé

 

(254)               la traduction de ce mot s’est avérée impossible

(255)               1 sétier = 65,16 l

De même consiste la valeur de ce qu’on perçoit de ce château en « lods » (256).

La récapitulation de tout ce qui précède est estimée à 400 florins.

 

Les propriétés de ce château :

 

-          un jardin situé sous le château, contre la roche, estimé à 8 florins annuellement.

-          Une grange touchant à ce jardin contenant 23 sétérées (257).

-          Des prés et un étang contenant 6 sétérées 1/3.

-          51 flossérées de vigne et 1 sétérée de terres estimées 50 florins annuellement.

-          Un verger avec divers arbres, terres et forêts contigus qui entourent le château et contient 15 sétérées de terre, estimé 10 florins annuellement.

-          Une pièce de prés de 23 sétérées avec une « serva » (vivier ou étang) qui entoure le bourg du château, estimé 20 florins annuellement.

-   Une autre pièce de prés contenant 8 sétérées située vers le port dont le revenu est estimé à 6 florins par an.

-          42 sétérées de terre situées dans le territoire de Rochefort, estimées à 10 florins annuellement.

-          400 fosserées de vignes situées en deux endroits dont l’estimation commune est de 25 florins de revenu annuel.

-    bois et forêts de la Combe contenant l’espace d’une lieue, estimées chaque année à 25 florins de revenu.

-          Deux autres forêts dans le même mandement, à savoir la forêt de « Boneyres » et la forêt de « Fayn » estimées 15 florins annuellement.

-          Trois autres forêts situées sur les rochers et quatre pièces de forêt situées dans la plaine sur la rive du Drac estimées 15 florins annuellement.

Dans ce mandement, dépendant de ce château, sont les paroisses et « villa » (lire « villages ») dans lesquelles sont les feux suivants :

-          paroisse de Claix, 13 hameaux faisant 180 feux

-          paroisse de Cossey, 4 hameaux faisant 42 feux.

Les nobles habitant dans ce mandement :

-          le seigneur Boson de Porte Traine ayant une maison forte (258)

-          Guigues d’Engins

-          François Marchisi ayant une maison forte

-          Pierre de Porte Traine

-          Le chapitre de la Cathédrale de Grenoble ayant une maison forte (259)

-          Amblard de Claix ayant une maison forte.

Le seigneur de Varces tient du seigneur de Valbonnais (260) en hommage du château du Chastelard (261) avec les langues des bœufs (262)) la boucherie de Varces, les bans de peu d’importance et les amendes de fausses mesures.

 

(256)               le lods était un droit d’enregistrement payé par l’emphytéote lorsqu’il vendait des terres accensées par le dauphin

(257)               1 séterée = 3768 m2

(258)               L’actuel château d’Allières

(259)               La Balme

(260)               C'est-à-dire Hugonin ALLEMAN

(261)               Actuel château de Malissoles sur Varces

(262)               Le droit de langue était, à l’origine, perçu en nature puis il le fut en espèces par le préposé chargé de la surveillance de la boucherie

 

Jean des Aures de Varces est homme du seigneur de Balsanet et tient de lui sa maison forte de Varces.

Les mesures du sel de Vif et les amendes de fausses mesures sont tenues de ce seigneur de Valbonnais pour le plaid de 12 deniers à chaque mutation de seigneur ou de propriétaire.

Lantheleme de Varces tient du seigneur de Valbonnais tous les biens, possessions, cens, services, usages qui existent dans le mandement et la paroisse de Varces, de Seyssel (263) de Saint Paul pour le plaid de 5 sous à chaque changement de propriétaire ».

Comme on le voit, cet exceptionnel document donne à la fois une description très précise du château de Claix et des différents bâtiments qui le composaient ainsi que toutes ses possessions, mais aussi il énumère méticuleusement et de façon exhaustive tous ses revenus car il ne faut pas oublier que cet « inventaire à la Prévert » était avant tout destiné à établir l’assiette des biens delphinaux en vue d’une transaction considérable : la vente du Dauphiné (264).

A cette époque, la famille de Claix est encore implantée sur la terre qui fut la sienne. Amblard de Claix, on l’a vu, y a notamment une maison forte (265). Quelle pouvait être la maison forte en question ? Il est possible qu’il s’agisse toujours de celle de Guillaume de CHYPRE, citée dès 1269, et non expressément mentionnée dans le recensement de 1339 ou d’une autre maison forte ; en ce cas, son emplacement reste très aléatoire. Plusieurs sites potentiels sont néanmoins envisageables : la « Grange aux Dames » par exemple au nord du Bourg (266) mais aussi Cossey où le château actuel, trop bien implanté dans un site stratégique à pu succéder à une maison forte d’origine inconnue ou encore la Bâtie, Jayères ou Allières, hameaux de haute origine.

Par ailleurs, un autre membre de la famille, Hugues de Claix, avait alors maison forte à Gières (267). Il faut préciser que les deux seigneuries de Gières et de Claix relevaient en fief du chapitre Notre Dame de Grenoble depuis fort longtemps (268), ce qui peut expliquer qu’une branche de la famille de Claix se soit établie, à une époque ancienne mais indéterminée précisément à Gières (269).

D’autres membres de la famille de Claix apparaissent également à cette période : tout d’abord Thibaud de Claix, cité dans une reconnaissance de février 1334 pour une châtaigneraie à Morétel au mandement de Goncelin (270) que l’on retrouve quelques années plus tard dans les comptes consulaires de Grenoble (271).

 

 

(263)               « Saysselorum Villa » : lieudit aujourd’hui disparu de Saint Paul de Varces cité par PILOT de THOREY dans son « dictionnaire topographique de l’Isère ».

(264)               Voir à cet égard mon étude sur les châteaux delphinaux de la Vallée de la Gresse dans la revue d’histoire des AVG n° 62, décembre 2008

(265)               ADI B 4443

(266)               Actuelle école Saint Pierre

(267)               ADI B 4443 f° 10

(268)               Selon PILOT de THOREY, le mandement de Gières était du fief de l’évêque de Grenoble depuis 1070

(269)               Notamment Catherine de Claix mentionnée en 1299 (supra)

(270)               ADI B 3352, RD n° 26629

(271)               Mgr DEVAUX : comptes consulaires de Grenoble en langue vulgaire (1912)

A deux reprises, dans les comptes de 1338-1339 (272) et dans ceux de 1339-1340 (273), Thibaud de Claix est cité comme créancier des consuls de Grenoble pour une somme jadis prêtée par Marchis de Claix (274). Dans les comptes de 1338-1339, lui est associé son frère François de Claix (275) mais celui-ci n’apparaît plus dans les comptes postérieurs. Leur qualité de créanciers, substitués à Marchis de Claix, ne peut que traduire une étroite parenté (276).

Les mêmes comptes consulaires de 1339-1340 mentionnent également un autre parent, Jehan de Claix, qui exploitait, semble t-il, une taverne quai Perrière à Grenoble (277). Puis un Claude de Claix figure en 1341 dans des reconnaissances passées au profit du seigneur de Saint Pierre (278).

Dans le même temps est cité un autre François de Claix – sans doute différent du frère de Thibaud visé ci avant – qui avait du, à une date incertaine quitter le territoire de ses aïeux et s’établir à la Bâtie de Renage, entre Rives et Beaucroissant. Peut être était-il même déjà décédé à cette époque puisque, par un acte du 4 août 1340, le dauphin donne à son barbier,     Jean de Belue, cette bâtie « qui appartint à François de Claix, à Guillaume de ROYN et au seigneur d’ANJOU… «  sous condition que ses descendants remplissent l’office de barbier des dauphins (279).

Enfin, et surtout, cette période est marquée par la forte présence d’Aymon de Claix, chanoine du chapitre Notre Dame de Grenoble, qui apparaît dès lors dans de nombreux actes. Il est ainsi cité dès le 14 mai 1338 dans les comptes consulaires de Grenoble (280). En 1340, il est auditeur des comptes du conseil delphinal, chanoine de Notre Dame de Grenoble et chapelain du pape (281). Le 16 juin 1340, il est co-signataire d’une lettre adressée à Jean, évêque de Grenoble, alors absent de son diocèse (282). Puis, en sa qualité d’auditeur des comptes delphinaux, il est mentionné dans diverses redditions rendues en 1342 au château de Beauvoir en Royans :

-          le 23 janvier à propos des comptes de la gabelle de Peyrins  (283),

-          le 25 janvier à propos de comptes identiques pour Saint Lattier (284) 

 

 

(272)               RD n° 29632

(273)               RD n° 30152

(274)               Comptes de 1339-1340,  n° 641 : « … Item paye à Tybaut de Claix par laman de Peron Garcin et de Drivet de Losane per 10 mey gagn de II flur d’or de II aux del temps de mossen »

(275)               Comptes de 1338-1339, n° 51 : « … Item mays paeront per la chartra de quitanci de II fluur d’or que doneront Thibauz et Franceys de Claix, frare… »

(276)               Peut être étaient-ils les neveux de Marchis de Claix ?

(277)               Comptes consulaires de 1339-1340, n° 265 : «… Juhausz de Claix taverna a mayson Guillermon Girout en la Peyreri una boci eima a XXXV seyt… »

(278)               Recogniones Caludii de Clays, ADI B 3334

(279)               ADI B 3463, RD n° 30622

(280)               Comptes de 1338-1339, n° 136 : « … payes faites à flur pers les pecions.. Aymo de Claix per la man Juhau de Covana que loura vit preta L II flur… »

(281)               ADI Série B, T 2, page 80

(282)               RD n° 30545

(283)               ADI B 2811, RD n° 31268

(284)               RD n° 31290

Le 18 novembre 1342, il reçoit à Grenoble, dans le palais du dauphin, le compte rendu des monnaies blanches et noires delphinales (285). Toujours à Grenoble, le 20 décembre 1342 il est témoin du dauphin pour l’échange effectué entre celui-ci et Eymeric de Vaulnaveys (286). La dernière mention qui le concerne figure dans un acte épiscopal du 11 mai 1347 : il est alors seulement mentionné comme « chanoine de Grenoble » (287), ce qu’il avait toujours été nonobstant toutes ses autres charges ou distinctions.

Entre temps, et peut être à la demande ou à l’invitation d’Aymon de Claix, le dauphin Humbert II s’était rendu à Claix le 21 juillet 1341 pour une confirmation d’hommage sollicitée par le chevalier Guillaume GRINDE (288). Le même jour, un peu plus tard dans la journée, il reçoit l’hommage de Chabert de Morétel (289) « sur la rivière du Drac, in plastro » (290).

On notera qu’il existe encore, dans l’ancien burgus de Claix, vers l’église, une rue « Humbert II » peut être en souvenir de cette visite. Il parait très vraisemblable d’imaginer qu’ayant passé cette journée à Claix le dauphin ait séjourné – ne fussent que quelques heures – dans son château du lieu. Quoiqu’il en soit, c’est le seul témoignage probant de la visite d’un dauphin à Claix. Mais, dans le même temps, la cession du Dauphiné était engagée de manière irréversible.

Le 23 avril 1343, Humbert II, couvert des dettes que sa mégalomanie et sa prodigalité avaient engendrées, cède en viager à Philippe de Valois, second fils du roi de France, tous ses états pour 120 000 florins et 10 000 livres de rente annuelle (291).

Peu après, lors du « transport du Dauphiné à la France » en juillet 1343, parmi les témoins figure notamment Jehan de Claix (292).

Le 7 juin 1344, un nouveau traité intervient donnant à Humbert II 20 000 florins de plus mais la cession est alors transférée au profit du fils aîné du roi de France (293), ce qui supprime, pour le royaume de France, le danger possible d’une souveraineté rivale. Un an plus tard Humbert II, sans doute davantage pour tromper son ennui que par mysticisme ou par ferveur chrétienne, entreprend une croisade en Terre Sainte : le 2 septembre 1345, près du port de Marseille, après s’être fait nommer « capitaine général du Saint Siège Apostolique et chef de l’armée chrétienne contre les Turcs » et « sur le point d’entreprendre son passage au-delà des mers », Humbert II prend diverses dispositions : il nomme notamment les membres d’un conseil delphinal permanent qui, durant son absence, siègera à Grenoble pour juger les affaires du Dauphiné ; parmi ceux-ci il convient de relever la présence d’Aymon de Claix (294) déjà largement mentionné précédemment. Cette lointaine expédition acheva de vider les caisses delphinales.

 

 

(285)               ADI B  2811, RD n° 31755

(286)               ADI B 2811, RD n° 31821

(287)               ADI B 2615, RD n° 35182

(288)               ADI B 4408, RD n° « 31080

(289)               ADI B 3006, RD n° 31082

(290)               Dans un enclos ou peut être sur le pont de Claix

(291)               RD n° 32009

(292)               G. ALLARD : description historique, op. cit. page 74

(293)                RD n° 32912

(294)               ADI B 3008, RD n° 33984

 

Quand Humbert II revint d’Orient il était alors veuf, sa femme, la dauphine Marie des Baux étant décédée en son absence en 1346. Sans héritier – son fils unique André étant mort accidentellement en 1335 à l’âge de trois ans – Humbert, sur les conseils du pape Clément VI, songea un temps à se remarier mais la diplomatie française fit échouer ce projet. C’est alors qu’il se résolut à l’abdication. Le 30 mars 1349 la cession du Dauphiné à la France devenait alors immédiate, moyennant le versement de 200 000 florins au profit d’Humbert II et d’une rente annuelle de 4000 florins (295).

C’est ce que l’on a subtilement et très diplomatiquement nommé le « transport du Dauphiné à la France » alors qu’il ne s’agissait de rien d’autre que d’une cession pure et simple. Dès lors, Humbert II, le dernier des « dauphins de la troisième race », prenant le froc blanc des dominicains deviendra prieur au couvent de Saint Jacques à Paris puis, fugitivement, patriarche d’Alexandrie. Il allait monter sur le siège archiépiscopal de Paris lorsque, se rendant en Avignon le 22 mai 1355, il décéda à l’étape de Clermont Ferrand (296) : il venait alors d’avoir 42 ans. Ainsi disparut le dernier dauphin.

Dès la cession du Dauphiné devenue effective, le nouveau dauphin, Charles V, investi à Lyon par Humbert II le 16 juillet 1349 (297) séjourne à Grenoble du 10 décembre 1349 à Pâques 1350 et il fait alors hommage au Chapitre Notre Dame de Grenoble pour la part et la juridiction de Claix qu’il avait récupérées du fait du « transport » du Dauphiné au royaume de France.

Mais, la disparition de l’autonomie du Dauphiné n’en avait pas pour autant bouleversé l’ordonnancement des choses quotidiennes à Claix. Par misoneisme, tout autant que par nécessité, les structures delphinales perduraient et la famille de Claix conservait toujours quelques charges importantes. C’est ainsi que l’on trouve, en 1352, Bertrand de Claix auditeur des comptes au conseil delphinal (298) puis trésorier du nouveau dauphin (299). Mais les temps étaient vraisemblablement particulièrement durs et des évènements graves se produisaient alors : la peste noire, la bataille de Poitiers…

Néanmoins à Claix la vie se déroulait selon les rites ancestraux. Le 13 mai 1360, Hugonin ALLEMAN, toujours seigneur de Claix, prête un nouvel hommage au chapitre Notre Dame de Grenoble pour ce qu’il tient en fief et arrière fief  de lui, à la réserve du fief du dauphin (300). Il teste le 16 septembre 1364 (301). Il fait alors divers legs et dote notamment la chapelle Sainte Croix en l’église de Claix (302), fondée peu avant par sa famille dans l’église paroissiale (303). Il décède peu après (304). Guigues ALLEMAN lui succède. La période est alors toujours trouble et difficile : notre région est ravagée de septembre 1374 à la Saint Jean 1375 par les « Grandes Compagnies » (305) composées de mercenaires levés par les anglais et

 

(295)               RD n° 36300 et 36301

(296)               RD n° 36728

(297)               RD n° 36451 et suivants

(298)               Dossier ROYER, op. cit.

(299)               ADI Série B, T 2, page 80

(300)               ADI B 4215

(301)               ADI B 3975

(302)               Qualifiée alors, à tort, d’église : « ecclesia Sancta Crucis de Claix » dans l’acte précité

(303)               Cures et chapelles de Claix 1308- 1757, ADI 4 G 102

(304)               M. RIEUTORD, op. cit.

(305)               ADI B 3355

les français pour faire la guerre et qui, lorsqu’on avait cessé de les payer, s’étaient organisés en bandes armées profitant de leur nombre et de leurs forces pour mettre le pays en coupe réglée…

Au décès de Guigues ALLEMAN (306) – qui ne laissait aucun héritier mâle – les seigneuries de Valbonnais et de Claix firent alors retour au domaine delphinal en vertu d’une clause insérée dans les actes de concession des fiefs ; cette quasi confiscation sera sanctionnée par les arrêts du Parlement de Grenoble des 2 août 1389 et 13 février 1392 et du Parlement de Paris du 10 février 1399 (307).

 

Entre temps, la famille de Claix, bien qu’ayant perdu depuis longtemps tous ses droits sur la seigneurie du lieu, avait néanmoins conservé quelques possessions limitées. C’est ainsi que Michel de Claix, bien qu’ayant perdu depuis longtemps tous ses droits sur la seigneurie du lieu, avait gardé quelques possessions limitées. C’est ainsi que ledit Michel de Claix et sa sœur Béatrix possédaient encore divers biens provenant d’héritages. Michel et  Béatrix de Claix étaient les enfants de feu François de Claix possesseur de son vivant, ainsi qu’on l’a vu, de la Bâtie de Renage et de Catherine BERTRAND – également décédée – fille de feu Raymond BERTRAND, chevalier, établi de son vivant au mandement d’Oisans (308). La succession de Raymond BERTRAND – sans doute ab intestat – avait laissé d’importantes dettes que Michel et Béatrix de Claix n’étaient, semble t-il, pas en mesure d’apurer. C’est à ce moment là qu’apparaît noble LEUTZON LEUTZON, jurisconsulte (309) qui, le 26 février 1364, pour le compte des héritiers souscrit en faveur d’Hugues d’AURIS, créancier du défunt, une obligation par laquelle il promet de payer tout ce que lui devait feu Raymond BERTRAND (310).

A défaut de précisons suffisantes, il semble que LEUTZON LEUTZON ait agi comme intermédiaire, voire en exécution d’un fidéocomis non conservé ou, peut être encore, en anticipation d’un arrangement à établir. Allant dans le sens d’une validation de cette dernière hypothèse, le 20 juin de cette même année intervient une transaction entre Hugues d’AURIS et Michel et Béatrix de Claix, héritiers de Raymond BERTRAND au sujet des sommes qu’il devait audit Hugues d’AURIS. Deux arbitres sont choisis : Nicolas d’ARCES prieur de l’aumône de Saint Hugues et, pour les héritiers, Humbert de Claix, prieur de Saint Nizier. Il est alors convenu qu’ne paiement de 500 florins d’or qui étaient dus à Hugues d’AURIS, les héritiers de Raymond BERTRAND lui cèdent l’usufruit de tous leurs revenus en Oisans (311). Mais ils en conservaient, semble t-il, la nue propriété.

Pue après, le 4 février 1365, Béatrix de Claix apparaît comme mariée à LEUTZON LEUTZON à l’occasion d’une reconnaissance passée au profit de son frère et d’elle-même (312) pour une pièce de terre située au plan de Saint Laurent du Lac (313).

 

 

(306)               1375 ou 1378, date contreversée

(307)               L. D. BEZEGHER, op. cit.

(308)               Raymond BERTRAND est cité à l’occasion d’une procuration donnée le 24 mars 1399 à Claix par Hugues ALLEMAN, RD n° 36288

(309)               Ou LEUTZON de LEUTZON, juge mage selon G. ALLARD op. cit.

(310)               ADI B 3984

(311)               Ibid

(312)               ADI B 4025

(313)               Aujourd’hui Bourg d’Oisans

 

D’autres reconnaissances de même nature et pour le même lieu suivent peu après (314).

Peut être Béatrix de Claix était-elle – dès avant 1364 – l’épouse de LEUTZON LEUTZON – ou sur le point de l’épouser – ce qui pourrait dès lors expliquer l’intermédiation faite par ce dernier ?

Dès lors, Béatrix de Claix semble s’être établie avec son époux en Oisans, soit sur les terres de ses ascendants maternels, soit sur celles de LEUTZON LEUTZON qui apparaît comme originaire de cette région (315).

Cinq années plus tard, le 23 novembre 1370, Hugues d’AURIS rétrocédait à LEUTZON LEUTZON et à Béatrix de Claix les revenus de l’Oisans en échange d’un acompte de 300 florins d’or sur sa créance (316).

La succession de Raymond BERTRAND était ainsi récupérée. Michel de Claix était, quant à lui, resté dans le même temps sur les terres de ses ancêtres. Un acte du 16 mai 1404 (317) montre qu’il possédait en Allières des terres contiguës à celles d’Henri ALLEMAN fils, seigneur d’Allières et peut être de Claix. Dans le même acte en effet, ledit Henri ALLEMAN fils reconnaît tenir du roi dauphin ses biens de Claix : château (318), mandement et cens afférents ainsi que le tènement de la terre de Téonay située en Allières (319). Henri ALLEMAN fils était, comme l’indique son nom, le fils d’Henri ALLEMAN de Séchilienne, marié à Catherine de REVEL, épouse en premières noces de Boson ou Bosonet de PORTE TRAINE, le dernier descendant de cette famille. Au décès de celui-ci (320) et par suite du remariage de sa veuve, Catherine de REVEL, la terre d’Allières était passée aux ALLEMAN (321).

D’Allières, il était aisé de tenter de s’annexer celle de Claix, ce que fit peut être et en tout cas fort épisodiquement Henri ALLEMAN fils.

Il faut à cet égard noter que, dès 1392, une attestation du châtelain de Claix stipule que le château et mandement de Claix appartiennent en pariage (322) à Henri ALLEMAN qui possède le château sans juridiction et au dauphin du fief du chapitre Notre Dame qui y a une terre et la basse juridiction et que le mandement contient deux paroisses, Claix et Saint Jean de Cossey (323).

En octobre 1406, Michel de Claix passe hommage lige pour tout ce qu’il tient de l’héritage de François de Claix et, notamment, une maison forte avec courtil, grange et environ 3 sétérées de pré au lieudit « le pont Meillan » (324) ainsi qu’une terre de 8 sétérées et une vigne de 30 sétérées (325)

(314)               ADI B 3346

(315)               On trouve en effet vers 1250 la mention d’un LEUCZON à la Paute en Oisans

(316)               ADI B 3984

(317)               Ou du 26 mai 1404

(318)               Mais il n’est pas expressément précisé s’il s’agit de celui de Claix ou de celui d’Allières

(319)               L. D. BEZEGHER, op. cit. mais source non identifiée

(320)               Vers 1372

(321)               Sur l’histoire d’Allières, voir mon étude « château et seigneurs d’Allières » in bulletin des AVG n° 12, décembre 1983

(322)               C'est-à-dire une seigneurie partagée entre deux ou plusieurs personnes ayant des droits égaux

(323)               ADI B 3364

(324)               Il s’agit vraisemblablement du même lieu que celui dénommé antérieurement « les granges de Pont Meylat »

(325)               L. D. BEZEGHER op. cit. mais même réserve que pour la note 319

Maigres possessions comparées à celles qui, jadis, étaient celles d’Amblard et Isnard de Claix, ses lointains ascendants. Seule la possession d’une maison forte (326) montrait encore sa condition noble. C’est le dernier acte que l’on ait sur Michel de Claix qui ne semble pas avoir eu d’héritiers et qui fut, vraisemblablement, le dernier descendant de la famille de Claix à résider sur la terre patrimoniale (327). La branche de Gières parait également s’être éteinte – sans doute à défaut d’héritier mâle – dans le même temps. Guigues de Claix (328) apparaît encore comme châtelain de Gières à l’occasion d’un procès en date du 3 septembre 1407 (329). Cette date est, en l’état actuel de mes recherches, celle du dernier document mentionnant un membre de la famille de Claix.

Ainsi, peu après le début du 15ème siècle, la famille de Claix – que Rivoire de la Bâtie avait fait prématurément s’éteindre « en 1390 dans le Trièves » (330) n’existe quasiment plus sur la terre de Claix (331).

Triste disparition d’une famille qui fut illustre et qui, par le dévouement qu’elle manifesta toujours à l’église de Grenoble, facilita la tâche du Chapitre Notre Dame pour devenir le co-seigneur permanent et effectif de Claix, rôle qu’il conservera jusqu’à la Révolution.

De leur côté, les Alleman en dépit d’un nombre considérable de branches allaient connaître ultérieurement la même mauvaise fortune. La terre de Claix, peut être reconquise un temps vers la fin du 14ème siècle, leur échappera peu après définitivement.

Le 4 novembre 1421 en effet, - peut être Michel de Claix était-il encore de ce monde ? – par la volonté de Charles VII, la terre de Claix passera à Jean, bâtard d’Orléans, le futur comte de Dunois.

Mais, selon la formule consacrée, ceci est une autre histoire…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(326)               dont l’emplacement n’est pas identifié

(327)               Seule la connaissance des actes de baptêmes, mariages ou décès de la période pourrait confirmer – ou infirmer – ce postulat. Malheureusement, les registres BMS de Claix, pourtant parmi les plus anciens conservés, ne débutent qu’en 1599 (archives municipales de Claix)

(328)               Sans doute descendant d’Hugues de Claix

(329)               ADI H 26

(330)               RIVOIRE de la BATIE, op. cit.

(331)               Sous la réserve faite note 328 ci avant

 

ANNEXE 1

 

                Evolution du nom et de l’orthographe de Claix

 

Peu de terres dauphinoises ont vu autant d’orthographes différentes que celle de Claix. Ainsi :

 

Vers 1100 : ecclesia de Clais (cartulaires de Saint Hugues, 192)

1189 : D. de Clays (ADI B 2960, 485)

1226 : Bordaria de Clays (Chapitre de Saint André de Grenoble)

Milieu du 1ème siècle : Umbertus de Clasio (ADI B 4215)

1256 : mandamentum de Clay (ADI B 2987)

1280 : Clasium (Valbonnais II, 50)

Vers 1285 : Apad Claysium (Histoire de la maison de Beaumont, II, 22)

1289 : Clasium (Valbonnais, II, 50)

1293 : obit de Guillaume de Claies (ADI B 3354)

1296 : mandamentum de Claysio (ADI B 3660)

1313 : portus de Cleyssio (ADI B 2949, f° 747)

1318 : Marchis de Glayssio (ADI B 3009)

1319 : Marchis de Closix (Regeste supplémentaire n° 3056)

1331 : Marchis de Claiso (ADI B 2611)

1347 : ecclesia de Clayes (Valbonnais I, 85)

1374 : podium Claysii (comptes de Grésivaudan, f° 24)

1376 : apud Claysum (comptes de Grésivaudan)

1413 : Claisium (ADI B 2630)

1421 : Claye (ADI B 3044)

1458 : Claysium, mansus burgus Claysii (ADI B 2749)

1471 : Cleys (comptes de Grenoble)

1497 : ecclesia Sancti Petri de Claisio (cartulaires de Saint Hugues, 351)

1527 : rivus Claysü (prêt d’Aymon)

1540 : Claiz (famille Bérenger)

1588 : Cles (journal de Lesdiguières)

1706 : Clay, Claix (état des feux)

1757 : Clays (état des terres)

A compter de 1789 : Claix (archives municipales de Claix)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES DAUPHINS : repères chronologiques

 

Dauphins de la première race :

 

1040 – 1075 : Guigues 1er dit le Vieil

1075 – 1080 : Guigues II dit le Gras

1080 – 1125 : Guigues III dit le Comte

1125 – 1142 : Guigues IV dit Guigues Dauphin

1142 – 1162 : Guigues V

 

Dauphins de la deuxième race :

 

1162 – 1192 : Béatrix, épouse de Hugues III duc de Bourgogne

1192 – 1236 : Guigues VI dit Guigues André

1237 – 1270 : Guigues VII

1270 – 1282 : Jean 1er (sans héritier autre que sa sœur, Anne, épouse d’Humbert baron de la Tour du Pin

1282 – 1307 : Humbert 1er

 

Dauphins de la troisième race :

 

1307 – 1318 : Jean II époux de Béatrix de Hongrie

1319 – 1333 : Guigues VIII, époux d’Isabelle sœur du roi de France

1333 – 1349 : Humbert II (frère de Guigues)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE 3 : index des personnages cités

 

Après divers essais, que j’ai jugés non concluants, j’ai renoncé à établir un arbre généalogique ou ce qui aurait pu lui ressembler. J’ai estimé préférable et plus pratique d’établir l’index qui suit.

 

Famille de Claix :

 

AMBLARD                           1223 : frère d’Isnard (Chorier)

                                               1246 : chevalier, frère d’Isnard (B 4215)

                                               1257 : père de Guillaume (RD)

                                               1266 : époux de Fine, fille de Guigues de Champs (Royer)

AMBLARD

(différent du précédent ?)  1285 : père de Guillet (B 4025)

                                               1285 : frère de Guillaume (?) (Chorier)

                                                1300 : père de Guillet

AMBLARD                           1339 : a maison forte à Claix (B 4443)

AYMON                                1338 (comptes consulaires de Grenoble)

                                               1340 : chanoine de Notre Dame de Grenoble (RD)

                                               1340 : chapelain du pape (ADI série B)

                                               1342 : auditeur des comptes (RD)

                                               1345 : conseiller delphinal (RD)

                                               1347 : chanoine de Grenoble (RD)

BEATRIX                              1364 : fille de François de Claix (B 3984)

                                               1364 : sœur de Michel de Claix (B 4025)

                                               1365 : femme de Leutzon Leutzon (B 4025)

                                               1370 : d° (B 3984)

BERTRAND                                    1352 : auditeur des comptes et trésorier delphinal (B T 2)

CATHERINE                        1269 : à Murianette (RD)

CHABERT                            1246 : offcial de Grenoble (Royer)

CLAUDE                              1341 : (B 3334)

« DAME de CLAIX »           1330 : (B 4657)

DIDIER                                 1319 : « vestiaire » (RD)

DIDIER                                 1275/6 : frère de Marquis et de Gontier (B 4391)

ESTIBORS                           Vers 1273 : veuve de Chabert de Clerieu (RD) et sœur de Guillaume, prévôt (Chorier par extrapolation)

FRANCOIS                          Avant 1340 : Renage (B 3463)

                                               Père de Michel et Béatrix (B 3984)

                                               Mari de Catherine Bertrand (RD)

FRANCOIS                          1338/9 : frère de Thibaut (comptes consulaires de Grenoble)

GAUTIER, GONTIER          1275/6 : frère de Marquis et de Didier (B 4391)

                                               1277 : prieur de Risset (B 4281)

GERALDUS, GIRALDUS 1108/1111 : chanoine de Grenoble (Cartulaires de St Hugues)

GILET ou GUILLET             1285 : fils d’Amblard, neveu de Guillaume (RD)

                                               1292 : (B 4420)

GIRARD                                1307 : sacristain de Notre Dame (B 4215)

GUICHARD                          Vers 1273 : époux de Clémence (B 3317)

GUIGUES                             1272 : chanoine de Saint André (Bezegher, source non connue)

GUIGUES                             1407 : châtelain de Gières (RD)

GUILLAUME I (Villelm)      1226 : frère d’Amblard ( ?) (Chorier et Royer)

                                               1250 : juge de Grésivaudan et chanoine de St André (RD)

                                               1251 : juge à la cour delphinale (RD)

                                               1252/3 : chanoine de Saint André (RD)

                                               1255 : procureur de l’évêque (B 3266)

                                               1258 : prévôt de Saint André de Grenoble (RD)

                                               1261 : (archives des Bouches du Rhône, B 1130)

                                               1262 à 1267 : prévôt de Saint André (RD)

                                               1270 à 1278 : prévôt de Saint André (B 4215 et B 4157)

                                               1285 : oncle de Chabert et de Guichard de Clerieu (Chorier)

                                               + vers 1285 (Royer) ou 1286 (Chorier)

                                               1293 : prévôt de Saint André (RD)

                                               1293 : obit (RD)

GUILLAUME II                     1257 : damoiseau, fils d’Amblard (RD)

                                               1266 : chevalier (B 3266)

                                               1266 : seigneur de Claix avec Amblard (B 3266)

                                               1269 : père d’Isoard (B 3266)

                                               1273 : chevalier (B 4391)

                                               1276 : chevalier (RD)

                                               1280 : seigneur de Claix (B 4215)

                                               1280 : chevalier (RD)

                                               1280 : noble (Royer)

                                               1284 : seigneur de Claix (RD)

                                               1285 : chevalier, oncle de Guillet (?) (RD)

                                               1288 : (RD)

                                               1289 : mari de Marguerite Grassi (RD)

                                               1290 : mari de Marguerite Alleman, fille d’Odon Alleman (B 3983)

                                               1291 : chevalier (RD)

                                               1295 : (RD)

                                               1301/2 : fils de feu Amblard (B 4025)

GUILLAUME III                    1312 : damoiseau (RD)

GUILLAUME ?                     1270 : partage de ses terres au profit du chapitre de Vienne (RD)

HUGUES                              1339 : Gières (B 4443)

HUMBERT                           1364 : prieur de Saint Nizier (B 3984)

ISNARD, ISOARD, YSCARD, YSOARD

                                               1223 : frère d’Amblard (Chorier)

                                               1246 : chevalier, frère d’Amblard (B 4215)

                                               1251 : père d’Ysnardet (RD)

                                               1271 : seigneur de Claix (RD)

                                               1278 : (B 4215)

                                               1278 : tuteur des enfants d’Amblard (?) (RD)

ISNARD, ISOARD (sans doute différent du précédent)

                                               1286/7 : seigneur de Claix (RD)

                                               1300 : seigneur de Claix (B 3660)

ISNARD, ISOARD, IZOARD (II)

                                               1269/70 : fils de Guillaume (II) (B 3266)

                                               1272 : damoiseau (B 3317)

                                               1275/6 : damoiseau (RD)

                                               1278 : damoiseau (B 4215)

                                               1279 : noble (Royer)

                                               1281 : (B 4025)

1290    : damoiseau (RD)

1300 : damoiseau (B 4215)

ISNARD, YSCARDET, YSNARDET :

                                               1251 : fils d’Isnard, époux de Marguerite du Gua (RD)

JEHAN                                  1339/40 : (comptes consulaires de Grenoble)

LANTELME                          1273 : chanoine d’Oulx (Royer)

                                               1275 : prieur de Saint Pierre de Grenoble (Bezegher)

MARC, MARCHIS, MARQUET, MARQUIS, MARQUISON (peut être le suivant ?)

                                               1275/6 : frère de Gontier et Didier (B 4391)

1291    : (B 3354)

1318 : (B 3009 et RD 20264)

1319 : jurisconsulte (RD)

1321 : chanoine de Saint André (RD)

1324/28 : prévôt de Saint André (RD)

1329 : prévôt de Saint André et juge mage du Grésivaudan (B 2612 et B 4657)

1331 : prévôt de Saint André et auditeur des comptes delphinaux (B 2611 et RD)

1332 : prévôt de Saint André (RD)

1340 : (RD)

MARCHIS, « MS »              1236/7 : (RD)

                                               1266 : (B 3266)

MICHEL                                1364 : fils de François et de Catherine Bertrand et frère de Béatrix (B 3984)

                                               1365 : noble (B 3346)

                                               1404 (Bezegher, source inconnue)

                                               1406 (Bezegher, source inconnue)

NANTELME                         1286 : prieur de Saint Jean de Grenoble (Chorier)

PIERRE                                1272 : exécuteur testamentaire de Chabert de Clerieu (Royer)

THIBAUD                              1334 : Goncelin (B 352)

                                               1338/9 : père de François (comptes consulaires de Grenoble)

                                               1339/40 : neveu de Marchis ? (comptes consulaires de Grenoble)

UMBERTUS                         1246 : « officialis » (B 4215)

 

Autres familles citées :

 

ALLEMAN

 

GILET I                                  fils d’Odon (1er mariage)

GILET II                                 fils d’Odon (second mariage)

GUIGUES II ou GUIGONNET fils d’Odon et de Catherine Bérenger, époux de Sibille de Clérieu puis d’Eléonor de Roussillon (+ en 1320

GUILLAUME                        fils de Guigues et époux d’Agnès de Villard ( + 1332)

HUGUES dit HUGONIN     fils de Guillaume auquel il succède en 1332 (+ en 1364)

JEAN                                     fils de de Guigues II. Lui succède en 1320 (+ en 1322)

MARGUERITE                     fille d’Odon. Epouse en premières noces en 1268 Guy de Montluel et en secondes noces en 1290 Guillaume de Claix

ODON (Eudes VI dit l’)       marié en premières noces avec Catherine de Bérenger (10 enfants) et en secondes noces avec Sybille d’Aix (2 enfants, Gillet II et Saurette)

 

CHYPRE

 

GUILLAUME                        fils de Didier

RAYNAUD                           frère de Guillaume et fils de Didier (les deux héritent de Boveria avant 1281)

 

CLERIEU

 

BOVERIA                             1215 : veuve de Girard de Clérieu

CHABERT                            1250 : châtelain de la Buissière

DIDIER                                  fils de Girard

ESTIBORS                           1273 : sœur de Guillaume de Claix, femme de Chabert

GIRARD                                père de Chabert, marié à Boveria (1215)

GUILLAUME                        fils de Girard

GILLET                                  fils de Chabert

GUIGUES, GONTIER et CHABERT / FILS DE Chabert et Estibors et neveux de Guillaume de Claix, prévôt

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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